Droit pénal
De l’impossibilite d’interjeter appel
des ordonnances de renvoi du juge d’instruction
Toutes les personnes mises en examen devraient-elles avoir le droit d’interjeter appel de toutes les décisions prises à leur encontre par le juge d’instruction ?
On le sait, la décision de mise en examen puis, par la suite, la décision de renvoi devant un tribunal correctionnel sont des décisions extrêmement graves, qui démontrent le pouvoir du juge d’instruction.
Or, complexe et incomplet, le système actuel est inégalitaire. Le procureur de la République peut interjeter appel devant la chambre de l’instruction de toute ordonnance du juge d’instruction (Code de procédure pénale, article 185).
La discrimination qu’opère le Code de procédure pénale entre accusation et défense est manifeste et préjudiciable puisque la défense, elle, ne peut pas en effet interjeter appel des deux décisions les plus graves du juge d’instruction, à savoir la décision mise en examen et la décision de renvoi devant le tribunal correctionnel.
Pour la décision de mise en examen, c’est la loi du 15 juin 2000 qui a ouvert une action en nullité des mises en examen, donc, justifiée par des indices suffisants devant la chambre de l’instruction (article 80-1) mais, s’agissant d’une appréciation des faits, un appel n’est pas prévu. On ne peut donc sur l’opportunité contester la mise en examen sur le fond.
Plus préjudiciable à la défense et plus étonnante en matière d’égalité des droits est l’impossibilité de faire appel des ordonnances de renvoi devant le tribunal correctionnel, depuis la loi du 15 juin 2000 (article 181).
Les décisions de renvoi devant le tribunal correctionnel, sauf exception, alors que les décisions de renvoi devant la cour d’assises peuvent, quant à elles, faire l’objet d’un appel, inscrites par la personne mise en examen, ne peuvent pas faire l’objet d’appel.
Rien ne justifie ces différences de régime entre les ordonnances de renvoi devant le tribunal correctionnel et celles devant la cour d’assises si ce n’est la gravité des infractions.
Saisi d’une QPC, le Conseil constitutionnel a adopté une position médiane considérant que ce dispositif d’appel était nécessaire à une bonne administration de la justice à la condition que, dans tous les cas, la personne mise en examen puisse faire valoir ses droits dans la suite de la procédure et notamment devant la juridiction du jugement (décision du 13 juin 2011, QPC du Conseil constitutionnel numéro 2011-153).
Pour nous, seule la reconnaissance d’un droit d’appel de la personne mise en examen à l’encontre de toutes les ordonnances prises par le juge d’instruction la concernant et notamment des décisions de mise en examen et de renvoi devant le tribunal correctionnel répondrait à l’exigence du droit à l’exercice effectif d’un recours vers la défense à l’encontre de toute décision de poursuite.
Lexique :
Décision ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel : décision prise par le juge d’instruction à l’issue de son information lorsqu’il existe des charges suffisantes pour poursuivre une personne et la renvoyer devant la juridiction de jugement, à savoir le tribunal correctionnel.
Ordonnance de mise en examen : décision prise à l’ouverture de l’information ; donne le statut de mis en examen à la personne qui lui donne accès au dossier et la possibilité de formuler des demandes tout au cours de l’instruction ; doit être représentée par un avocat.
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