La réception des courriers recommandés n'entrant pas dans les attributions de la gardienne précisément définies à son contrat de travail, dont le copropriétaire ne pouvait pas ignorer la teneur, il en résulte qu'il ne peut pas légitimement prétendre à un dépassement de fonctions et donc rechercher la responsabilité du syndicat des copropriétaires en tant que commettant.
CA Paris. pôle 4. 9" ch .• 7 févr. 2013. n? 11/15879. Linord c/ Standaert :
JurisData n° 2013-002915
( ... )
Il résulte de la copie de l'avis de réception de la lettre recommandée avec accusé de réception du 8 janvier 2008, distribuée le 9 janvier 2008,que c'est bien Mme Lacord, concierge de l'immeuble, qui a réceptionné le courrier destiné à Mme Linord, l'avis portant sa signature et la mention P/Lacord.
Si le contrat de travail liant cette employée d'immeuble au syndicat des copropriétaires ne prévoyait pas et ne pouvait d'ailleurs pas prévoir, s'agissant d'un mandat donné par les occupants de l'immeuble que Mme Lacord pouvait recevoir les envois recommandés destinés aux occupants de la résidence, il résulte des nombreuses attestations des résidents de l'immeuble versées aux débats que Mme Lacord le faisait de manière habituelle depuis plusieurs années avec leur accord, de même qu'est produite l'affiche établie le 18 mars 2010 par le Conseil syndical qui mentionne: "la distribution des courriers recommandés et paquets, service rendu à titre bénévole par les gardiens (non prévu dans leur contrat de travail) est momentanément suspendue", ce qui confirme qu'au moment des faits, cette pratique était communément connue et admise. Il en résulte que les résidents avaient donné à Mme Lacord mandat tacite, conforme aux dispositions de l'article 1985 du Code civil, de réceptionner pour leur compte les envois recommandés et que cette pratique était connue du syndicat des copropriétaires. Cette activité bénévole de la gardienne, pratique instaurée dans ses relations personnelles avec les occupants est constitutive d'un mandat à elle consenti par chacun des résidents pris dans leur individualité. Elle ne constitue en rien une violation de son contrat de travail, faute d'interdiction formelle du syndic de rendre ce service aux résidents et elle est étrangère à ses fonctions, les résidents membres ou non du syndicat de copropriétaires n'ayant pas le pouvoir de modifier l'étendue des tâches qui lui sont confiées par son employeur, le syndic es qualités.
Il résulte de l'attestation manuscrite en date du 25 octobre 2010 remise par Mme Lacord à Mme Linord et produite par cette dernière, que ce mandat existait également entre elles, puisque le 31 décembre 2007, avant les faits litigieux, puis les 13 mars 2008, 18 juin 2008 et 8 juillet 2008, la gardienne a réceptionné des courriers recommandés à l'intention de Mme Linord, puis les lui a remis.
En revanche, il résulte du même document, que Mme Lacord ne conteste pas, qu'elle atteste ne pas lui avoir remis de courrier recommandé dans le courant du mois de janvier 2008, ce qui démontre qu'après avoir réceptionné la lettre recommandée avec accusé de réception le 9 janvier 2008, elle ne l'a pas remise à Mme Linord, ce qui constitue une faute dans le cadre du mandat conclu entre elles. La réception des courriers recommandés n'entrait pas dans les attributions de la gardienne précisément définies à son contrat de travail, dont Mme Linord membre du syndicat des copropriétaires ne pouvait pas ignorer la teneur. Dès lors, elle ne peut pas légitimement prétendre à un dépassement de fonctions et donc rechercher la responsabilité du syndicat des copropriétaires en tant que commettant, sur le fondement de l'article 1384 du Code civil. Par suite, toutes les demandes formées contre le syndicat des copropriétaires et son assureur la Compagnie Generali lard seront rejetées.
En ce qui concerne la société La Poste, la prescription annale invoquée s'applique aux actions en responsabilité engagées en raison des pertes et avaries survenues lors de la prestation, ce qui ne peut s'entendre que dans le cas de perte ou d'avaries imputables à La Poste elle-même.
En l'espèce, le courrier a été remis par l'agent postal et l'avis de réception signé ; il est donc considéré comme distribué et non perdu, la faute reprochée par Mme Linord à la société Poste étant précisément d'avoir distribué le courrier à une personne qui n'avait pas pouvoir écrit de le réceptionner.
La prescription de l'article L. 10 du C. P. et CE ne s'applique donc pas à l'espèce et l'action est recevable. En revanche, dès lors qu'en vertu d'un mandat tacite, Mme Lacord pouvait réceptionner le courrier de Mme Linord, seul le défaut d'exigence d'un écrit peut être reproché à l'agent postal et cette faute est sans lien de causalité directe avec le préjudice dénoncé par Mme Lacord qui trouve sa cause dans la perte du dit courrier après sa réception par la gardienne de l'immeuble.
Par suite, le courrier ayant été distribué à un mandataire, aucune faute ne peut être reprochée à la société La Poste du fait de son préposé.
Il appartient à Mme Linord d'établir la réalité du préjudice subi par la faute de Mme Lacord qui s'est abstenue de lui remettre la lettre recommandée avec accusé de réception réceptionnée pour son compte le 9 janvier 2008. ( ... ).
La cour d'appel a donc estimé que la gardienne a disposé d'un mandat tacite de remettre le courrier à chaque copropriétaire en marge de son contrat de travail, ce qui ne permettait pas de mettre en cause le syndicat en tant que commettant au regard de l'article 1384 du Code civil.
Dans cette analyse, cette responsabilité devait peser sur la gardienne ayant commis une faute pour inexécution de son mandat tacite résultant d'une pratique instaurée avec les copropriétaires.