Tout d’abord, il convient de souligner que la Cour de cassation prononce rarement l’annulation du recours exercé par le Crédit Logement, quand il tente de se faire rembourser par l’emprunteur le paiement total de son crédit à la banque.
En effet, le Crédit Logement est une société de financement privée spécialisée dans la garantie de remboursement des prêts immobiliers aux particuliers distribués par les banques.
Le Crédit logement a été créé à l’initiative d’un consortium de 200 banques, dont notamment BNP Paribas, La Banque Postale, Société Générale, le Crédit Lyonnais, ING Banque, Crédit Mutuel, Crédit Agricole, CIC, HSBC, etc …
La garantie proposée par le Crédit Logement est une alternative moins couteuse et contraignante à la prise d'une hypothèque sur un bien immobilier lors de l'octroi d'un prêt par une banque.
En pratique, lorsque qu’une personne souhaite obtenir un crédit, la banque prêteuse sollicite une garantie du remboursement du prêt auprès du Crédit Logement, qui intervient en quelque sorte en tant que caution.
Ainsi, lorsque l’emprunteur n’est plus en mesure de pouvoir rembourser son crédit bancaire, la banque sollicite le paiement de la dette auprès du Crédit Logement qui se retourne en suite contre l’emprunteur, en exerçant une action dite « récursoire ».
L’action récursoire est le recours en justice exercé par celui qui a payé l’intégralité d’une dette contre les véritables détenteurs de la dette, c’est une sorte de recouvrement de créance.
Au travers de cette action, le Crédit Logement récupère la dette de la banque prêteuse auprès de l’emprunteur défaillant dans le remboursement de son crédit bancaire.
Or, le Crédit Logement bénéficiait jusqu’à présent d’une relative immunité sur le plan juridique dans le cadre de ce recours.
Or, aux termes d’une décision du 20 février 2019, la cour de cassation a annulé le recours exercé par le Crédit Logement qui tentait de se faire rembourser le paiement qu'il a fait à la banque en tant que caution de son crédit (Cour de cassation, première chambre civile, 20 février 2019, N° de pourvoi: 17-27963)
En l’espèce, le Crédit Lyonnais a consenti un prêt immobilier qui était garanti par le cautionnement du Crédit Logement.
A la suite d'échéances impayées, la banque a prononcé la déchéance du terme et mis en demeure l’emprunteur de régler le solde du prêt.
En tant que caution, le Crédit Logement a réglé les sommes réclamées par la banque et agi en remboursement de la somme correspondante au paiement effectué par ses soins entre les mains de la banque qui en contrepartie lui a délivré une quittance subrogative.
Ainsi, le Crédit Logement a assigné en justice l’emprunteur en remboursement des sommes payées à la banque aux lieu et place de l’emprunteur mais les juges ont rejeté le recours de celui-ci.
Pour cause, le Crédit Logement avait exercé son recours subrogatoire en produisant des quittances subrogatives afin d'établir la réalité du paiement mais sans avoir averti l’emprunteur, lequel au moment du paiement avait des moyens de faire déclarer la dette éteinte.
Concrètement, le Crédit Logement avait mis en demeure l’emprunteur de payer par lettre recommandée seulement six jours avant le paiement par le Crédit Logement à la banque et l’emprunteur avait retiré la lettre recommandée quinze jours après le paiement de la banque par la caution.
Dans ce contexte, l’emprunteur n’a pas été averti du paiement que le Crédit Logement envisageait d'effectuer à la banque, de sorte que le paiement a été fait à l'insu de l’emprunteur qui n’a pas été en mesure de contester l'exigibilité de la créance, notamment en ce qui concerne le capital restant dû ou l'irrégularité de la déchéance du terme.
En effet, au cas présent, l’emprunteur était en mesure d'opposer utilement à la banque le moyen de droit selon lequel la déchéance du terme ne peut, sauf disposition expresse et non équivoque du contrat de prêt (absente en l'espèce) être déclarée acquise au créancier sans la délivrance d'une mise en demeure restée sans effet, précisant le délai dont dispose le débiteur pour y faire obstacle.
L’emprunteur s’est donc trouvé privé de son recours contre la banque.
Par conséquent, la Cour de cassation a rejeté le recours du Crédit Logement estimant que l’emprunteur était en mesure d'opposer utilement à la banque un moyen de droit.
Il en résulte que le Crédit Logement ne peut donc pas valablement poursuivre l’emprunteur en remboursement des sommes payées pour son compte à la banque, si il ne lui a pas envoyé préalablement une lettre recommandée effectivement distribuée afin de l’avertir qu’il va procéder au paiement.
Concrètement, le Crédit Logement doit toujours pouvoir être en mesure de justifier de l'existence de courriers envoyés antérieurement à son paiement à l’emprunteur lui indiquant qu'en l'absence de régularisation des échéances de prêt impayées, il sera amené à rembourser en lieu et place de l'intégralité du solde de la créance du prêteur.
Ainsi, au cas par cas, après analyse du dossier, le Crédit Logement peut perdre son recours contre l’emprunteur en réglant à une banque des dettes qui n'étaient pas exigibles, et sans déchéance du terme valablement prononcée par la banque.
Pour conclure, il convient de garder en mémoire que l’emprunteur est bien fondé à invoquer, en défense, contre le Crédit Logement les règles relatives à la perte du droit à recours énoncées à l'article 2308 alinéa 2 du code civil, peu importe la nature du recours du Crédit Logement, à savoir action personnelle en remboursement ou action subrogatoire.
Je suis à votre disposition pour toute action ou information (en cliquant ici).
Anthony Bem
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