Bail commercial : extension de l'activité de vente de prêt-à-porter aux accessoires de mode

Publié le Modifié le 27/08/2013 Vu 14 919 fois 8
Légavox

9 rue Léopold Sédar Senghor

14460 Colombelles

02.61.53.08.01

La clause objet insérée dans un bail commercial qui prévoit, de manière générale, la vente de « prêt-à-porter » peut-elle être étendue à celle d'accessoires de mode ? En plus de la déspécialisation simple ou partielle et de la déspécialisation totale, la jurisprudence reconnait certaines activités comme l'accessoire de l'activité principale.

La clause objet insérée dans un bail commercial qui prévoit, de manière générale, la vente de « prêt-Ã

Bail commercial : extension de l'activité de vente de prêt-à-porter aux accessoires de mode

L’article L.145-47 du Code de commerce permet au locataire d’adjoindre à l'activité prévue au bail des activités connexes ou complémentaires.

Il faut distinguer selon que la déspécialisation est partielle ou plénière

La déspécialisation sera simple si les activités ajoutées sont connexes ou complémentaires.

Elle sera plénière si les activités n'ont aucun rapport avec l’activité prévue par le contrat de bail commercial.

La déspécialisation partielle suppose donc que les activités soient connexes ou complémentaires.

Selon un arrêt de la cour d’appel de Paris du 27 mars 1990 :

«Est connexe à une activité celle qui a un rapport étroit avec elle. Est complémentaire celle qui est nécessaire à un meilleur exercice de l'activité principale, qui en constitue le prolongement raisonnable ».

De plus, la cour d’appel de Pau a eu l'occasion de juger que :

« Le caractère complémentaire s'entend d'une activité qui, sans être en rapport intime avec l'activité autorisée au bail, en est le complément, c'est-à-dire le prolongement raisonnable permettant au locataire un meilleur exercice de l'activité principale afin de mieux se défendre contre la concurrence et de suivre l'évolution des usages commerciaux et les attentes de la clientèle. Il se dégage de la jurisprudence que les activités sont connexes quand il existe un rapport étroit entre elles, qu'elles sont complémentaires et sont nécessaires à un meilleur exercice de l'activité principale ». (CA Pau, 16 janv. 2012, n°11/02160).

C’est ainsi qu'aux termes d'un arrêt du 24 octobre 1984, la Cour de cassation a jugé que :

« après avoir souverainement retenu que l'activité nouvelle de confection, prêt-à-porter pour dames, s'adressant à la même clientèle féminine dans la même gamme d'articles textiles de luxe, était par rapport au commerce de gaines, soutiens-gorges, chemiserie, bonneterie et sous-vêtements une activité à la fois connexe et complémentaire, la Cour d'appel, qui en a déduit à bon droit qu'il s'agissait d'une déspécialisation partielle ». (Cass., 24 octobre 1984, n 83-11433).

Dans le même sens, aux termes d'un arrêt du 17 octobre 2007, la Cour d’appel de Paris a déclaré que :

« Considérant, en revanche, que la vente limitée de bijoux apparaît, comme celle-ci le soutient et conformément à l'évolution des usages, être une activité annexe à son activité de vente de prêt-à-porter de sorte (et sans qu'il soit besoin d'examiner le surplus des moyens de ce chef), qu'il sera dit qu'aucune infraction au bail ne peut être retenue à cet égard ». (CA Paris, 17 octobre 2007, n°06/00659).

En l’espèce, la société X était locataire de locaux commerciaux destinés à l'activité de "maroquinerie, chaussures, vêtements de cuir et prêt- à -porter de luxe ainsi que arts de la table, objets de décoration, galerie d'art".
 
Le bailleur a fait délivrer à la locataire un commandement visant la clause résolutoire insérée au bail d'avoir à respecter la destination des lieux en cessant la vente de sous-vêtements et de bijoux.
 
Contestant ce commandement, la locataire a fait assigner le bailleur en justice pour notamment voir dire que la vente de sous-vêtements faisait partie intégrante de la vente de prêt-à-porter autorisée au bail et que la vente de petite bijouterie fantaisie était une activité annexe et accessoire à celle de vente de prêt- à -porter de luxe et que cette vente n'était pas de nature à porter atteinte à la destination autorisée au bail.
 
Le tribunal a jugé que la vente de sous-vêtements et de maillots de bain n'entrait pas dans celle de prêt-à-porter et que celle de bijoux fantaisie n'était pas incluse dans celle de galerie d'art et n'était pas annexe et accessoire à celle de vente de prêt- à –porter de luxe et maroquinerie.
 
A propos de la vente de sous-vêtements et de maillots de bain, la cour d’appel a confirmé le jugement du tribunal en considérant que la vente de sous-vêtements apparaît constituer une activité complémentaire à la vente des vêtements.
 
A propos de la vente de bijoux, la Cour a considéré qu’elle était accessoire de celle de prêt-à-porter.
 
En se fondant sur ces arrêts, on pourrait considérer que le fait d’adjoindre une activité de vente de sacs fantaisie, de bijoux fantaisie et d’accessoires de modes à une activité de vente de vêtements constitue une déspécialisation partielle.
 
Cette déspécialisation partielle étant un droit pour le locataire, il suffit pour ce dernier de faire connaître son intention au propriétaire par acte extrajudiciaire, en indiquant les activités dont l'exercice est envisagé.
 
Par ailleurs, d'autres moyens juridiques permettent de considérer la vente d’accessoires de modes comme une activité connexe ou complémentaire à la vente de prêt-à-porter.
 
En effet, selon la cour d'appel de Rennes :

« La connexité ou la complémentarité s'apprécient par rapport à l'activité prévue au bail et en fonction des usages ou de l'évolution des pratiques commerciales ». 

En outre, « l'activité connexe peut être définie comme le produit analogue au produit initial et le produit complémentaire, celui qui sans lequel le produit principal serait incomplet. ». (CA Rennes, 22 oct. 2008, n°07/06080).

En plus du critère des usages commerciaux, la jurisprudence se réfère à d’autres critères pour apprécier la connexité ou la complémentarité tels que : la similitude des méthodes de travail, l’identité du fabricant, l’identité de la clientèle, l’identité des articles, et la conjoncture économique.
 
C’est ainsi que la cour d'appel de Toulouse a estimé que :

« Pour apprécier si l'activité nouvelle est simplement connexe ou complémentaire, il convient de se référer à l'identité de la clientèle, ou des produits offerts, ou des méthodes de travail ». (CA Toulouse, 13 avr. 2006, n°05/01317).

S’agissant du critère des usages commerciaux, il est dans les usages de la majorité des boutiques de prêt-à-porter de vendre à la fois des vêtements et des sacs, bijoux et accessoires de mode.
 
Ensuite, concernant le critère de l’identité de la clientèle, il semble que la vente de vêtements s’adresse à la même clientèle que la vente d’accessoires de mode, dans la mesure où il existe un rapport étroit entre les deux activités.
 
Enfin, la qualification d’activité accessoire est envisageable afin d'étendre l'activité principale de vente de prêt à porter prévue dans le bail commercial. 
 
C’est ainsi que la cour d'appel de Pau a jugé que la vente de quelques articles vestimentaires publicitaires ne modifie pas la destination d'un commerce de bazar.

En l'espèce, un magasin ne disposait que d'un rayonnage de vêtements souvenir à l'effigie de la ville de Biarritz ou du Pays Basque, rayonnage qui occupait une place très restreinte.

En conséquence, il n'était pas possible d'admettre que le preneur avait ajouté l'activité de prêt-à-porter à son activité principale de bazar. (CA Pau, 15 juin 2012, n° 11/00844)
 
L'intérêt de qualifier les activités d'activités accessoire est, comme le précise la cour de Douai, « qu'échappent à l'obligation de notification préalable les activités qui se situent dans le prolongement direct de l'activité prévue au bail, et  n'en constituent qu'une modalité particulière d'exploitation », (CA Douai, 14 sept. 2011, n° 09/07376).

Je suis à votre disposition pour toute action ou information (en cliquant ici).

PS : Pour une recherche facile et rapide des articles rédigés sur ces thèmes, vous pouvez taper vos "mots clés" dans la barre de recherche du blog en haut à droite, au dessus de la photographie.

Anthony Bem
Avocat à la Cour
27 bd Malesherbes - 75008 Paris
Tel : 01 40 26 25 01

Email :
abem@cabinetbem.com

www.cabinetbem.com

Vous avez une question ?
Blog de Anthony BEM

Anthony BEM

249 € TTC

1435 évaluations positives

Note : (5/5)

Posez gratuitement toutes vos questions sur notre forum juridique. Nos bénévoles vous répondent directement en ligne.

1 Publié par Visiteur
10/11/2015 19:23

Bjr avec un bail vente vêtement peut on ouvrir un dépôt vente

2 Publié par Maitre Anthony Bem
10/11/2015 21:22

Bonjour Faby,

Je vous confirme la possibilité d'exploiter une activité de dépôt vente avec un bail commercial de vente de vêtements.

Cordialement.

3 Publié par Visiteur
26/06/2016 22:18

Bonjour

Avec un bail chaussures femmes est il possible de changer et de faire de la chaussure enfant?

4 Publié par Visiteur
15/11/2016 20:31

Bonjour, je suis sur le point d'acquerir une cave à vins, dont la destination du bail est négoce de vins au detail, est il possible d'étendre cette activité à la dégustation de vins ? Merci beaucoup

5 Publié par Visiteur
05/01/2017 18:08

Bonjour,
Je bénéficie d'un bail prêt a porter femme , et chaussure homme femme enfant, puis je distribuer du prêt a porter homme et enfant,? merci pour votre réponse

6 Publié par Visiteur
13/02/2018 08:58

Bonjour, pour une supérette de 600m2 d'espace de vente, sur le bail l’activité mentionnée est : "exclusivement de supermarché d’alimentation générale avec les activités qui peuvent s’y rapporter"
Peut-on inclure toutes les ventes que l’on retrouve dans un supermarché classique ? soit en plus de l’alimentation, la vente de plats à emporter, textiles, petit électro-ménager, décoration, maroquinerie, jouets, vaisselle, tabac, journaux, quincaillerie, etc … ???
Merci pour votre réponse

7 Publié par Visiteur
16/03/2018 18:49

Dans un magasin de pret a porter ou "jeanners" est ce que la vente de chaussures est autorisée et si oui est elle limitée ? peut on vendre par ex autant de textile que de chaussures dans le magasin ? ou au contraire est ce que la chaussure doit etre un accessoire a l activite principale ?

8 Publié par la modeuse
09/10/2019 18:44

une maison de la presse tabac carterie a t'elle le droit de vendre des article de prêt a porter?

Publier un commentaire
Votre commentaire :
Inscription express :

Le présent formulaire d’inscription vous permet de vous inscrire sur le site. La base légale de ce traitement est l’exécution d’une relation contractuelle (article 6.1.b du RGPD). Les destinataires des données sont le responsable de traitement, le service client et le service technique en charge de l’administration du service, le sous-traitant Scalingo gérant le serveur web, ainsi que toute personne légalement autorisée. Le formulaire d’inscription est hébergé sur un serveur hébergé par Scalingo, basé en France et offrant des clauses de protection conformes au RGPD. Les données collectées sont conservées jusqu’à ce que l’Internaute en sollicite la suppression, étant entendu que vous pouvez demander la suppression de vos données et retirer votre consentement à tout moment. Vous disposez également d’un droit d’accès, de rectification ou de limitation du traitement relatif à vos données à caractère personnel, ainsi que d’un droit à la portabilité de vos données. Vous pouvez exercer ces droits auprès du délégué à la protection des données de LÉGAVOX qui exerce au siège social de LÉGAVOX et est joignable à l’adresse mail suivante : donneespersonnelles@legavox.fr. Le responsable de traitement est la société LÉGAVOX, sis 9 rue Léopold Sédar Senghor, joignable à l’adresse mail : responsabledetraitement@legavox.fr. Vous avez également le droit d’introduire une réclamation auprès d’une autorité de contrôle.

Rechercher
A propos de l'auteur
Blog de Anthony BEM

Avocat contentieux et enseignant, ce blog comprend plus de 3.000 articles juridiques afin de partager mes connaissances et ma passion du droit.

Je peux vous conseiller et vous représenter devant toutes les juridictions, ainsi qu'en outre mer ou de recours devant la CEDH.

+ 1400 avis clients positifs

Tel: 01.40.26.25.01 

En cas d'urgence: 06.14.15.24.59 

Email : abem@cabinetbem.com

Consultation en ligne
Image consultation en ligne

Posez vos questions juridiques en ligne

Prix

249 € Ttc

Rép : 24h max.

1435 évaluations positives

Note : (5/5)
Retrouvez-nous sur les réseaux sociaux et sur nos applications mobiles