Aujourd'hui, l’essor et le développement d'Internet en ont fait un outil indispensable et incontournable en matière de communications et d'échanges. Les nouvelles technologies sont ainsi devenues une partie intégrante de notre quotidien, mais aussi de toute la société.
Une webcam fait partie de ses nouveaux outils numériques qui ont considérablement modifié notre façon de communiquer.
En effet, le principe de la webcam est simple, il s'agit d'une caméra miniaturisée conçue comme un périphérique d'ordinateur permettant la création d'une vidéo qui peut être transmise en direct sur internet. Elle est parfois directement intégrée à un ordinateur, notamment dans le cas des ordinateurs portables. L'une des applications les plus courantes a été la « visio-communication », pour des applications telles que « Skype ».
Néanmoins, cet outil a pu être caution à des dérives, et comme d'autres technologies de l'information et de la communication, la webcam représente une menace certaine pour les droits et liberté individuel, notamment s'agissant de l'atteinte à l'intimité de la vie privée, comme en témoigne un récent jugement du tribunal d'Alençon, où l’informaticien après avoir passé trois années à espionner des amis, des collègues et des personnes inconnues, vient d’être condamné à 6 mois de prison avec sursis et 1500 Euros de dommages et intérêts pour « atteinte à l’intimité de la vie privée par fixation de l’image d’une personne ».
La vie privée des personnes est protégée par un ensemble complexe de dispositions. En effet, aussi bien le droit pénal par le jeu des articles 226-1 et 226-2 que le droit civil dans son article 9 de valeur constitutionnelle, protègent la vie privée des personnes contre les intrusions de la vie privée de la personne. Ces dispositions sont applicables en matière de violation de la vie privée par le biais de la webcam. En effet, le code pénal fait état d'un procédé quelconque, permettant une incrimination large des moyens utilisés. Il convient cependant de noter que seul l'article 226-1°2, peut être invoqué concernant les atteintes par le biais des webcams. Quant au code civil, la formulation est assez limpide pour assurer une interprétation large par le juge civil. Ainsi, la protection de la vie privée dans le cadre d'une utilisation illicite d'une webcam peut être opérée soit par le Code pénal (I), soit par le Code civil (II).
I - La protection de l'atteinte à l'intimité de la vie privée par le Code pénal
De par son autonomie avec les règles posées par le code civil, la protection que le code pénal accorde à la vie privée de la personne se distingue nettement de celle fondée sur l'article 9 du code civil. Ainsi, le code pénal incrimine l'atteinte à l'intimité de la vie privée par fixation de l'image (A), mais aussi la conservation de tout enregistrement obtenu illégalement (B)
A - L'atteinte à l'intimité de la vie privée par fixation de l'image
En tant que droit subjectif, l'atteinte à l'intimité de la vie privée bénéficie d'une protection pénale dissuasive. En ce sens, l’article 226-1 du code pénal dispose que « Est puni d'un an emprisonnement et de 45 000 euros d'amende, le fait, au moyen d'un procédé quelconque, volontairement de porter atteinte à l'intimité de la vie privée d'autrui ».
L'article 226-2° précise l'incrimination des comportements d'espionnage visuel, « En fixant, enregistrant ou transmettant, sans le consentement de celle-ci l'image d'une personne se trouvant dans un lieu privé ». L'incrimination est volontairement large est permet la répression de différentes modalités d'atteintes à la vie privée, notamment celle cinématographique ou encore télévisuelle. L'incrimination suppose, par ailleurs, que soit démontrée l'intention de porter atteinte à la vie privée. La captation doit donc être faite à l'insu de la victime, et cet élément est déterminant dans la qualification de l'infraction par le juge. Si l'intention est aisée à établir lorsque la victime s'est opposée de façon indiscutable, à l'inverse, la preuve est plus délicate si la victime à fait preuve d'une certaine complaisance. En pratique, une autorisation écrite permet d'éviter d'avoir à rapporter la preuve d'un fait négatif. En définitive, l’acte de fixation de l’image doit donc consister en un procédé technique, l’atteinte à l’intimité étant généralement déduite des faits.
Enfin, l'atteinte doit avoir eu lieu dans un lieu privé, c'est-à-dire selon les termes de la jurisprudence, dans un endroit qui n'est ouvert à personne sauf autorisation de celui qui l'occupe d'une manière permanente ou temporaire. Cette exigence légale précisée par la jurisprudence fait ressortir un caractère général du lieu privé, les conditions d'accès étant ainsi un critère clef pour déterminer le caractère public ou privé du lieu.
B - L'atteinte à l'intimité de la vie privée par conservation de l'image
L'article 226-2 du code pénal punit des mêmes peines « le fait de conserver, porter ou laisser porter à la connaissance du public ou d'un tiers ou d'utiliser de quelque manière que ce soit tout enregistrement ou document obtenu à l'aide de l'un des actes prévus par l'article 226-1 ».
On remarque d’emblée une dépendance entre les deux infractions. En effet, cette infraction suppose que le délit de fixation illicite de l'image soit préalablement commis, même si elle demeure une infraction autonome dans la mesure où il n'est pas nécessaire que l'auteur de l'infraction prévu à l'article 226-1 soit poursuivi ou condamné pour que l'article 226-2 puisse trouver application.
Une fois la condition préalable remplie, l'article 226-2 réprime la conservation, la divulgation et l'utilisation de l'enregistrement litigieux. La conservation, si elle ne paraît pas de prime abord préjudiciable pour la victime, le législateur évite que l'enregistrement puisse être un instrument de menace. La divulgation ou l'utilisation, à un tiers ou au public est incriminée de façon générale.
Enfin, il convient de souligner que la tentative d'atteinte à l'intimité la vie privée des dispositions de l'article 226-1 et 226-2, est réprimée. Le législateur ayant voulu ici opter pour une logique de prévention. De plus, s'agissant des personnes morales, l'article 226-7 prévoit une peine très sévère, l'amende encourue étant de 225 000 euros.
II - La protection de l'atteinte à la vie privée par le Code civil
Avec la loi du 17 juillet 1970, le législateur a consacré le droit au respect de la vie privée. Le code civil protège l'atteinte à la vie privé au sein de l'article 9 qui dispose en des termes généraux que : « Chacun a droit au respect de sa vie privée ». De plus, l'article 9 alinéa 2 précise que « les juges peuvent, sans préjudice de la réparation du dommage subi, prescrire toutes mesures, telles que séquestre, saisie et autres, propres à empêcher ou faire cesser une atteinte à l'intimité de la vie privée ; ces mesures peuvent, s'il y a urgence être ordonnées en référé ». Ainsi, contrairement au droit pénal, le droit civil offre une voie rapide et efficace pour faire cesser l’atteinte (A). En outre, le droit civil n’est pas freiné par l’étroitesse des textes puisqu’un nombre considérable de situations peuvent être prises en compte lors d’un jugement au fond (B).
A - Les mesures conservatoires et la procédure de référé
La saisine du juge des reìfeìreìs procure aux victimes un avantage indéniable par les mesures provisoires qu’il peut prononcer. Il peut être saisi, au choix, sur deux fondements, l’article 9 alinéa 2 du Code civil et l'article 809 du Code de procédure civile.
Le référé de l’article 809 du Code de procédure civile, Il s’agit en réalité du référé́ de droit commun, selon lequel le Président peut prescrire, même en présence d’une contestation sérieuse, les mesures conservatoires ou de remises en état qui s’imposent pour faire cesser un trouble manifestement illicite ou prévenir un dommage imminent. Il pourra également, en l’absence de contestation sérieuse, accorder une provision.
L'article 9 alinéa 2 du code civil permet la mise en place de mesure conservatoire afin de faire cesser l'atteinte et ce, indépendamment du préjudice subi, tel que la remise de document sous astreinte. On peut donc par exemple, par ce biais demander la remise d'une vidéo prise par webcam. Enfin, s'agissant de ces mesures, elles peuvent être ordonnées en référé. Là aussi l’efficacité est de rigueur puisque selon la Cour de cassation, la seule constatation de l'atteinte aux droits de la personne suffit à caractériser l'urgence.
B - L'étendue de la protection
L'éventail des situations prises en compte par le droit civil est un argument supplémentaire. Les images de personnes dans des lieux privés, prises et publiées sans leur consentement, portent, à l’instar du droit pénal, nécessairement atteinte à leur vie privée, et partant à leur droit à l’image. Cela avait été érigé en principe même avant la loi du 17 juillet 1970.
La notion de vie privée est ainsi délimitée au fil des espèces par la jurisprudence. La vie affective et sentimentale, conjugale ou amicale, la santé, les loisirs de la personne fait aussi partie du domaine de la vie privée, et de façon général tout ce qui relève de la sphère intime et personnelle. La réparation du préjudice, s’il est constaté par le juge, peut permettre l'allocation de dommages et intérêts.
Source :
– Loi 17 juillet 1970