Les clauses d’agrément s’entendent de clauses statutaires permettant aux associés d’agréer a priori une vente d’action. L’article L228-23 du code de commerce prévoit cette possibilité pour les sociétés par actions et dispose que « dans une société dont les actions ne sont pas admises aux négociations sur un marché réglementé, la cession d'actions ou de valeurs mobilières donnant accès au capital, à quelque titre que ce soit, peut être soumise à l'agrément de la société par une clause des statuts ».
Les clauses d’incessibilité, appelées dans le code de commerce clauses d’inaliénabilité ou dans la doctrine clause de standstill agreement, interdisent, sous certaines conditions, la vente d’actions ou de parts sociales d’une société. Elles sont habituellement possibles pour la société par actions simplifiée (SAS) en application de l’article L227-13 du code de commerce : « les statuts de la société peuvent prévoir l'inaliénabilité des actions pour une durée n'excédant pas dix ans ». Traditionnellement, elles pouvaient être insérées dans des actes extrastatutaires, ce que la loi a consacré à cet article. En revanche, rien n’est dit relativement à cette possibilité pour les autres sociétés commerciales et une première question se pose sur la validité d’une telle clause dans le cadre d’une autre société.
Le problème essentiel repose précisément sur la distinction entre le caractère statutaire ou extrastatutaire des deux types de clauses et sur les conséquences qu’elle peut emporter et il convient de déterminer dans quels cas ces clauses sont envisageables ou non.
I - Une organisation classique préservée
A - Les clauses d’agrément statutaires dans la SA
C’est l’article L228-23 qui la prévoit en disposant que : « dans une société dont les actions ne sont pas admises aux négociations sur un marché réglementé, la cession d'actions ou de valeurs mobilières donnant accès au capital, à quelque titre que ce soit, peut être soumise à l'agrément de la société par une clause des statuts ». L’article en limite la possibilité aux sociétés dont les actions ne circulent pas sur un marché réglementé et il impose également d’autres restrictions.
En pratique, le cédant doit notifier çà la société un certain nombre d’informations relatives au cessionnaire et au actions cédées prévues à l’article L228-24 du code de commerce. En cas de refus de la part de la société, celle-ci peut trouver un accord amiable ou faire acquérir dans un délai de 3 mois les actions à un prix fixé par expertise.
Le recours à la clause d’agrément dans le cadre d’une SAS est également possible mais les dispositions légales qui y sont plus libérales. Le refus de la société entraine là aussi le rachat des parts mais dont les conditions peuvent être déterminées statutairement, ce qu’il est conseillé d’ailleurs de faire.
B - Les clauses d’incessibilité statutaires dans la SAS
L’article L227-13 du code de commerce relatif aux SAS dispose que : « les statuts de la société peuvent prévoir l'inaliénabilité des actions pour une durée n'excédant pas dix ans ».
Il s’agit d’une faculté réservée aux associés lors de la rédaction des statuts : il n’est pas question d’une obligation et elle ne nécessite aucune justification. La liberté contractuelle étant la règle à la base de la création d’une SAS, la clause d’incessibilité doit être vue comme un outil à la disposition des signataires du contrat de société.
Visant à protéger l’actionnariat de la société, la clause d’inaliénabilité permet donc d’interdire purement et simplement la cession des parts de la société. Elle est limitée dans le temps afin de ne pas conduire à un blocage préjudiciable au sein de la société car elle s’en trouve fermée pour la toute la durée de l’incessibilité. Ajoutant à cela la possibilité d’une clause d’agrément, la SAS peut devenir une forme de société très fermées et protectrice de ses actionnaires, ce qui constitue un avantage certain mais pose également des problèmes.
Par ailleurs, rien ne s’oppose non plus à ce que la clause d’incessibilité soit prévue dans un acte extrastatutaire, alors même que les statuts ne la prévoient pas. En pareil cas, il semblerait que des conditions similaires soient à observer, bien qu’une fois de plus la liberté contractuelle entre en jeu.
II - L’apport de la jurisprudence à la distinction entre les clauses
A - Une nouvelle distinction fondée sur le caractère statutaire ou extrastatutaire
Les clauses d’incessibilité dans les SA semblaient jusqu’à récemment inenvisageables pour la majorité des auteurs. Il en va toujours de même pour les sociétés cotées pour lesquelles une telle clause n’est pas viable statutairement puisqu’elle irait à l’inverse du fonctionnement d’une société cotée. En revanche pour les autres, la Cour de cassation par son arrêt du 31 octobre 2007 semble ouvrir cette possibilité, à condition d’avoir une lecture libérale de l’arrêt. Elle énonce à cette occasion que n’importe quel acte à titre onéreux peut contenir une clause d’incessibilité à condition qu’elle poursuive un intérêt sérieux et légitime. En considérant que le contrat de société entre dans cette qualification, il est alors envisageable d’admettre le caractère statutaire de la clause d’incessibilité pour d’autres types de sociétés que la SAS.
Si une lecture extensive de l’arrêt de 2007 est admise, ce que fait une partie de la doctrine, alors la distinction entre les deux types de clauses reposerait davantage sur leur caractère statutaire ou non puisqu’elles sont toujours concevables dans les actes extrastatutaires. Le caractère statutaire ou extrastatutaire des clauses s’articulerait autour de la liberté contractuelle régissant aussi bien le contrat de société et statuts que le pacte d’actionnaire.
B - Le niveau de protection comme critère déterminant dans le choix du type de clause
La distinction qui s’opère en pareil cas entre le caractère statutaire et extrastatutaire résulte aussi d’une différence dans le niveau de protection qu’apportent les deux types d’actes qui en découlent. Un pacte d’associés comportant des clauses d’incessibilité ou d’agrément, ou les deux, leur confèrera moins de force que si elles sont statutairement prévues. A l’inverse, la codification opérée par la loi du 3 janvier 1994 était précisément animée par la volonté de codifier des pratiques extrastatutaires afin de les rendre plus efficientes.
Le fait que le recours à ces clauses soit prévu par la loi les rend d’autant plus opposable aux tiers, ce qui est tout à fait l’inverse dans un pacte d’associés. Au contraire, le pacte d’associé présente l’intérêt d’une absence de publicité ce qui compense son inopposabilité aux tiers.
De même, la sanction du non respect des clauses statutaires est plus protectrice envers les actionnaires. L’article 227-15 du code de commerce prévoit par exemple dans le cadre de la SAS la nullité d’une cession intervenu en contradiction avec les statuts : «toute cession effectuée en violation des clauses statutaires est nulle ».