Dans un arrêt du 17 novembre 2021 (N° 20-14.848), publié au bulletin, la chambre sociale de la Cour de cassation a statué sur l’octroi de l’indemnité de préavis au salarié dont le licenciement pour absence prolongée est dénué de cause réelle et sérieuse.
Un salarié engagé en qualité de VRP a fait l’objet d’un arrêt de travail à compter du 18 janvier 2014 prolongé de manière successive pendant 18 mois, soit jusqu’au 31 août 2015.
Le 24 juillet 2015, il a été licencié pour absences prolongées ayant entraîné une perturbation de l’entreprise et la nécessité d’un remplacement définitif. Il a saisi la juridiction prud’homale pour contester son licenciement.
L’affaire est portée devant la cour d’appel qui a condamné l’employeur à verser au salarié une somme à titre d’indemnité compensatrice de préavis et au titre des congés payés afférents. L’employeur a formé un pourvoi en cassation.
La Cour de cassation devait s’interroger sur la question de l’octroi au salarié de l’indemnité de préavis et les congés payés afférents en cas de licenciement prononcé pour absence prolongée désorganisant l’entreprise et rendant nécessaire le remplacement définitif de l’intéressé.
La solution, rendue au visa de l’article L. 1234-5 du code du travail, est claire : lorsque le licenciement, prononcé pour absence prolongée désorganisant l’entreprise et rendant nécessaire le remplacement définitif du salarié, est dépourvu de cause réelle et sérieuse, le juge doit accorder au salarié, qui le demande, l’indemnité de préavis et les congés payés afférents.
La cour d’appel avait constaté que l’existence d’une désorganisation d’un service essentiel de l’entreprise n’était pas établie par l’employeur, en sorte que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse. Elle en a exactement déduit, selon la Cour de cassation, que le salarié avait droit au paiement d’une indemnité compensatrice de préavis nonobstant son arrêt de travail pour maladie au cours de cette période.
Cet arrêt fait écho à ce qu’avait décidé la cour d’appel de Poitiers dans une décision de 2007 : « si un salarié ne peut en principe prétendre au paiement d'une indemnité pour un préavis qu'il est dans l'impossibilité physique d'exécuter en raison d'une maladie prolongée ou d'absences répétées, cette indemnité est due au salarié dont le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse faute pour l'employeur de justifier de la nécessité de son remplacement définitif » (CA Poitiers, ch. soc., 27 novembre 2007, n° 05-3780).
La décision rendue par la Cour de cassation consacre avec autorité ce principe, en faisant échec à toute argumentation juridique, comme celle invoquée par l’employeur dans son pourvoi en cassation, limitée au principe selon lequel le salarié ne peut prétendre au paiement d’une indemnité compensatrice de préavis s’il est dans l’impossibilité de l’effectuer.
Cette solution ne constitue en réalité que le prolongement de la jurisprudence bien établie en cas de manquement de l’employeur à son obligation de reclassement consécutive à l’inaptitude : « si le salarié ne peut en principe prétendre au paiement d'une indemnité pour un préavis qu'il est dans l'impossibilité physique d'exécuter en raison d'une inaptitude à son emploi, cette indemnité est due au salarié dont le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse en raison du manquement de l'employeur à son obligation de reclassement consécutive à l'inaptitude » (Cass. Soc., 6 mai 2015, n° 13-17.229 ; Cass. Soc., 7 mars 2012, n° 10-18.118).
Il convient toutefois de préciser que le bénéfice de l’indemnité de préavis n’est pas automatique en ce sens que le salarié doit en faire la demande au juge pour qu’elle lui soit accordée, suite à la démonstration de ce que le licenciement pour absence prolongée est dénué de cause réelle et sérieuse.
Jérémy DUCLOS
Avocat à la Cour
Spécialiste en droit du travail