Un arrêt du Conseil d’Etat du 10 mars 2010 vient de préciser les modalités de récupération des points de permis d’une manière favorable au conducteur.
La problématique est la suivante. La notification de la lettre 48SI annonce au conducteur la perte totale de tous ses et points et donc l’annulation de son permis de conduire.
A compter de cette notification, le conducteur a-t-il la possibilité de contester cette décision dans un délai de deux mois par la voie d’un recours gracieux auprès du Ministère de l’Intérieur, par la voie d’un référé suspension auprès du Tribunal administratif et par la voie d’une requête en annulation auprès du Tribunal administratif.
Le point de départ de ces recours est l’envoi de la lettre recommandée par l’Administration.
Néanmoins, le Conseil d’Etat a dû se prononcer sur la problématique de la tardiveté des demandes et des notifications irrégulières.
Que se passe-t-il lorsque la personne ne reçoit jamais la lettre 48SI ?
Que se passe-t-il quand la personne reçoit la lettre 48SI à la mauvaise adresse ?
Que se passe-t-il enfin lorsque, sans avoir reçu la lettre 48SI, la personne s’inscrit à un stage de récupération de points qui lui entraine un crédit de quatre points sur un permis qui est d’ores et déjà invalide alors que le conducteur n’est pas informé ?
Le Conseil d’Etat vient de rendre une décision riche d’enseignement et qui semble être favorable au conducteur. Il avait déjà été confirmé par un arrêt du 13 mars 2009 en ce qui concerne la question des fameux courriers « n’habite pas à l’adresse indiquée », les courriers d’invalidation de permis de conduire envoyés à une mauvaise adresse et retournés à l’expéditeur avec cette mention ne sont pas susceptibles de faire courir les délais de deux mois.
Dès lors, le conducteur, alors même qu’il n’a pas signalé son changement d’adresse aux services compétents, la présentation à une adresse où il ne réside plus du pli notifiant une décision relative à son permis de conduire et prise à l’initiative de l’Administration, n’est pas de nature à faire courir à son encontre le délai du recours contentieux (Conseil d’Etat 18 septembre 2009).
Dans l’arrêt qui nous intéresse, la personne était dans cette hypothèse.
Elle n’avait pas reçu ou reçu à la mauvaise adresse la lettre 48SI et entre temps, après l’envoi de la lettre 48SI, elle s’était inscrite à un stage de sensibilisation à la sécurité routière. Elle ressort de son stage avec une lettre de validation et attend qu’on lui crédite les quatre points.
Or, elle apprend par la suite dans le cadre d’un contrôle que le permis est invalidé. Que devient-il de ses quatre points ?
Sans se prononcer de manière définitive sur le retour au crédit de ces quatre points, le Conseil d’Etat considère dans cet arrêt du 10 mars que :
« Considérant que le moyen tiré de ce que faute d’avoir reçu notification de la décision ministérielle du 31 janvier 2009, Madame A était en droit de bénéficier d’un crédit de quatre points à la suite du stage de sensibilisation à la sécurité routière qu’elle a effectué en février 2010 est de nature à créer en l’état du dossier soumis au Juge des référés un doute sérieux quant à la légalité de la décision en litige. »
Cet attendu est donc important. Il permet d’espérer qu’au fond, les quatre points seront bien crédités à la personne qui a passé son stage alors qu’elle n’a pas eu de notification régulière de la lettre 48SI. Il permet en tout cas d’invoquer au stade des référés la notion de doute sur la légalité. Or, le fait que le Conseil d’Etat retienne cet élément comme un élément susceptible de faire naitre un doute sérieux sur la légalité de l’annulation permet dans cette affaire, au stade des référés, de voir suspendus les effets de l’annulation à titre provisoire. On rappellera qu’en matière de référé, le Tribunal administratif retient deux critères : l’urgence et le doute sur la légalité de la décision attaquée. En l’espèce, le problème du stage est bien un élément sérieux de doute sur la légalité de la décision attaquée.
Voilà qui pourrait ouvrir un grand nombre de référés à des personnes qui ont entamé un stage alors qu’elles n’ont jamais reçu la 48SI et qui n’ont d’ailleurs pas été informées lors de leur inscription à leur stage de l’annulation du permis de conduire.
Petit bémol sur l’efficacité de cette décision : l’urgence sera toujours appréciée au regard de la qualité du requérant, à savoir d’un point de vue professionnel le caractère indispensable du permis de conduire. La jurisprudence retient donc l’urgence de manière restrictive. En pratique, elle est réservée aux ambulanciers, taxis, chauffeurs, toute personne qui travaille d’une manière incontestable avec son permis de conduire et qui est en mesure de rapporter la preuve d’un licenciement certain du fait de l’annulation du permis.
Cette décision s’inscrit dans une tendance qui nous semble tout à fait favorable.
Peut-être est-ce lié au fait de vouloir pallier l’augmentation sensible des invalidations de permis de conduire ?
En toute hypothèse, le référé reste la seule solution pour pouvoir reconduire en toute légalité dans la période de six mois de suspension à compter de la restitution du permis de conduire.
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