Pour la Cour de Cassation, "la convention d'occupation précaire se caractérise, quelle que soit sa durée, par le fait que l'occupation des lieux n'est autorisée qu'à raison de circonstances exceptionnelles et pour une durée dont le terme est marqué par d'autres causes que la seule volonté des parties" (Cass. Civ. III, 19 novembre 2003, N° de pourvoi : 02-15887)
Le fonds de commerce est une notion juridique comprenant essentiellement la clientèle attachée à l’adresse du local où est exploité ledit fonds.
Si le locataire commerçant perd le droit au bail pour local où il exploite son activité, il risque donc de perdre sa clientèle et par voie de conséquence son fonds de commerce.
Ainsi, le législateur a prévu aux articles L.145-1 à L.145-60 du Code de Commerce un ensemble de règles spécifiques pour protéger les commerçants contre ce risque d’éviction, ce que l'on appelle communément le « statut des baux commerciaux ».
Aux termes de ces règles, le locataire bénéficie de nombreuses protections concernant notamment la révision et le plafonnement du montant du loyer, la durée (minimum de 9 ans), le droit au renouvellement, le droit à'indemnité d'éviction ainsi que les conditions de rupture du bail commercial.
Cependant, dans certains cas, afin d'éviter d’avoir à respecter ces règles, les bailleurs sont tentés de faire signer à leur locataire des conventions d’occupation précaire, qui ne relèvent pas du statut des baux commerciaux.
L’occupation est précaire car :
- le droit du locataire dépend de la réalisation d’un évènement pouvant intervenir à tout moment mais sans qu'il soit possible par avance de le fixer précisément ;
- le locataire ne connait pas la date à laquelle il perdra son droit de jouir du local mis à sa disposition ;
- le locataire n'a aucun espoir de conserver la jouissance du local pour l’exploitation de son commerce.
Dans ce contexte, la précarité inhérente à ce type de convention doit obligatoirement reposer sur des circonstances objectives justifiant son recours (exemples : l’existence d’une procédure d’expropriation des locaux en cours, des travaux de démolition à venir, etc ...)
Cependant, aux termes d'un arrêt du 1er avril 2009, la troisième chambre civile de la Cour de Cassation a jugé que :
- le recours abusif et de manière successive à ce type de convention, en lieu et place d’un bail commercial, démontrait la volonté du bailleur d’échapper frauduleusement à l’application du statut des baux commerciaux et, selon l’adage « la fraude corrompt toute chose », a prononcé la nullité de la convention d'occupation précaire de sorte que le bailleur ne pouvait se prévaloir d’aucune de ses dispositions. (Cass. Civ. III, 1er avril 2009, n°07-21833).
- cette convention d’occupation précaire caractérisait en réalité un véritable bail commercial soumis aux dispositions du Code de commerce permettant au locataire de se prévaloir du statut protecteur et favorable des baux commerciaux.
- le bailleur qui avait initié une procédure judiciaire à l'encontre de son locataire en invoquant le non respect des dispositions de la convention d'occupation précaire litigieuse doit payer une somme de 5.000 € à son locataire à titre de dommages intérêts pour avoir « abusé de son droit d’agir en justice ».
Dans ce contexte, le recours à ce type de convention n'est pas sans risque pour les bailleurs et une attention particulière doit être portée non seulement sur les causes le justifiant mais aussi sur les clauses y afférentes afin d'éviter tout risque de requalification en bail commercial "classique".
S'agissant des locataires, le cas échéant, ils doivent être conscients de la faveur dont ils bénéficient tant de la part du législateur que des juges et ainsi de la possibilité dont ils disposent de se prévaloir des avantages du statut des baux commerciaux.
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Anthony Bem
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