Le 22 septembre 2015, la Cour de cassation a jugé que, dans le cadre d'une opération globale, l'appréciation de la disproportion de cautionnements suppose de prendre en considération l’ensemble des contrats de cautionnement concomitamment souscrits par la caution, peu important qu’ils ne soient pas de même date (Cour de cassation, chambre commerciale, 22 septembre 2015, N° de pourvoi: 14-22913).
En l'espèce un dirigeant de sociétés s’est rendu caution solidaire envers la caisse régionale de Crédit agricole mutuel du Centre Ouest de prêts consentis à ses sociétés.
Les sociétés débitrices ayant été mises en redressement puis liquidation judiciaire, la banque a assigné en exécution de ses engagements la caution, qui s’est prévalue de leur disproportion sur le fondement de l’article L. 341-4 du code de la consommation.
Aux termes de cet article applicable depuis peu de temps aux cautions dirigeantes, le créancier professionnel, telle une banque, ne peut se prévaloir d’un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l’engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus.
Dans un premier temps, les juges d'appel ont condamné la caution au paiement car son endettement n'apparaissait pas manifestement disproportionné à ses revenus et patrimoine compte tenu du succès escompté de l’opération commerciale financée.
Cependant, la cour de cassation a cassé et annulé l'arrêt d'appel en jugeant :
« Qu’en statuant ainsi, alors que la proportionnalité de l’engagement de la caution ne peut être appréciée au regard des revenus escomptés de l’opération garantie, la cour d’appel a violé le texte susvisé [l’article L. 341-4 du code de la consommation] ».
Or, la banque ne produisait aucune fiche de renseignement sur la situation économique de la caution préalable à la conclusion de son cautionnement.
Il était donc aisé pour la caution d'invoquer en défense la disproportion du cautionnement car la banque n'était pas en mesure de prouver le contraire.
Pour mémoire, si la banque ne peut pas justifier s'être renseigner sur les revenus, patrimoine et dettes de la caution, le cautionnement litigieux ne peut pas valablement être opposé à la caution.
La jurisprudence prend en considération certains éléments et en rejette d'autres au cas par cas tel le succès escompté de l’opération commerciale financée.
En effet, tel que cela ressort expressément de cette décision, la proportionnalité de l’engagement de la caution ne peut être appréciée au regard des revenus escomptés de l’opération garantie.
De plus, la disproportion de l’engagement de la caution doit être appréciée en prenant en considération l’endettement global de la caution, y compris celui résultant de l’ensemble des engagements de caution souscrits par cette dernière.
Ainsi, dans le cadre d'une opération globale, il est nécessaire de prendre en considération l’ensemble des contrats de cautionnement concomitamment souscrits par la caution, peu important qu’ils ne soient pas de même date.
Cette décision est importante en ce qu'elle permet de calculer la disproportion en tenant compte l'ensemble des engagements de caution plutôt que d'avoir à les scinder et de calculer la disproportion de chacun d'eux séparément.
Enfin, il convient de rappeler que les cautions ne sont pas désarmées lorsqu'elles sont appelées en paiement par les banques.
Au contraire, les cautions dirigeantes disposent de nombreux moyens de défense à opposer à la banque poursuivantes, en cas de mise en demeure de paiement ou d'assignation devant le tribunal de la part de cette dernière, afin de faire annuler leur cautionnement ou d'en limiter les effets.
NB : Afin d'approfondir le sujet des moyens de défense dont disposent les cautions poursuivies en paiement par la banque, je vous invite à lire mon article publié ICI.
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Anthony Bem
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