L’administration du travail intervient dans plusieurs situations lors des élections professionnelles. Le recours contre les décisions de celle-ci relève désormais de l’ordre judiciaire. Cette nouvelle disposition est-elle conforme à la constitution ? Il y a tout lieu d’en douter.
En matière d’élections professionnelles, le Code du travail prévoit qu’en l’absence d’accord entre l’employeur et les organisations syndicales appelées à négocier le protocole préélectoral, la répartition du personnel dans les collèges électoraux et la répartition des sièges entre les différentes catégories de personnel relève de la compétence du Direccte (C. trav., art. L. 2314-11 pour les DP ; C. trav., art. L. 2324-13 pour le CE, et C. trav., art. L. 2327-7 pour le CCE).
De même, l’autorité administrative est compétente pour autoriser des dérogations aux conditions d'ancienneté pour être électeur, ou éligible (C. trav., art. L. 2314-20 pour les DP ; C. trav., art. L. 2324-18 pour le CE).
Cette même autorité administrative est également compétente en l’absence d’accord sur le caractère d’établissement distinct (C. trav., art. L. 2314-31 pour les DP ; C. trav., art. L. 2322-5).
Jusqu’à la publication de la loi « Macron », le recours contre une décision de l’administration relevait fort logiquement du contentieux administratif. C’est là que la loi « Macron » apporte une innovation qui, si elle part d’un bon sentiment, bouleverse quelque peu notre logique juridique. En effet, l’article 267 de ladite loi prévoit que dans ces hypothèses, en cas de contestation, le recours à l’encontre de la décision de l’autorité administrative relève de la compétence du juge judiciaire !
On peut comprendre qu’il soit logique de donner au juge judiciaire la pleine compétence sur le contentieux des élections professionnelles, mais de là à passer outre le principe de séparation des pouvoirs. En effet, le juge judiciaire appelé à statuer, en pratique le tribunal d’instance, n’a pas le pouvoir d’annuler une décision administrative. Or, il s’agit bien de contester une décision administrative…
Si cet article 267 n’était pas intégré dans le recours fait par les Parlementaires devant le Conseil constitutionnel, une QPC sur l’application des articles en cause aurait de grandes chances d’aboutir.
Par ailleurs, il convient de préciser que l’article L. 2322-5 précité n’est pas visé par l’article 267. Cela signifie que le recours contre une décision de l’administration portant sur la reconnaissance du caractère d’établissement distinct en matière de CE relèvera toujours de l’ordre administratif. Même s’il s’agit d’un « oubli » du législateur, tout cela est particulièrement surprenant dans un contexte où la simplification du Code du travail est très fortement demandée !
François Barbé
Consultant RH/ Relations Sociales