Pour mémoire, les banques sont tenues d'éclairer leurs clients emprunteurs sur l'adéquation des risques couverts à sa situation personnelle d'emprunteur.
Or, les clauses des contrats d'assurance en garantie de prêt excluent des garanties perte totale et irréversible d'autonomie et arrêt de travail, de façon générale, indéfinie et imprécise « les suites et conséquences des antécédents de santé déclarés sur le questionnaire de santé ».
Ces clauses d'exclusion de garantie sont souvent noyée dans de multiples autres clauses d'exclusion, imprécises, générales et abstraites.
Elles ont pour objectif de vider la garantie de l’assurance de sa substance pour que celle-ci ne paye pas ce qu’elle doit en réalité.
Le 14 septembre 2022, la cour de cassation a annulé les effets d’une clause d’exclusion d’un contrat d’assurance emprunteur en vertu de l’obligation de la banque de couvrir automatiquement la perte de chance de l’emprunteur à défaut d’assurance en réglant le montant de la garantie (Cour de cassation - Deuxième chambre civile, 15 septembre 2022, n° 21-13.670).
En l’espèce, un emprunteur a souscrit l’assurance de groupe de sa banque pour garantir le remboursement de son crédit immobilier.
Au moment de son adhésion au contrat d’assurance, il a déclaré son traitement médical pour une maladie de longue durée.
Suite à l’évolution défavorable de sa maladie, il a été placé en arrêt de travail et sollicité, vainement, la prise en charge de son incapacité de travail de la part de la compagnie d’assurance Allianz vie.
En effet, afin de garantir le remboursement de ces prêts en cas de décès, de perte totale et irréversible d'autonomie et d'incapacité de travail, les emprunteurs adhèrent à une assurance.
Cela peut être une assurance de groupe de la banque ou un assureur tiers.
Au cas présent, l’assurance a justifié son refus du bénéfice de la garantie incapacité de travail par une une clause contractuelle excluant « les suites médicales ou conséquences d'antécédents de santé mentionnés sur le bulletin d'adhésion ».
Or, l’emprunteur a déclaré dans le questionnaire de santé qu'il suivait un traitement médical depuis 15 ans.
L’emprunteur a assigné en justice l'assureur et la banque.
L’emprunteur demandait à ce que la clause d'exclusion contractuelle de l’assurance, soit déclarée inopposable, c’est à dire nulle, et la condamnation de l'assureur au paiement de l'indemnité contractuelle.
A titre subsidiaire, l’emprunteur demandait que la banque soit condamnée pour manquement à son obligation d'information et de conseil.
Les juges d’appel ont débouté l’emprunteur de son action en responsabilité contre la banque pour manquement à son devoir d'information et de conseil.
Cependant, la cour de cassation a cassé et annulé l’arrêt d’appel en jugeant que la banque qui propose à son client auquel elle consent un prêt, d'adhérer au contrat d'assurance groupe qu'elle a souscrit à l'effet de garantir, en cas de survenance de divers risques, l'exécution de tout ou partie de ses engagements, est tenue de l'éclairer sur l'adéquation des risques couverts à sa situation personnelle d'emprunteur.
En outre, la Haute Cour a posé le principe que toute perte de chance ouvre droit à réparation, sans que l'emprunteur ait à démontrer que, mieux informé et conseillé par la banque, il aurait souscrit de manière certaine une assurance garantissant le risque réalisé.
La cour de cassation a profité de l’occasion pour poser des principes généraux en matière d’obligations bancaires lors de l’octroi de prêt et l’appel en garantie de l’assurance emprunteur, au travers des attendus suivants :
« La banque qui propose à son client auquel elle consent un prêt d'adhérer au contrat d'assurance de groupe qu'elle a souscrit à l'effet de garantir, en cas de survenance de divers risques, l'exécution de tout ou partie de ses engagements, est tenue de l'éclairer sur l'adéquation des risques couverts à sa situation personnelle d'emprunteur.
Le préjudice résultant de ce manquement s'analyse en la perte d'une chance de contracter une assurance adaptée à sa situation personnelle et toute perte de chance ouvre droit à réparation, sans que l'emprunteur ait à démontrer que, mieux informé et conseillé par la banque, il aurait souscrit de manière certaine une assurance garantissant le risque réalisé. »
Il résulte de cette jurisprudence que le défaut d’assurance emprunteur ouvre droit automatiquement à l’indemnisation du client par la banque en vertu de son manquement à son devoir d'information et de conseil envers l'assuré.
Il découle aussi de cet arrêt qu’il importe peu que l’emprunteur ait été ou non éclairé sur l'adéquation des risques couverts à sa situation personnelle d'emprunteur.
Autrement dit, l’emprunteur n’a pas à démontrer que mieux informé par la banque, il aurait pu raisonnablement obtenir de l'assureur ou d'un autre assureur la garantie exclue par le contrat.
La banque doit alors indemniser le préjudice pouvant résulter de cette faute.
Juridiquement ce préjudice est une « perte de chance » dont la preuve incombe en principe à celui qui s'en prévaut.
Toutefois, en la matière, les juges de la cour de cassation ont considéré qu’il fallait exempté l’emprunteur d’avoir à rapporter la preuve d'une perte de chance raisonnable.
Toute perte de chance ouvre droit à réparation.
En conséquence, les emprunteurs sont en droit d’invoquer la faute de la Banque pour manquement à son devoir d'information et de conseil lors de l’octroi du crédit et obtenir les sommes dues au titre du contrat d'assurance groupe souscrit à l'effet de garantir, en cas de survenance de divers risques, l'exécution de tout ou partie de ses engagements de remboursement.
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Anthony Bem
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