Le licenciement pour insuffisance professionnelle ouvre droit pour le salarié à un délai de prévenance, appelé préavis ou délai-congé, que doit respecter l’employeur.
Il ouvre également droit pour le salarié au versement de l’indemnité (légale ou conventionnelle) de licenciement, calculée selon l’ancienneté du salarié dans l’entreprise.
Au cours du préavis, l’employeur dispose de la faculté de rompre immédiatement le contrat de travail en cas de faute grave ou lourde du salarié. Dans ce cas, la question du calcul de l’indemnité de licenciement se pose.
Pour calculer l’indemnité de licenciement, l’employeur doit-il prendre en compte dans l’ancienneté l’intégralité de la période de préavis ou bien seulement la part de préavis exécutée par le salarié ?
Dans un arrêt du 11 septembre 2019 (n° 18-12.606), publié au bulletin, la chambre sociale de la Cour de cassation a jugé que l’interruption du préavis pour faute grave doit être prise en compte pour déterminer le montant de l’indemnité de licenciement.
Dans les faits, il était question d’une salariée licenciée pour insuffisance professionnelle avec un préavis de six mois (non dispensé). Elle s’est vue notifier la rupture immédiate de son contrat de travail pour faute grave quelques jours après.
Selon elle, pour déterminer le montant de l’indemnité de licenciement, l’ancienneté du salarié doit être calculée à la date d’expiration du délai normal de préavis, qu’il ait été ou non exécuté.
La Cour de cassation rejette cette position. Elle précise tout d’abord que si le droit à l’indemnité de licenciement naît à la date où le licenciement est notifié, l’évaluation du montant de l’indemnité est faite en tenant compte de l’ancienneté à l’expiration du contrat.
Elle indique ensuite que la faute grave commise au cours de l’exécution du préavis par le salarié, qui n’en est pas dispensé, a pour effet d’interrompre le préavis. Cette interruption doit être prise en compte pour calculer le montant de l’indemnité de licenciement.
La Cour de cassation avait déjà tenu un raisonnement similaire au sujet de l’indemnité compensatrice de préavis (Cass. Soc., 22 janvier 1991, n° 86-40.617 ; Cass. Soc., 12 décembre 2001, n° 99-45.290 : la faute interrompt le préavis et prive le salarié de la partie de l'indemnité compensatrice de préavis correspondant à celle de la période restant à courir jusqu'au terme du préavis).
Elle s’était également prononcée sur le fait que la commission d’une faute grave ou lourde commise au cours du préavis ne prive pas le salarié de l’indemnité de licenciement (Cass. Soc., 23 octobre 1991, n° 88-43.008 ; Cass, Soc., 11 mai 1993, n° 89-43.359).
Cependant, elle ne s’était en revanche jamais positionnée sur le montant de l’indemnité de licenciement en cas d’interruption du préavis pour faute grave, ce qui vient renforcer l’intérêt suscité par cette décision.
Jérémy DUCLOS
Avocat à la Cour