Cass. soc., 23 mai 2017, n° 15-22.223, Publié au bulletin
Les faits
Une salariée, directrice des ventes, a été déclarée inapte à son poste le 11 octobre 2010 par le médecin du travail, puis a été, le 23 novembre 2010, licenciée pour inaptitude et impossibilité de reclassement.
Parmi ses diverses demandes indemnitaires, la salariée demande notamment le paiement de 5 635 € à titre de reliquat d’indemnité de licenciement, somme qui aurait été ajoutée à celle-ci si son salaire de base avait été pris en compte dans le calcul, et non pas le salaire perçu pendant son arrêt maladie.
Or, la Cour d’Appel de Nîmes rejette cette demande au motif que ni la loi, ni des dispositions conventionnelles ne prévoient une telle « neutralisation » de la période d’arrêt maladie.
Cet arrêt est cassé sur ce point par la Cour de Cassation au visa notamment de l’article L1132-1 du Code du travail et au motif que « le salaire de référence à prendre en considération pour le calcul de l'indemnité légale ou conventionnelle de licenciement est, selon la formule la plus avantageuse pour le salarié, celui des douze ou des trois derniers mois précédant l'arrêt de travail pour maladie ».
Principe : Le salaire à prendre en compte pour le calcul de l’indemnité de licenciement
Le salarié titulaire d’un CDI et qui compte au moins une année d’ancienneté ininterrompue a droit, sauf faute grave, a une indemnité de licenciement (Article L1234-9 du Code du Travail).
Le salaire à prendre en considération pour le calcul de l'indemnité de licenciement est, selon la formule la plus avantageuse pour le salarié :
1° Soit le douzième de la rémunération des douze derniers mois précédant le licenciement ;
2° Soit le tiers des trois derniers mois. Dans ce cas, toute prime ou gratification de caractère annuel ou exceptionnel, versée au salarié pendant cette période, n'est prise en compte que dans la limite d'un montant calculé à due proportion. (Article R1234-4 du Code du Travail)
Or : L’arrêt maladie peut engendrer une baisse de la rémunération
Lorsque vous êtes en arrêt maladie, sous réserve de remplir certaines conditions (une année d’ancienneté, bénéficier des IJ de la Sécurité Sociale…) vous ne percevez qu’une partie de votre salaire en combinant les indemnités journalières de la sécurité sociale, et le complément versé par l’employeur.
Sauf dispositions conventionnelles plus favorables, vous percevez 90% de la rémunération brute que vous auriez perçue si vous aviez travaillé. À partir du 31e jour d'arrêt consécutif, le pourcentage est abaissé aux 2/3 (soit 66,66%) de votre rémunération.
De plus, et à nouveau sauf dispositions conventionnelles plus favorables, un délai de carence de 7 jours est prévu pour chaque arrêt de travail, pendant lequel vous ne percevez ni IJ, ni complément de l’employeur.
Si votre convention collective prévoit le maintien intégral de votre salaire, sans délai de carence, pendant votre arrêt de travail, alors le problème ne se pose pas.
A défaut, il résulte des règles précitées que votre arrêt de travail entraînera nécessairement pour vous une baisse de vos revenus.
Dans cette situation, la période de référence de 3 ou 12 mois à prendre en compte est celle précédant l’arrêt de travail, et non pas le licenciement
Prendre en considération les 3 ou 12 derniers mois précédant le licenciement résulte d’une application stricte de l’article R1234-4.
Or, si le salarié est en arrêt maladie durant cette période, comme il l’a été rappelé il ne perçoit qu’une partie de son salaire, et non la totalité.
Par conséquent, cela revient a diminué l’indemnité de licenciement d’un salarié en raison de sa maladie, et donc de son état de santé, ce qui constitue une « mesure discriminatoire (…) indirecte (…) en matière de rémunération (…) en raison de l’état de santé du salarié ». Cela est prohibé par l’article L1132-1 du Code du Travail.
En l’espèce, la période de référence de 3 ou 12 mois était donc celle antérieure au 10 février 2010, date de l’arrêt de travail, et non celle antérieure au 23 novembre 2010, date du licenciement.
Publication maximale de cet arrêt (FS-PBRI)
- Les lettres FS signifient que l'arrêt a été rendu par une formation de Section de la Cour de cassation (de 9 à 15 magistrats selon les chambres)
- La lettre P signifie que l'arrêt sera publié au Bulletin des arrêts de la Cour de cassation (parution mensuelle) ;
- La lettre B signifie que l'arrêt sera mentionné au Bulletin d'information de la Cour de cassation (parution bimensuelle) ;
- La lettre R signifie que l'arrêt sera commenté dans le Rapport annuel de la Cour de cassation (parution annuelle) ;
- La lettre I signifie que l'arrêt sera diffusé sur le site Internet de la Cour de cassation.
La Cour de Cassation veut donc faire de cet arrêt un principe clair qu’il convient de respecter pour le calcul de l’indemnité de licenciement.