I. LIMINAIRES
Nous nous attarderons principalement à l’une des trois composantes de la mission du Comité qui est l’examen des plaintes des particuliers lorsqu’une violation à un droit garanti par le Pacte est alléguée, mécanisme prévu par le Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques.
II. LA RDC ET LE COMITE DES DROITS DE L’HOMME
Le Comité des droits de l’homme a été institué en vertu du Pacte international relatif aux droits civils et politiques adopté le 16 décembre 1966 par l’Assemblée générale des Nations Unies, lequel est entré en vigueur le 23 mars 1976.
La RDC a ratifié le pacte international relatif aux droits civils et politiques qui crée cette juridiction il y a 31 ans soit le 1er novembre 1976. Le Comité des droits de l’homme a notamment pour rôle de promouvoir et d’assurer le respect effectif des droits prévus au Pacte.
III. CONTENU DES PLAINTES ET CONDITIONS DE RECEVABILITE
En cas de violation de ses droits civils et politiques, le plaignant dans sa plainte dénommée aussi « communication » doit fournir des informations permettant d’identifier l’auteur (ou les auteurs le cas échéant), la victime présumée si elle n’est pas l’auteur, le nom de l’État partie concerné et une description détaillée des violations présumées.
Sur la question de fond, le plaignant doit par ailleurs démontrer en quoi il est directement et personnellement affecté par une législation, une réglementation, une politique ou une directive de l’État concerné qui serait en violation de l’un ou l’autre des droits garantis par le Pacte.
L’évaluation de la violation ne peut donc se faire in abstracto, c’est-à-dire sans preuve d’un préjudice individuel. À cet égard, le Comité s’est déjà prononcé à l’effet que de simples allégations ne sont pas suffisantes pour saisir le Comité d’une plainte, les allégations devant aussi être supportées par un certain nombre d’éléments matériels substantiels.
Doivent aussi être mentionnées dans la communication les mesures prises pour obtenir réparation devant d’autres instances internationales, telles que par exemple la Commission Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples ou la Cour Africaine dans le cas de la RDC, ou encore, auprès d’instances internes, tel que tout recours de nature judiciaire ou administrative, ainsi que les motifs pour lesquels les recours internes n’ont pas été épuisés, le cas échéant.
Soulignons par ailleurs que le Comité peut prendre des mesures provisoires pour protéger les droits d’un plaignant, tel que demander à la RDC de repousser l’exécution d’une sentence ou l’expulsion de l’auteur du pays. Ceci étant, il arrive que des États passent outre les mesures provisoires demandées par le Comité. Certains États ont ainsi déjà procédé à l’exécution d’un plaignant sujet à la peine capitale malgré une demande du Comité d’y surseoir.
Parlant de la RDC, elle pourra choisir de discuter de la recevabilité de la plainte avec les questions de fond ou séparément. Si la recevabilité de la plainte est traitée avec le fond, elle disposera alors d’un délai de six mois pour ce faire. Si au contraire la RDC souhaite d’abord soulever l’irrecevabilité comme moyen préliminaire, le délai sera alors de deux mois pour faire valoir ses arguments.
Des prolongations peuvent toutefois être obtenues sur autorisation du Comité car la complexité de certains dossiers rend parfois de telles demandes inévitables. Enfin, il peut arriver que les États ne répondent pas, et ce, malgré les rappels du Comité. Dans ce cas, ce dernier rendra alors sa décision ex parte.
Quels sont alors les motifs d’irrecevabilité que la RDC peut soulever ?
Le Protocole comporte certains motifs spécifiques d’irrecevabilité. Ils sont prévus à l’article 3 ainsi qu’au second paragraphe de l’article 5 du Protocole qui nous intéresse au plus haut point, En effet, au terme de l’article 5.2., le Comité n’examinera aucune communication d’un particulier sans s’être assuré que :
a) La même question n’est pas déjà en cours d’examen devant une autre instance internationale d’enquête ou de règlement ;
b) Le particulier a épuisé tous les recours internes disponibles.
Dans le cas d’espèce, il est connu de que le dossier de l’actuel plaignant est pendant devant la Cour Suprême de Justice et qu’en conséquence, les voies de recours internes n’ont pas encore été épuisées. Toutefois, cette règle ne s’applique pas si les procédures de recours excèdent des délais raisonnables. Cela n’est pas encore le cas !
Insistons que l’irrecevabilité d’une communication peut être invoquée par l’État partie séparément ou en même temps que les observations sur le fond. Elle peut aussi être soulevée par le Comité lui-même. Lorsqu’elle est invoquée par l’État partie sans égard à la question de fond, il sera généralement demandé au Comité de suspendre les délais en cours en attendant qu’une décision soit rendue sur la recevabilité. Si le Comité décide que la communication est recevable, l’État partie, en lui soumettant ses observations sur le fond, pourra lui demander de reconsidérer cette décision.
IV. AU FINISH, QUELLE SERA LA PORTEE JURIDIQUE D’UNE DECISION DU COMITE DES DROITS DE L’HOMME CONTRE LA RDC ?
Dans son essence, une décision du Comité peut être considérée comme un avis, une constatation. Ainsi, les décisions du Comité n’ont pas de valeur juridiquement contraignante en droit interne.
Toutefois, il est certain que le poids moral d’une décision du Comité sur un tribunal judiciaire ou administratif demeure relatif, et ce, compte tenu notamment de la faible notoriété du Comité sur le plan interne et du caractère non exécutoire de ses décisions. Ceci étant, ce qui précède est un peu académique dans la mesure où la plainte devrait normalement être rejetée par le Comité puisque les recours internes dans un tel cas ne seraient pas épuisés.
Les décisions du Comité n’ont donc qu’un effet limité, les décisions du Comité ne sont pas exécutoires à l’encontre des États parties au Protocole. Le Comité ne dispose ainsi d’aucune autorité pour protéger les droits individuels à l’encontre des États délinquants ou pour imposer des sanctions, son seul recours étant d’en faire part à l’ONU dans le cadre de son rapport annuel.
Ainsi, l’absence au Protocole de dispositions spécifiques ayant pour effet de conférer un effet obligatoire à ses décisions ne signifie pas que la RDC peut librement choisir de se soumettre ou non à ses constatations. Ses décisions comportent une obligation normative, pour un État pris en défaut, de remédier aux violations constatées par le Comité, l’adhésion d’un État au Protocole ne permettant pas une autre interprétation.
Le Comité termine généralement ses constatations en faisant part à l’État partie comme la RDC, s’il y a eu violation, de son souhait de recevoir dans un délai qu’il fixe, qui est généralement de six mois, des renseignements sur les mesures prises pour donner effet à celles-ci.
Cette information apparaîtra alors dans le rapport annuel du Comité à l’Assemblée Générale de l’ONU. Le suivi des constatations est assuré par un rapporteur spécial qui est un membre du Comité. Notons à cet égard qu’il est déjà arrivé que la RDC ne prenne pas de mesures pour mettre en œuvre les constatations du Comité.