CJUE, 7 avr. 2022, aff. C-249/21 , Fuhrmann-2
Par un arrêt du 7 avril 2022, la Cour de justice affirme que lorsqu'un contrat à distance est conclu par voie électronique au moyen d'un processus de commande et s'accompagne d'une obligation de paiement pour le consommateur, ce dernier doit pouvoir comprendre sans ambiguïté qu'il sera obligé de payer dès qu'il cliquera sur le bouton de commande. Et, pour déterminer, dans le cadre de ce processus, si une formule inscrite sur le bouton de commande telle que « finaliser la réservation » est « analogue » à la mention « commande avec obligation de paiement », il convient de se fonder sur la seule mention figurant sur ce bouton.
En l'espèce, il était demandé à la Cour si l'article 8, § 2, second alinéa, de la directive 2011/83 relative aux droits des consommateurs doit être interprété en ce que, pour déterminer si un bouton dont l'activation fait partie d'un processus de commande dans le cadre d'un contrat à distance conclu par voie électronique qui ne porte pas la mention « commande avec obligation de paiement », porte une formule analogue, dénuée d'ambiguïté indiquant que passer la commande oblige à payer le professionnel, il convient de se fonder exclusivement sur la mention inscrite sur le bouton ?
La Cour de justice répond par l'affirmative.
Elle rappelle tout d'abord que, dans l'hypothèse d'un tel contrat, le professionnel doit :
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fournir au consommateur, directement avant la passation de la commande, les informations essentielles relatives au contrat et,
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informer explicitement ledit consommateur que, en passant la commande, ce dernier est tenu par une obligation de paiement.
S'agissant de cette dernière obligation, le bouton de commande ou la fonction similaire doit porter une mention facilement lisible et dénuée d'ambiguïté indiquant que le fait de passer la commande oblige le consommateur à payer le professionnel. Et le consommateur n'a pas à inférer des circonstances de ce processus qu'il s'engage à payer de manière contraignante alors que la mention figurant sur ce bouton ou cette fonction ne lui permet pas d'identifier de telles conséquences avec une certitude absolue.
Ainsi, il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier si, dans l'affaire au principal, la formule « finaliser la réservation » peut être considérée, en langue allemande, au regard des seuls termes utilisés par cette formule et indépendamment des circonstances entourant le processus de réservation, comme analogue à la mention « commande avec obligation de paiement » visée à l'article 8, paragraphe 2, second alinéa, de la directive 2011/83.
La Cour, guidant la juridiction de renvoi dans sa décision, indique que celle-ci devra notamment vérifier si le terme « réservation » est, en langue allemande, tant dans le langage courant que dans l'esprit du consommateur moyen, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, nécessairement et systématiquement associé à la naissance d'une obligation de paiement. Dans la négative, force serait de constater le caractère ambigu de l'expression « finaliser la réservation », de sorte que cette expression ne pourrait pas être considérée comme étant une formule analogue à la mention « commande avec obligation de paiement ».
I. La nécessité d’informer de façon claire et explicite le consommateur
A. Le professionnel doit, d’une part, fournir à ce consommateur, directement avant la passation de la commande, les informations essentielles relatives au contrat
L’appréciation du point de savoir si, dans un cas concret, la technique de communication impose des contraintes d’espace ou de temps pour la présentation des informations, conformément à l’article 8, § 4, de la directive UE no 2011/83 du Parlement européen et du Conseil, du 25 octobre 2011, relative aux droits des consommateurs doit être effectuée en tenant compte de l’ensemble des caractéristiques techniques de la communication commerciale du professionnel.
À cet égard, il appartient à la juridiction nationale de vérifier si, compte tenu de l’espace et du temps occupé par la communication et de la taille minimale du caractère typographique qui serait appropriée pour un consommateur moyen destinataire de cette communication, toutes les informations visées à l’article 6, § 1, de cette directive pourraient objectivement être présentées dans le cadre de ladite communication.
L’article 6, § 1, sous h), et l’article 8, § 4, de la directive UE no 2011/83 précitée doivent être interprétés en ce sens que, dans le cas où le contrat est conclu selon une technique de communication à distance qui impose des contraintes d’espace ou de temps pour la présentation des informations et lorsque le droit de rétractation existe, le professionnel est tenu de fournir au consommateur, sur la technique en question et avant la conclusion du contrat, l’information portant sur les conditions, le délai et les modalités d’exercice de ce droit.
L’article 6, § 1, sous c), de la directive UE no 2011/83/UE du Parlement européen et du Conseil, du 25 octobre 2011, relative aux droits des consommateurs, doit être interprété en ce sens, d’une part, qu’il s’oppose à une réglementation nationale qui impose au professionnel, avant de conclure avec un consommateur un contrat à distance ou hors établissement, visé à l’article 2, points 7 et 8, de cette directive, de fournir, en toutes circonstances, son numéro de téléphone.
D’autre part, cette disposition n’implique pas une obligation pour le professionnel de mettre en place une ligne téléphonique, ou de télécopieur, ou de créer une nouvelle adresse électronique pour permettre aux consommateurs de le contacter et n’impose de communiquer ce numéro ou celui du télécopieur ou son adresse électronique que dans les cas où ce professionnel dispose déjà de ces moyens de communication avec les consommateurs.
B. Informer explicitement ledit consommateur que, en passant la commande, ce dernier est tenu par une obligation de paiement.
S’agissant de cette dernière obligation, le bouton de commande ou la fonction similaire doit porter une mention facilement lisible et dénuée d’ambiguïté indiquant que le fait de passer la commande oblige le consommateur à payer le professionnel. Et le consommateur n’a pas à inférer des circonstances de ce processus qu’il s’engage à payer de manière contraignante alors que la mention figurant sur ce bouton ou cette fonction ne lui permet pas d’identifier de telles conséquences avec une certitude absolue.
Ainsi, il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier si, dans l’affaire au principal, la formule « finaliser la réservation » peut être considérée, en langue allemande, au regard des seuls termes utilisés par cette formule et indépendamment des circonstances entourant le processus de réservation, comme analogue à la mention « commande avec obligation de paiement » visée à l’article 8, paragraphe 2, second alinéa, de la directive 2011/83.
La Cour, guidant la juridiction de renvoi dans sa décision, indique que celle-ci devra notamment vérifier si le terme « réservation » est, en langue allemande, tant dans le langage courant que dans l’esprit du consommateur moyen, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, nécessairement et systématiquement associé à la naissance d’une obligation de paiement.
Dans la négative, force serait de constater le caractère ambigu de l’expression « finaliser la réservation », de sorte que cette expression ne pourrait pas être considérée comme étant une formule analogue à la mention « commande avec obligation de paiement ».
II. Le professionnel veille à ce que le consommateur, lors de sa commande, reconnaisse explicitement son obligation de paiement
A. Le bouton de commande ou la fonction similaire doit porter une mention facilement lisible et dénuée d’ambiguïté indiquant que le fait de passer la commande oblige le consommateur à payer le professionnel.
Selon l’article L.221-14 du Code de la consommation, pour les contrats conclus par voie électronique, le professionnel rappelle au consommateur, avant qu’il ne passe sa commande, de manière lisible et compréhensible, les informations relatives aux caractéristiques essentielles des biens ou des services qui font l’objet de la commande, à leur prix, à la durée du contrat et, s’il y a lieu, à la durée minimale des obligations de ce dernier au titre du contrat, telles que prévues à l’article L. 221-5.
Le professionnel veille à ce que le consommateur, lors de sa commande, reconnaisse explicitement son obligation de paiement. A cette fin, la fonction utilisée par le consommateur pour valider sa commande comporte la mention claire et lisible : commande avec obligation de paiement ou une formule analogue, dénuée de toute ambiguïté, indiquant que la passation d’une commande oblige à son paiement.
Les sites de commerce en ligne indiquent clairement et lisiblement, au plus tard au début du processus de commande, les moyens de paiement acceptés par le professionnel et les éventuelles restrictions de livraison.
Le Code de la consommation prévoit également des dispositions spéciales pour les contrats conclus par voie électronique : le professionnel est tenu de rappeler au consommateur, avant qu’il ne passe sa commande, de manière lisible et compréhensible, les informations relatives aux caractéristiques essentielles des biens ou des services qui font l’objet de la commande, à leur prix, à la durée du contrat et, s’il y a lieu, à la durée minimale des obligations de ce dernier au titre du contrat, telles que prévues à l’article L. 221-5. Il doit veiller à ce que le consommateur, lors de sa commande, reconnaisse explicitement son obligation de paiement.
À cette fin, la fonction utilisée par le consommateur pour valider sa commande comporte la mention claire et lisible : commande avec obligation de paiement ou une formule analogue, dénuée de toute ambiguïté, indiquant que la passation d’une commande oblige à son paiement.
Enfin, les sites de commerce en ligne indiquent clairement et lisiblement, au plus tard au début du processus de commande, les moyens de paiement acceptés par le professionnel et les éventuelles restrictions de livraison. La charge de la preuve du respect des obligations d’information prévues par l’article L. 221-5 pèse sur le professionnel (C. consom., art. L. 221-7).
La violation des dispositions de l’article L. 221-5 est punie d’une amende administrative dont le montant ne peut excéder 3 000 euros pour une personne physique et 15 000 euros pour une personne morale (C. consom., art. L. 242-10).
B. Fixation d’un délai d’expiration pour finaliser la commande
On pourrait se poser la question de savoir si les plateformes de vente en ligne ne pourraient pas mettre en place une sorte de « délai d’expiration » de la commande lorsque les articles sont réservés et mis dans les paniers de commande. Par exemple, sur le site de vente en ligne « VEEPEE », il arrive souvent que les réservations soient conditionnées par un certain délai au risque de voir la réservation expirer.
Cette situation pourrait en effet permettre d’éviter toutes sortes de conflits entre consommateurs et vendeurs en ligne ou les plateformes.
La mise en place de ce délai d’expiration des réservations ou commandes mises dans les paniers à cet effet permettra pour notre part de faciliter l’achat ou la réservation d’un autre consommateur. C’est le cas lorsque les produits et services proposés sont vendus en quantité limitée. Évidemment que cela reste une question !
Sources :
https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000024831453