PARASITISME ET CONTREFACON ?

Publié le Modifié le 20/02/2020 Vu 7 045 fois 0
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La notoriété d’une entreprise représente une valeur économique, un actif qui est le résultat, d’efforts et d’investissements tant financiers qu’intellectuels .

La notoriété d’une entreprise représente une valeur économique, un actif qui est le résultat, d’effor

PARASITISME ET CONTREFACON ?

La tentation est grande, pour certains acteurs économiques, de venir capter cette valeur, y compris lorsqu’elle a été développée par une entreprise non concurrente, ou intervenant dans un secteur d’activité différent.

Bien que la jurisprudence n’opère pas systématiquement cette distinction, il s’agit en réalité, le plus souvent, d’agissements parasitaires, c’est-à-dire d’actes de parasitisme constatés (ou commis) entre non-concurrents. Certains auteurs considèrent que ces agissements parasitaires constituent « le véritable parasitisme », car ils ne se confondent pas avec la concurrence déloyale.

Il arrive également qu’un commerçant cherche à s’approprier indûment la réputation d’un concurrent, bien que leurs activités ne soient pas identiques. Ce commerçant agit comme un parasite, car il s’insère dans le sillage d’une autre entreprise afin de tirer profit de sa réputation, le cas échéant, de sa publicité ou des avancées techniques.

Lorsque la confusion entre les entreprises paraît établie, la jurisprudence admet que le commerçant victime du parasitisme peut demander réparation pour atteinte à sa réputation ou éventuellement pour affaiblissement du pouvoir attractif de son entreprise. Ainsi, en est-il de la reprise plagiaire du catalogue d’un concurrent (Cour de cassation, chambre commerciale du 30 janvier 2001, n° 99-10.654) ou de la commercialisation de produits semblables à ceux récemment mis sur le marché par un concurrent en s’inspirant manifestement de la gamme et du conditionnement choisit par celui-ci (Cour d’appel de Paris, 4e chambre section A, 23 janvier 2002).

Cependant, le droit de la concurrence repose sur le principe fondamental de la liberté du commerce et de l’industrie de sorte que, sauf circonstances spécifiques, une société est en droit d’offrir à sa clientèle des prestations identiques à celles d’un concurrent (Cour d’Appel Versailles, 12e chambre section 1, 14 septembre 2006, n° 05/05533).

De même, lorsqu’une création n’est protégée par aucun droit de propriété intellectuelle, aucun principe n’interdit à un concurrent de s’en inspirer et de la reproduire dès lors qu’il prend soin d’éviter toute confusion entre les entreprises en concurrence (Cour d’appel de Paris, 1re chambre 18 octobre 2000, n° 1999/16 118).

La Cour de cassation a rappelé que les idées étant de libre parcours, le seul fait de reprendre, en le déclinant, un concept mis en œuvre par un concurrent ne constitue pas un acte de parasitisme.

En outre, l’impossibilité de condamner pour contrefaçon en l’absence de similitude de forme n’empêche pas de sanctionner le parasitisme consistant à s’approprier le travail d’autrui en faisant ainsi l’économie de recherches antérieures.

Quelles différences entre les actes de parasitisme et de contrefaçon ? Quelles en sont les sanctions qui s’y rattachent à chacune d’elles ?

 

I) Le parasitisme concurrentiel

A) L’action en parasitisme

Puisque l’action en concurrence déloyale ou en parasitisme est rattachée par la jurisprudence au droit commun de la responsabilité, ses trois éléments constitutifs, c’est-à-dire la faute, le préjudice et le lien de causalité, doivent être réunis.

 « L’exercice de l’action pour parasitisme ou concurrence parasitaire n’est pas subordonné à une absence de situation de concurrence entre les parties » affirme la Cour de cassation. Nul n’en doutait vraiment tant il est vrai que l’on a pris l’habitude, depuis le développement de la théorie du parasitisme, de reconnaître, à côté des agissements parasitaires extraconcurrentiels, l’existence d’une concurrence parasitaire. Ce parasitisme concurrentiel consiste à tirer profit de la renommée d’un rival, à capter son savoir-faire, ses efforts publicitaires, ses investissements intellectuels... (par exemple, CA Versailles, 27 janv. 2010, n° 08/08996).

Notons cependant que des îlots de résistance subsistent en jurisprudence et qu’une école continue de distinguer, d’un côté, le parasitisme qui sanctionnerait exclusivement des comportements entre non-concurrents, de l’autre côté, la concurrence déloyale réservée aux rapports entre agents économiques ayant une clientèle commune. C’est ainsi que la cour de Paris a récemment expliqué que la victime de l’imitation d’un logo ne peut « valablement invoquer un comportement parasitaire, la notion de parasitisme ne trouvant pas à s’appliquer en l’espèce dès lors que les sociétés sont en situation de concurrence, opèrent sur le même marché et s’adressent à une clientèle très voisine » (CA Paris, pôle 5, ch. 2, 28 oct. 2011, n° 10/19 178, SARL Davimar c/ SARL Eleven : JurisData n° 2011-024507).

La même juridiction avait jugé dans une autre affaire que puisque le copieur s’était inspiré d’un modèle de vêtement de l’année passée qui n’était plus commercialisé par la victime, elle ne pouvait pas retenir la concurrence déloyale, mais simplement le parasitisme (CA Paris, 30 juin 2009, n° 09/01538, SARL Maje c/ Isabel Marant : JurisData n° 2009-019274).

La chambre commerciale brouille les frontières et s’affranchit de ces classifications traditionnelles puisqu’ici elle admet qu’il peut y avoir parasitisme même dans une situation de concurrence entre les protagonistes et que, par ailleurs, elle a affirmé que l’existence d’une concurrence entre les parties n’est pas une condition de l’action en concurrence déloyale.

Il en résulte une perte d’autonomie et de singularité des agissements parasitaires qui se fondent dans la théorie générale de la concurrence, laquelle se trouve banalisée au sein de la responsabilité civile puisque son intervention n’est plus réservée à une déloyauté entre concurrents, mais qu’elle peut être justifiée par une faute quelconque sur le marché.

 

B)   Les sanctions attraient aux actes de parasitisme

Les différentes sanctions du parasitisme : L’action en justice engagée par la personne ou l’entreprise parasitée, victime des agissements déloyaux du parasite, aura naturellement pour objectif premier d’obtenir la cessation des actes déloyaux, l’allocation de dommages et intérêts à titre de réparation du préjudice subi n’étant bien souvent qu’un « bonus » pour l’entreprise avant tout soucieuse de voir la justice mettre fin à l’exploitation illégitime de sa notoriété ou de ses investissements. Ce terme mis aux agissements déloyaux du parasite sera d’ailleurs parfois symbolisé par la publication de la décision de condamnation ordonnée par le juge.

 

Quid de la contrefaçon ?

 

II) Éléments constitutifs de la contrefaçon

La contrefaçon est caractérisée lorsqu’une personne reproduit, voire utilise, sans l’autorisation de son titulaire, une œuvre protégée, un logiciel, un brevet d’invention, un dessin ou modèle, une marque de fabrique…

En propriété littéraire et artistique, la contrefaçon sera retenue en cas, par exemple, de reproduction d’une photographie dans un livre sans l’autorisation du photographe ou de diffusion d’une chanson via le réseau Internet sans l’accord du compositeur et de l’interprète.

Les exemples d’actes contrefacteurs dans le domaine de la propriété industrielle sont nombreux et variés et concernent parfois des marchés très importants, notamment, dans le secteur du luxe ou du médicament.

 

A) Action en contrefaçon

·       Action au plan civil et au plan pénal

Deux voies sont ouvertes pour lutter contre la contrefaçon. Au plan civil, l’action en contrefaçon permet d’engager la responsabilité civile du contrefacteur. La qualité à agir appartient au titulaire du droit de propriété intellectuelle (voire, dans certains cas, aux sociétés représentatives) qui dispose de trois ans pour porter sa demande devant les tribunaux.

Au plan pénal, la contrefaçon est un délit dont la prescription est de cinq ans (trois ans avant la loi du 11 mars 2014 relative à la consommation). Ici, l’intention coupable est présumée. La simple tentative n’est pas punissable. Les personnes morales peuvent être déclarées coupables de contrefaçon. La loi PACTE du 22 mai 2019 fixe le point de départ de l’action civile « au jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître le dernier fait lui permettant de l’exercer ».

D’une manière générale, les juridictions s’attachent à apprécier les ressemblances entre l’objet de propriété intellectuelle et l’objet contrefaisant.

 

·       Compétence

Dans ce domaine, le contentieux étant très technique, une spécialisation des juridictions a été mise en place. La loi de 2007 a écarté les tribunaux de commerce et conseils de prud’hommes en donnant compétence exclusive aux tribunaux de grande instance (TGI). 10 TGI ont été retenus : Bordeaux, Lille, Lyon, Marseille, Nanterre, Nancy, Paris, Rennes, Strasbourg et Fort-de-France. Le TGI de Paris est exclusivement compétent pour connaître des actions en matière de brevets d’invention, de certificats d’utilité, de certifications complémentaires de protection et de topographies de produits semi-conducteurs. Les litiges peuvent être soumis à l’arbitrage, faculté inscrite dans le code de la propriété intellectuelle depuis la loi n° 2011-525 du 17 mai 2011 de simplification et d’amélioration de la qualité du droit.

Sur la compétence territoriale, le demandeur peut choisir entre le tribunal du lieu où demeure le défendeur, celui du fait dommageable ou celui dans le ressort duquel le dommage a été subi.

 

·       Procédure de saisie-contrefaçon

La saisie-contrefaçon permet d’apporter les éléments de preuve suffisants et/ou de mettre un terme au préjudice subi. Il est donc possible de requérir du président du TGI une ordonnance autorisant à procéder à la description détaillée, avec ou sans saisie réelle, des objets ou instruments considérés comme contrefaisants. La loi du 29 octobre 2007 a modifié sa procédure. Par exemple, le saisissant doit désormais, dans un délai maximal de trente et un jours ouvrables, à peine de nullité de la saisie, agir au fond. Il peut également faire étendre la saisie aux éléments qui ont permis de procéder à la contrefaçon.

 

B) Sanction

En matière de contrefaçon, les peines peuvent être très lourdes : peines d’emprisonnement (en général, la peine prévue est de 3 ans), importantes peines d’amendes (300 000 €). Les peines peuvent augmenter dans certains cas, par exemple quand la contrefaçon a été commise en bande organisée. La loi du 11 mars 2014 relative à la consommation a étendu aux actes de contrefaçon ponctuels de marque la peine maximale encourue par tout contrefacteur dont l’action porte atteinte à la santé ou à la sécurité des personnes. Certaines peines complémentaires peuvent également être prononcées, comme la confiscation de l’objet contrefaisant, la fermeture de l’établissement à l’origine de la contrefaçon, l’affichage du jugement…

La réparation de la contrefaçon est réalisée par l’octroi de dommages et intérêts évalués au vu, notamment, d’éléments tenant au préjudice subi par le titulaire des droits, mais également des gains réalisés par le contrefacteur. Par ailleurs, il a été jugé que les fournisseurs d’accès à internet et de moteurs de recherche devaient prendre à leur charge les mesures de blocage et de déréférencement des sites de streaming ou de téléchargement de contenus contrefaisants.

 

 

 

 

SOURCES :

1)       https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000035004808&fastReqId=333253209&fastPos=1

 

2)       https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000007633225&fastReqId=355592630&fastPos=1

 

3)       https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000035152528&fastReqId=814554011&fastPos=1

 

 

 

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