Les dettes sont comme des êtres humains, elles ont juridiquement une vie : elles naissent, vivent et meurent.
Dans le temps de leur vie, les dettes à l’égard des banques et des établissements financiers sont tôt ou tard cédées par ces derniers à des sociétés qui se chargeront de leur recouvrement.
En pratique, des portefeuilles de centaines ou de milliers de dettes sont cédées, en même temps, dans le cadre d’actes de cession de créances entre les banques et des sociétés de recouvrement, pour des montants forfaitaires inférieurs à la valeur faciale de l’ensemble de ces dettes.
Les sociétés de recouvrement font fructifier cette cession grâce aux intérêts qui courent et le temps qui passe, de sorte que le montant de la créance initiale ou de la dette peut être doublée ou triplée en quelques années.
Néanmoins, aux termes d’un jugement rendu le 25 septembre 2023 par le Tribunal judiciaire de Dijon, le Cabinet Bem a obtenu au profit de l’un de ses clients l’annulation de son engagement de caution car la cession de créance de la banque à une société de recouvrement ne permettait pas d’identifier les créances cédées.
En l’espèce, la banque Crédit Agricole a consenti un prêt à une société, dont les gérants se sont chacun solidairement portés cautions du remboursement de toutes les sommes dues par celle-ci.
A défaut de paiement de la dette par la société, la banque a classiquement fait assigner en justice les deux dirigeants cautions afin d’obtenir leur condamnation à payer les sommes dues au titre de leur cautionnement.
Or, en cours d’instance, la banque a cédé sa créance à un fond commun de titrisation qui intervenait en qualité de recouvreur.
Toutefois, selon les dispositions de l’article 1324 du Code civil, la cession de créance ne peut être opposable au débiteur, s’il n’y a déjà consenti, que si cette dernière lui a été notifiée ou s’il en a pris acte.
En l’espèce, le débiteur avait pris connaissance de cette cession par la banque dans les dernières conclusions de cette dernière qui ont été signifiées par voie électronique.
Ainsi, la notification de la cession de créance par la banque a été jugé valable par les juges.
Cependant, la loi impose aussi au créancier d’indiquer expressément dans l’acte de cession de créance :
- la dénomination « acte de cession de créance »,
- la mention du fait que la cession est soumise aux dispositions des articles L214-169 à L214-175,
- la désignation de cessionnaire,
- la désignation ou l’individualisation des créances cédées ou les éléments susceptibles d’y pourvoir.
En l’espèce, l’acte de cession portait sur 155 créances et les créances cédées étaient désignées et individualisées en annexe dudit acte de cession, comme c’est d’ailleurs le cas systématiquement.
Or, ces annexes n’ont pas été communiquées au débiteur.
Pour cause, comme à l’accoutumé, ces annexes ne permettaient surement pas de pouvoir valablement identifier les créances cédées.
Ainsi, le Cabinet Bem a réussi à démontrer que l’acte de cession de créance ne respectait pas les exigences légales et ainsi que l’acte de cession ne pouvait pas être valablement opposable au débiteur.
Par conséquent, il convient de garder en mémoire que les actes de cession de créance ne sont pas valables et sont inopposables au débiteur s’ils ne mentionnent pas la désignation préciser de la créance cédée ou ne permettent pas l’individualisation des créances cédées ou les éléments susceptibles d’y pourvoir.
Il ressort de cette jurisprudence que les cautions disposent de moyens de défense supplémentaires et efficaces pour pouvoir faire utilement annuler leur dette en cas de poursuite en paiement par des sociétés de recouvrement qui ont racheté celle-ci.
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Anthony Bem
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