I- Les obligations de prévention et d’information dans l’entreprise
A- L’obligation de prévention de l’employeur
L’employeur est tenu par la loi de prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale de ses salariés (article L. 4121-1 du Code du travail).
L’employeur ne doit pas seulement diminuer le risque, mais l’empêcher. Cette obligation est une obligation de résultat (Cour de cassation, chambre sociale, 22 février 2002, pourvoi n° 99-18389), c’est-à-dire qu’en cas d’accident ou de maladie liée aux conditions de travail, la responsabilité civile et pénale de l’employeur pourra être engagée.
A ce titre, l’employeur doit procéder à une évaluation du risque professionnel afin de réduire au maximum les risques de contagion sur le lieu de travail ou à l’occasion du travail (article R.4121-2 du Code du travail).
Les mesures qui doivent être prises s’organisent autour de trois axes :
- Les actions de prévention des risques professionnels et de la pénibilité : adaptation des postes de travail, évaluation des risques, etc.;
- Les actions d’information et de formation : présence de panneaux sur les lieux dangereux, inscription des salariés à des formations sur la sécurité au travail, etc. ;
- La mise en place d’une organisation et de moyens adaptés : installation de machines adaptées, retrait des produits dangereux, etc.
La nouvelle évaluation des risques doit être retranscrite dans le document unique d’évaluation des risques et actualisée pour tenir compte des changements de circonstances. Les mesures de prévention qui en découlent doivent être portées à la connaissance des salariés selon des modalités adaptées afin de permettre leur pleine application.
Dans le cadre de l’épidémie de Coronavirus, l’employeur doit ainsi, quelle que soit la situation de l’entreprise :
- Informer les salariés sur les mesures de prévention à respecter conformément aux recommandations officielles ;
- Mettre à disposition des salariés les moyens nécessaires pour éviter la propagation du virus : savon, solution hydroalcoolique, fourniture de masques de protection ;
- Mettre en place de mesures de distanciation sociale ;
Les mesures individuelles et organisationnelles d’hygiène en situation de pandémie ne doivent pas être considérées comme de simples recommandations, mais bien comme des exigences et des consignes que les salariés ont l’obligation d’appliquer au même titre que les autres règles de sécurité édictées par l’employeur.
Par conséquent, le fait de ne pas respecter les consignes d’hygiène peut être considéré comme une faute disciplinaire, car cela peut mettre en danger la vie des autres salariés (C. trav., art. L. 4122-1).
L’information des salariés sur les mesures prises par la hiérarchie, le service de santé au travail et le CSE doit être précise et pertinente (campagne d’affichage, distribution de consignes écrites par tracts et/ou emails, etc.).
La première mesure à prendre est de renseigner le document unique d’évaluation des risques pour y intégrer les éléments liés à une situation de crise sanitaire majeure. Il faut notamment y prévoir une procédure rapide et efficace pour les salariés infectés ou revenant d’une zone à risque.
B- L’obligation d’information du salarié
Conformément à l’article L. 4122-1 du Code du travail, le salarié est également responsable de sa santé et de sa sécurité ainsi que de celles de ses collègues.
Par conséquent, un salarié revenant d’une zone à risque ou ayant côtoyé une personne susceptible de transmettre le virus, et qui n’en informe pas son employeur commet une faute et pourrait être sanctionné à ce titre. Il en va de même pour un salarié qui ne respecterait pas les mesures d’aménagement du poste de travail ou de confinement mises en place.
Ainsi, si le salarié n’informe pas volontairement son employeur d’une raison possible d’envisager qu’il soit contaminant, ce comportement pourrait être sanctionné, selon la gravité, d’un licenciement pouvant aller jusqu’à la faute grave.
La Cour de cassation a déjà eu à rappeler, pour un salarié malade qui avait mis en danger ses collègues en renversant des palettes sur un chantier après avoir refusé d’être placé en arrêt maladie. (Soc. 12 oct. 2017, n° 16-18.836).
II- L’adaptation de l’activité des salariés en cas de poursuite de l’activité de l’entreprise
L’employeur doit aménager le poste de travail afin de limiter les risques de propagation du Covid-19. Depuis l’ordonnance du 26 mars 2020, l’employeur peut mobiliser une partie des congés et/ ou repos de ses salariés.
Sous réserve de la signature préalable d’un accord d’entreprise, d’établissement ou de branche, l’employeur pourra imposer jusqu’à 6 jours de congés payés à ses salariés en respectant un délai de prévenance d’un jour franc au moins ;
L’employeur peut sans attendre, et ce avant le 31 décembre 2020 imposer unilatéralement jusqu’à 10 jours de congés en respectant un délai de prévenance d’un jour franc au moins. (Repos, RTT, jours portés sur un compte épargne temps, à l’exception des congés pour événements familiaux)
Par ailleurs, dans les entreprises relevant de secteurs d’activités particulièrement nécessaires à la sécurité de la Nation et à la continuité de la vie économique et sociale, les modalités de travail seront déterminées par décret.
A- Cas dans lequel le télétravail est possible pour le salarié
L’employeur doit demander au salarié, dont le poste le permet et qui dispose du matériel nécessaire pour le faire, de recourir a l’utilisation du télétravail.
Conformément à l’article L. 1222-11 du Code du travail « en cas de circonstances exceptionnelles, notamment de menace d’épidémie, la mise en œuvre du télétravail peut être considérée comme un aménagement du poste de travail rendu nécessaire pour permettre la continuité de l’activité de l’entreprise et garantir la protection du salarié ».
Ainsi, l’aménagement du poste peut être imposé par l’employeur. Celui-ci peut exiger du salarié de télétravailler jusqu’à la fin de la période d’incubation (soit 14 jours) afin d’éviter le risque de propagation du coronavirus au sein de l’entreprise.
B- Cas dans lequel Le télétravail n’est pas possible pour le salarié
Si le salarié est au contact d’autres salariés ou du public, deux situations doivent être distinguées.
Lorsque les contacts sont brefs, les mesures barrières permettent de préserver la santé des salariés et celle de leur entourage.
Lorsque les contacts sont prolongés et proches, l’employeur devra compléter les mesures barrières.
Dans ces conditions, la seule circonstance que le salarié soit affecté à l’accueil du public pour des contacts proches ou prolongés ne suffit pas, sous réserve de l’appréciation souveraine des tribunaux, à considérer qu’il justifie d’un motif raisonnable pour exercer son droit de retrait.
Il incombe au salarié de suivre les instructions qui lui sont données par l’employeur en matière de prévention, à défaut sa responsabilité pourrait être engagée.
En cas de contamination d’un salarié, l’employeur devra prendre des mesures particulières telles que l’équipement des personnes en charge du nettoyage des sols et surfaces avec port d’une blouse à usage unique et de gants de ménage, etc.
Si les mesures sont mises correctement en œuvre par l’employeur, la seule circonstance qu’un salarié a été contaminé ne suffit pas à considérer qu’il justifie d’un motif raisonnable pour exercer son droit de retrait, sous réserve de l’appréciation souveraine des tribunaux.
Lorsque le salarié est confiné à titre individuel pour cause de maladie, ce dernier est placé en confinement pendant une durée maximale de 20 jours par décision d’un médecin de l’Agence régionale de santé. Le salarié bénéficie alors d’une indemnité journalière de sécurité sociale d’un montant de 50 % de son salaire journalier de base, sans que ne lui soit appliqué un délai de carence.
Si un accord d’entreprise ou de branche le prévoit, l’entreprise doit compléter cette indemnisation à hauteur du salaire. En tout état de cause, le contrat de travail du salarié est suspendu et l’employeur ne peut pas le solliciter.
L’organisation diffère lorsque le salarié est tenu de garder à leur domicile un enfant de moins de 16 ans. Il doit alors contacter son employeur pour l’informer de sa situation dans les plus brefs délais.
Soit sera mis en place le télétravail, soit le recours à l’arrêt maladie sera automatique et de plein droit. L’employeur devra faire la démarche auprès de l’Assurance maladie via le service dédié https://declare.ameli.fr/.
L’arrêt de travail est indemnisé, sans délai de carence, et valable le temps que durera la fermeture de la structure d’accueil de l’enfant. L’employeur ne peut pas refuser cet arrêt.
Enfin, si le salarié présente un risque de développer une forme sévère de la maladie, l’Assurance Maladie a décidé d’étendre, à compter du 18 mars 2020 avec effet rétroactif au 13 mars, le droit à un arrêt de travail via son télé service de déclaration en ligne aux personnes dont l’état de santé conduit à les considérer comme présentant un risque de développer une forme sévère de la maladie et devant de ce fait impérativement rester à leur domicile sans possibilité de télétravail.
L’arrêt de travail sera pour une durée initiale de 21 jours. L’arrêt sera éventuellement renouvelable en fonction de l’évolution des recommandations des autorités sanitaires.
L’arrêt de travail sera délivré sur cette base, une fois effectuées les vérifications nécessaires par le service médical de l’Assurance Maladie à savoir que l’assuré bénéficie bien d’une prise en charge au titre d’une affection de longue durée.
SOURCES :
https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000041755644&categorieLien=id
https://www.gouvernement.fr/info-coronavirus
https://www.legifrance.gouv.fr/eli/decret/2020/1/31/SSAS2002571D/jo/texte
https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?idTexte=JURITEXT000007046006
https://solidarites-sante.gouv.fr/IMG/pdf/new_hcsp-sars-cov-2_patients_fragiles_v3.pdf