Les termes « exécuteur testamentaire » peuvent paraître trompeurs, car on pourrait déduire à leur simple lecture que l’exécuteur est celui qui exécutera le testament. Or, la réalité est bien différente, car l’exécuteur testamentaire est avant tout chargé de surveiller l’exécution des dispositions testamentaires par ceux à qui elle incombe, c’est-à-dire les héritiers.
Toutefois, dans certains cas, son rôle ne se limitera pas à un simple contrôle et il participera activement au règlement de la succession.
L’exécuteur testamentaire peut donc être défini comme la personne nommée par le testateur, chargée par lui de surveiller l’exécution de ses dernières volontés. Il peut être amené à participer lui-même à cette exécution du testament.
En effet, s’agissant des dispositions de dernières volontés, par hypothèse, l’auteur de ces obligations n’est plus là lorsqu’il s’agit de les exécuter. Le risque d’inexécution est donc accru. Il l’est certes pour les dispositions patrimoniales, mais il l’est plus encore pour les dispositions extrapatrimoniales puisqu’en dehors de la mémoire du défunt, elles ne profitent à personne.
Aussi, depuis très longtemps, les systèmes juridiques, conscients du risque que ces dernières volontés demeurent lettre morte, offrent aux sujets de droit la possibilité de confier à un tiers la mission de surveiller l’exécution du testament, voire de l’exécuter lui-même.
La réforme du 23 juin 2006 (L. n° 2006-728, 23 juin 2006 : JO 24 juin 2006), entrée en vigueur le 1er janvier 2007, a repris bon nombre des propositions de l’offre de loi faite par les éminents jurisconsultes, consacrant les solutions jurisprudentielles (sur la réforme de l’exécuteur testamentaire : A. Chamoulaud-Trapiers, les exécuteurs testamentaires : D. 2006, p. 2577. – F. Letellier, La réforme de l’exécution testamentaire : Dr. famille 2006, étude 47. – S. Mazeaud-Leveneur, L’exécuteur testamentaire : Dr. et patrimoine sept. 2007, n° 162, p. 58). Cette réforme a également réglé plus ou moins heureusement quelques détails techniques, non sans importance, relatifs à la nature de la mission de ce personnage.
Depuis, l’exécution testamentaire semble poursuivre sa léthargie, n’ayant qu’un succès limité et devant en plus subir la concurrence du mandat à effet posthume… La question se pose de sa place inconfortable dans le règlement des successions, notamment par les difficultés à en préciser la nature dans un système de continuation de la personne.
En outre, en fin de mission l’exécuteur testamentaire, titulaire de pouvoirs sur les biens d’autrui, doit rendre des comptes aux héritiers. La mission de l’exécuteur testamentaire est en principe gratuit, toutefois il peut arriver que le testateur ait prévu une disposition en sa faveur laquelle peut recevoir plusieurs qualifications. La responsabilité de l’exécuteur testamentaire, comme celle d’un mandataire, est appréciée avec plus ou moins de rigueur selon qu’elle a fait l’objet ou non d’une rémunération.
I) Une personne désignée par le testateur
A) La nomination de l’exécuteur testamentaire
Tout comme les anciens textes du Code civil, la réforme adoptée en 2006 est muette quant aux conditions de forme que doit remplir la désignation par le de cujus de son exécuteur testamentaire. Sans doute, tant en 1804 qu’en 2006, il semblait évident que cette nomination, en tant que disposition de dernière volonté, devait prendre les formes habituelles en la matière.
Quoi de plus naturel que de désigner un exécuteur testamentaire dans le testament qu’il sera chargé d’exécuter ! Les règles solennelles du testament s’appliquent à la nomination de l’exécuteur testamentaire. Cette nomination pourra prendre la forme d’un testament olographe, mystique, authentique ou international. Nommé par le testateur, l’exécuteur testamentaire a le choix d’accepter ou non sa mission (Code civil, article 1025).
Les droits et les obligations qui sont les siens paraissent de nature strictement personnelle puisque son décès interdirait que ces propres héritiers poursuivent son action. Sa fonction est directement liée à la validité et à l’efficacité du testament qui le nomme. Il paraît logique, à cet égard, qu’il soit en charge de soutenir les arguments de l’efficacité du titre dont il tient son pouvoir (Code civil, article 1028 et 1029).
Pour être valable, la nomination d’un exécuteur testamentaire n’est pas assujettie à l’emploi de termes obligatoires.
Si l’utilisation des termes « exécuteur testamentaire » lève le doute sur la qualité de la personne désignée, l’attribution de cette mission peut aussi résulter d’une périphrase par laquelle le testateur confie à une personne tout simplement la charge de surveiller, d’exécuter le testament ou d’accomplir telle ou telle tâche (la qualité d’exécuteur testamentaire a pu être retenue pour une personne chargée de distribuer aux « pauvres » tout ou partie de l’actif successoral.
B) Mission de l’exécuteur testamentaire
Soutien et interprétation du testament – L’exécuteur testamentaire, en cas de litige sur la validité du testament, doit intervenir au procès. Ou bien il est mis directement en cause par les parties, ou bien, de lui-même, il intervient à la procédure. Cette participation à la procédure est une obligation pour lui et, s’il n’intervient pas, sa responsabilité pourrait être engagée.
Son rôle est de permettre, en tant « qu’homme de confiance du défunt », d’éclairer le juge dans la résolution du litige qui peut porter sur la validité du testament (respect des conditions de forme ou de fond) ou sur son interprétation.
C’est surtout dans le domaine des successions sans héritier réservataire que ses pouvoirs se trouvent sensiblement augmentés. En effet, l’article 1030-1 du Code civil, donne à l’exécuteur testamentaire la faculté de vendre tout ou partie des immeubles de la succession. Il pourra placer les capitaux, payer les dettes et charges de la succession.
Les héritiers auront néanmoins dû être préalablement avertis. On suppose que cet avertissement est indépendant de leur option successorale quand la vente intervient à cette période. Mais il faut conclure du caractère général du texte que cette faculté de vente pourrait intervenir après acceptation par les héritiers et ne relèverait que de la magistrature de l’exécuteur testamentaire. Voilà bien un pouvoir très étendu par rapport à la législation antérieure.
Poursuite de l’exécution du testament – L’article 1028 du Code civil prévoit que l’exécuteur est mis en cause en cas de contestation sur l’exécution du testament (Code civil article 1028, al. 1er) et que, dans tous les cas, il doit intervenir pour exiger l’exécution des dispositions litigieuses. Le droit pour l’exécuteur testamentaire d’agir en justice est un des pouvoirs essentiels de l’exécuteur testamentaire, sinon il serait réduit à être un défenseur sans aucune arme.
II) Défense des dernières volontés et surveillance de leur exécution
A) Fonctions premières de l’exécuteur testamentaire
L’exécuteur testamentaire, en cas de litige sur la validité du testament, doit intervenir au procès. Ou bien il est mis directement en cause par les parties, ou bien, de lui-même, il intervient à la procédure. Cette participation à la procédure est une obligation pour lui et, s’il n’intervient pas, sa responsabilité pourrait être engagée. Son rôle est de permettre, en tant « qu’homme de confiance du défunt », d’éclairer le juge dans la résolution du litige qui peut porter sur la validité du testament (respect des conditions de forme ou de fond) ou sur son interprétation.
L’exécuteur est mis en cause en cas de contestation sur l’exécution du testament (Code civil, article 1028, al. 1er) et que, dans tous les cas, il doit intervenir pour exiger l’exécution des dispositions litigieuses. Le droit pour l’exécuteur testamentaire d’agir en justice est un des pouvoirs essentiels de l’exécuteur testamentaire, sinon il serait réduit à être un défenseur sans aucune arme.
On pouvait regretter que le Code civil n’ait pas prévu ce pouvoir de prendre l’initiative procédurale contre des héritiers récalcitrants et de les contraindre à l’exécution du testament. Même si quelques auteurs considéraient ce pouvoir comme inhérent à la mission.
Si les textes actuels emploient le terme d’intervention, il ne faudrait pas pour autant se cantonner à un sens procédural et l’exécuteur testamentaire peut parfaitement prendre l’initiative en lançant lui-même l’action en justice. Son rôle primaire est bien de contraindre par la voie judiciaire l’héritier récalcitrant à l’exécution du testament.
Pour ce qui est du droit d’auteur dans sa dimension morale – La mission de l’exécuteur testamentaire en matière de propriété littéraire et artistique va se concentrer sur les composantes morales du droit d’auteur et non pas sur ses prérogatives pécuniaires. Là aussi, la mission de l’exécuteur testamentaire peut faire l’objet d’une gradation : avec une mission minimale qui concernera les œuvres posthumes et une mission étendue qui portera sur la surveillance du respect de l’ensemble de l’œuvre.
B) Moyens à disposition de l’exécuteur testamentaire
L’ancien article 1031 du Code civil imposait à l’exécuteur testamentaire de prendre différentes mesures conservatoires : apposition des scellés en présence d’héritiers mineurs ou établissement d’un inventaire, mais sans lui conférer de mission générale de conservation.
La réforme de 2006 a opéré un double changement en affirmant de manière générale le caractère conservatoire de la mission de l’exécuteur, tout en supprimant le caractère obligatoire de certaines mesures conservatoires laissant ainsi à l’exécuteur l’appréciation de l’utilité de la mesure à prendre. Cette mission conservatoire de l’exécuteur testamentaire est rappelée à l’article 1305 du Code de procédure civile.
L’exécuteur testamentaire doit prendre toute mesure conservatoire utile à la bonne exécution du testament. Ces mesures peuvent être des actes conservatoires au sens juridique, comme des sûretés, des mesures d’exécution, des actes suspensifs de prescription, l’apposition des scellés (CPC, art. 1307), et l’inventaire (CPC, art. 1328), etc.
Elles peuvent également consister en des actes matériels comme la mise en garde meuble du mobilier successoral, location d’un coffre-fort pour y entreposer les objets de valeur, la mise en dépôt ou sous séquestre de certains biens, souscription d’une police d’assurance de biens ou la déclaration de sinistre auprès de la compagnie d’assurance.
Il peut même agir en référé pour solliciter une mesure urgente comme l’interdiction de divulguer des œuvres posthumes. L’exécuteur testamentaire a aussi pleine qualité pour prendre les inscriptions d’hypothèque conférée aux légataires par les articles 1017 et 2400, 4° du Code civil, ou renouveler des inscriptions garantissant les créances successorales.
Les articles 1031 et 1032 du Code civil énoncent que la mission de l’exécuteur testamentaire prend fin à l’expiration d’un délai de deux ans à compter de l’ouverture du testament. La règle est nouvelle, les anciens textes prévoyaient bien une durée, mais seulement pour les pouvoirs résultant de sa saisine (une année à compter du décès).
Désormais, ce sont la plupart de ses pouvoirs qui sont enfermés dans cette durée biennale. Ce délai court, non pas à compter du décès, mais à partir du jour où l’acte de dépôt du testament ou de son enregistrement. C’est-à-dire à partir du jour où héritiers et exécuteurs ont véritablement connaissance du testament.
III) Responsabilité de l’exécuteur testamentaire
A) Responsabilité civile de l’exécuteur testamentaire
À l’image du mandataire, l’exécuteur testamentaire s’engage personnellement dans sa mission et, en cas de faute préjudiciable aux héritiers, aux légataires voire aux créanciers successoraux, il devra en répondre et, éventuellement, verser à ses victimes des dommages et intérêts. Cette responsabilité sera appréciée avec plus de souplesse si la mission est gratuite que si elle est rémunérée (Code civil, article 1992, al. 2 auquel renvoie Code civil, article 1034).
Dans la plupart des cas, cette mise en cause de l’exécuteur interviendra en fin de mission après examen de sa reddition de comptes. Conformément aux principes directeurs du droit de la responsabilité, cette mise en cause de l’exécuteur nécessite l’existence d’une faute, d’un préjudice et d’un lien de causalité entre les deux.
B) Responsabilité pénale de l’exécuteur testamentaire
L’exécuteur testamentaire indélicat qui s’approprierait des biens qu’il détient en vertu de ses pouvoirs encourt les sanctions de l’abus de confiance (Code pénal, article 314-1, la peine est de trois ans d’emprisonnement et de 375 000 € d’amende) et, éventuellement, du vol pour les autres biens (Code pénal article 311, la peine est de trois ans d’emprisonnement et 45 000 € d’amende). Ces sanctions peuvent être complétées par des sanctions professionnelles et disciplinaires si l’exécuteur testamentaire exerce une profession soumise à une déontologie propre.
SOURCES :