- Un bureau de conciliation et d'orientation
L’actuel bureau de conciliation du Conseil de prud’hommes devient désormais le bureau de conciliation et d'orientation.
Le bureau de conciliation et d'orientation assure désormais la mise en état des affaires (rassemblement des pièces...).
Le nouvel article L. 1454-1-2 du Code du travail (article 258 de la loi Macron) prévoit qu' « un ou deux conseillers rapporteurs peuvent être désignés pour que l’affaire soit mise en état d’être jugée. Ils prescrivent toutes mesures nécessaires à cet effet. »
Le bureau de conciliation et d'orientation peut statuer en bureau de jugement lorsqu'une partie ne comparaîtra pas ou ne sera pas représentée.
Par ailleurs, les conseillers prud'homaux ont un rôle plus important car ils choisissent la voie la plus adaptée pour le traitement de l'affaire : la formation normale (4 conseillers), la formation restreinte (un conseiller salarié et un conseiller employeur) ou le renvoi direct en départage.
La formation dite restreinte est saisie pour les dossiers relativement simples et notamment les litiges portant sur un licenciement ou une demande de résiliation judiciaire du contrat de travail. Il faut nécessairement l'accord préalable des parties. Cette formation doit statuer dans un délai de trois mois. Si elle considère que l'affaire ne relève pas de son domaine de compétence ou se déclare en partage de voix, l'affaire est directement renvoyée devant la formation de départage.
Le bureau de conciliation peut également renvoyer l'affaire directement devant la formation de départage présidée par un juge professionnel dans trois situations :
- d'office par le bureau de conciliation en raison de la nature de l'affaire ;
- de droit lorsque le salarié et l'employeur le demandent (cette possibilité est très infime car les employeurs éviteront de solliciter le renvoi direct devant cette formation pour gagner du temps).
Cette mesure a été fortement critiquée car les partenaires sociaux estiment que l'accès direct devant le juge professionnel porte atteinte à la spécificité de la justice prud'homale.
- Création d'un défenseur syndical
Un nouveau statut est créé : le défenseur syndical. Le défenseur syndical assiste ou représente le salarié ou l'employeur devant le Conseil de Prud'hommes ou devant la Cour d'appel.
Les nouveaux articles L. 1453-4 à L. 1453-8 du Code du travail (article 258 de la loi Macron) prévoient :
- l'obligation de confidentialité et du secret par les défenseurs syndicaux. Toute méconnaissance de ces obligations peut entraîner la radiation de l’intéressé de la liste des défenseurs syndicaux par l’autorité administrative ;
- le maintien de salaire des défenseurs syndicaux pendant les heures de délégation pour l'exercice de leurs fonctions, dans la limite de 10 heures par mois. Cette rémunération est remboursée aux employeurs par l'Etat ;
- la possibilité, après accord de l'employeur, de bénéficier d'autorisation d'absence pour les besoins de leur formation, dans la limite de deux semaines par période de 4 ans ;
- les défenseurs syndicaux sont tenus au secret professionnel et d'une obligation de discrétion.
Le défenseur syndical bénéficie du statut protecteur. Ainsi, comme tout salarié protégé, le licenciement du défenseur syndical sera soumis à la procédure d'autorisation administrative (article L. 1453-9 du Code du travail).
- La mise en place d'un référentiel indicatif
La loi Macron (article 258) a également mis en place un référentiel indicatif qui devra être appliqué par les conseillers prud’homaux en cas de licenciement irréguliers ou sans cause réelle et sérieuse.
Ce référentiel indicatif sera établi selon les critères suivants :
- l'âge de la personne concernée,
- son ancienneté,
- sa situation par rapport à l'emploi, si la personne concernée a retrouvé un emploi ou non (article L. 1235-1-3 du Code du travail).
Les juges feront une appréciation subjective pour déterminer le quantum de l'indemnité. Il en sera autrement lorsque les parties en feront la demande. Dans cette hypothèse, le juge devra appliquer strictement le référentiel indicatif.
Cette mesure sera établie après avis du Conseil supérieur de la prud'homie, selon les modalités qui seront définies par décret.
- L’annulation par le Conseil constitutionnel du barème prévu en cas de licenciement abusif
L'article 266 de la loi Macron entendait modifier l’article L. 1235-3 du Code du travail afin qu’il prévoit que :
« Si l'une ou l'autre des parties refuse cette réintégration, le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de l'employeur définie conformément aux montants minimaux et maximaux fixés et exprimés en mois de salaire :
Indemnité variant selon l'effectif de l'entreprise |
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Moins de 20 salariés |
Entre 20 et 299 salariés |
A partir de 300 salariés |
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Ancienneté du salarié dans l'entreprise |
Moins de 2 ans |
Maximum : 3 mois de salaire |
Maximum : 4 mois de salaire |
Maximum : 4 mois de salaire |
De 2 ans à moins de 10 ans |
Minimum : 2 mois de salaire Maximum : 6 mois |
Minimum : 4 mois de salaire Maximum : 10 mois |
Minimum : 6 mois de salaire Maximum : 12 mois |
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A partir de 10 ans |
Minimum : 2 mois de salaire Maximum : 12 mois |
Minimum : 4 mois de salaire Maximum : 20 mois |
Minimum : 6 mois de salaire Maximum : 27 mois |
Ce barème devait être applicable lors d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse mais aussi lorsque le juge reconnaît la résiliation judiciaire ou la prise d'acte de la rupture d'acte aux torts de l'employeur.
Toutefois, les parlementaires ont saisi le Conseil constitutionnel, le 15 juillet 2015.
Celui-ci a rendu sa décision le 5 août 2015 et a invalidé ce dispositif au motif que le critère lié à la taille de l’entreprise est contraire au principe constitutionnel d’égalité devant la loi dès lors qu’il ne présente aucun lien avec le préjudice subi par le salarié du fait de la perte de son emploi.
Le Conseil constitutionnel a jugé que si le législateur pouvait, afin de favoriser l'emploi en levant les freins à l'embauche, plafonner l'indemnité due au salarié licencié sans cause réelle et sérieuse, il devait retenir des critères présentant un lien avec le préjudice subi par le salarié. Or, si le critère de l'ancienneté dans l'entreprise est en adéquation avec l'objet de la loi, tel n'était pas le cas du critère des effectifs de l'entreprise.
En effet, il semble évident que le préjudice du salarié que l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse a vocation à réparer est le même que celui-ci appartienne à une TPE ou à une multinationale.
Cette censure partielle s’avère être un échec cuisant pour Emmanuel Macron qui n’a pas réussi à faire passer son barème d’indemnités de licenciement, mesure phare de la loi.
Pourtant, le Ministre de l’Economie n’a de toute évidence aucune intention d’abandonner ce projet. En effet, dans un communiqué de presse de la nuit du 5 août 2015, Emmanuel Macron a annoncé qu’il ferait en sorte de prendre au plus vite des mesures pour adapter ce dispositif aux exigences posées par le Conseil constitutionnel. Un nouveau projet de texte à ce sujet devrait donc voir le jour dans les prochaines semaines. Affaire à suivre…
Frédéric CHHUM Avocat à la Cour
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