Le brevet est une des branches de la propriété intellectuelle qui protège une innovation technique et garantit à son titulaire un monopole d’exploitation pour une durée maximale de 20 ans. Il confère ainsi à son titulaire ou à ses ayant cause un droit exclusif d’exploitation[1].
S’agissant de la contrefaçon, celle-ci est définie comme l’atteinte portée aux droits du breveté. L’article L. 615-1 du Code propriété intellectuelle (CPI) énonce en effet que : « Toute atteinte portée aux droits du propriétaire du brevet, tels qu'ils sont définis aux articles L. 613-3 à L. 613-6, constitue une contrefaçon ». Dès lors, il y a en principe contrefaçon du brevet lorsqu’un tiers, qui n’a pas le consentement du titulaire du brevet, exploite de façon directe ou indirecte l’invention telle que définie par au moins une des revendications du brevet.
Enfin, il ne peut exister de contrefaçon en France que s’il existe un brevet français ou européen (désignant la France) et que les actes constitutifs de contrefaçon ont été réalisés en France, le brevet étant en vigueur. En effet, la contrefaçon de brevet est jugée conformément au droit de l’état dans lequel le brevet produit ses effets et où une contrefaçon a été commise. Mais le breveté peut-il efficacement se défendre contre la contrefaçon ? Oui, grâce à l’action en contrefaçon de brevet (1), qui regorge d’ailleurs de quelques subtilités (2).
L’action en contrefaçon de brevet
La contrefaçon de brevet est jugée en France par le Tribunal de grande instance qui décide simultanément de la validité des brevets. L’action en contrefaçon engage la responsabilité civile de son auteur et permet au breveté d’obtenir la sanction des actes d’exploitation non autorisés par lui. Ainsi, lorsqu’il existe des indices graves de contrefaçon, le Président du tribunal peut, à la requête d'une personne admise à agir en contrefaçon, ordonner en référé au présumé contrefacteur de cesser provisoirement l'activité considérée comme illicite. Si l'action en contrefaçon est reconnue comme fondée, le tribunal condamne le contrefacteur :
- à la cessation définitive de la contrefaçon ; et
- au paiement de dommages-intérêts en réparation du préjudice causé au demandeur.
L'ordre de cessation peut être assorti d'une astreinte. Le tribunal peut également autoriser la publication du jugement ou d'un extrait de celui-ci dans un ou plusieurs journaux, aux frais du contrefacteur. Sur demande de la partie lésée et pour autant que la mesure s'avère nécessaire, le tribunal peut en outre ordonner la confiscation, respectivement la destruction des objets reconnus contrefaits et des instruments, dispositifs ou moyens spécialement destinés à la réalisation de la contrefaçon. La législation actuelle en vigueur sur les brevets ne prévoit cependant pas de sanctions pénales de la contrefaçon.
Enfin, bien qu’assez rare, on notera que la contrefaçon peut également être sanctionnée par une action au pénal.
Les subtilités de l’action en contrefaçon de brevet
L’action en contrefaçon regorge de quelques subtilités. D’abord, la saisie-contrefaçon. C’est une opération délicate réalisée par un huissier dont le but est d’apporter la preuve de la contrefaçon présumée par une description détaillée des produits ou procédés litigieux, avec éventuellement une saisie réelle. La Cour de Cassation, dans un arrêt du 1er juillet 2003, a rappelé que les procédures de saisie-contrefaçon en matière de brevet, qui opèrent une saisie réelle, doivent impérativement être suivies d’une action au fond engagée dans les 15 jours à peine de nullité[2].
En conséquence, ni le constat, ni le rapport de l’expert réalisés lors de la saisie réelle ne peuvent être utilisés pour établir la contrefaçon, seule la saisie descriptive subsiste[3].
Par ailleurs, il est fréquent en matière de contrefaçon de brevet, que le présumé contrefacteur invoque sa bonne foi pour échapper à une condamnation financière, d'autant plus lorsque son activité est simplement du négoce. Cette croyance est malheureusement, erronée, comme l'illustre un jugement du 27 novembre 2009 rendu par le Tribunal de grande instance de Paris[4] : « attendu que cette description suffit à démontrer que les boîtiers de connexion reproduisent [les revendications du brevet] et en constituent la contrefaçon, la bonne foi invoquée par la société Leroy Merlin France, à la supposer établie, étant inopérante en la matière. »
Le constat qu’il convient de faire de cette décision c’est que la bonne foi est donc inopérante en matière de contrefaçon de brevet.
[1] Art. L. 611-1 CPI.
[2] Art. L. 615-5 du CPI.
[3] Cour d’Appel de Paris 8 octobre 1997.
[4] TGI Paris, 3ème ch., 2ème sect., 27 novembre 2009, Moulages Plastiques du Midi c. Leroy Merlin France, n°07/08388.