Dans un arrêt du 13 octobre 2021 (N° 19-24.540), publié au bulletin, la chambre sociale de la Cour de cassation s’est prononcée sur les conséquences indemnitaires de la rupture anticipée par l’employeur du contrat de travail à durée déterminée associé à un emploi d’avenir.
Un salarié a été engagé par une commune suivant un contrat emploi d’avenir d’une durée de trente-six mois, en qualité d’agent technique. Moins d’un an après, son employeur lui a notifié la rupture de son contrat de travail.
Contestant le bien-fondé de la rupture de son contrat de travail, le salarié a saisi la juridiction prud’homale de diverses demandes.
L’affaire a été portée devant la cour d’appel qui a limité la condamnation de l’employeur à verser au salarié une certaine somme à titre de dommages-intérêts pour rupture sans cause réelle et sérieuse.
La juridiction d’appel a considéré que l’employeur ne s’était pas placé dans l’un des cas de rupture prévus à l’article L. 1243-1 du code du travail à savoir la faute grave, la force majeure ou l’inaptitude, de sorte que la sanction prévue par l’article L. 1243-4 de ce code n’a pas vocation à s’appliquer.
Elle en a déduit que le salarié, victime d’une rupture prématurée, ne peut prétendre qu’à une indemnisation correspondant au préjudice subi et non aux rémunérations qu’il aurait perçues jusqu’au terme du contrat.
L’affaire est portée devant la Cour de cassation qui devait répondre à la question de savoir si la rupture anticipée du contrat de travail à durée déterminée associé à un emploi d’avenir en dehors des cas de rupture prévus par la loi ouvre droit pour le salarié à des dommages et intérêts d'un montant au moins égal aux rémunérations qu'il aurait perçues jusqu'au terme du contrat, en application de l’article L. 1243-4 du code du travail.
La Cour de cassation vient rappeler les dispositions de l’article L. 5134-115 du code du travail selon lesquelles le contrat de travail associé à un emploi d'avenir peut être à durée indéterminée ou à durée déterminée. Lorsqu'il est à durée déterminée, il est conclu pour une durée de trente-six mois.
Sans préjudice des dispositions de l'article L. 1243-1, il peut être rompu à l'expiration de chacune des périodes annuelles de son exécution à l'initiative du salarié, moyennant le respect d'un préavis de deux semaines, ou de l'employeur, s'il justifie d'une cause réelle et sérieuse, moyennant le respect d'un préavis d'un mois et de la procédure prévue à l'article L. 1232-2.
En l’occurrence, la rupture anticipée par l’employeur du contrat emploi d’avenir intervenait en dehors des cas prévus par la loi et il n’y avait donc aucune raison valable qu’il soit exclu du dispositif de l’article L. 1243-4 du code du travail prévoyant un régime spécifique d’indemnisation.
C’est que le contrat emploi d’avenir n’en est pas moins un contrat à durée déterminée, c’est-à-dire un contrat de travail atypique, précaire, qui doit bénéficier comme tel d’un système d’indemnisation à tout le moins plus favorable, en tout cas différent du mécanisme indemnitaire propre au contrat à durée indéterminée de travail.
Bien qu’il ne soit plus possible de conclure un contrat emploi d’avenir suite à la suppression du dispositif légal (les contrats emploi d’avenir ont pris fin le 31 décembre 2020), le raisonnement suivi par la Cour de cassation dans cet arrêt n’en reste pas moins intéressant d’un point de vue indemnitaire.
En effet, le versement des rémunérations non perçues jusqu’au terme du contrat peut correspondre à un montant supérieur à celui relatif à l’indemnisation au titre du préjudice subi par le salarié, et ce d’autant plus si celui-ci parvient à conclure sans trop de délai un autre contrat de travail par la suite.
Jérémy DUCLOS
Avocat à la Cour
Spécialiste en droit du travail