Les emprunteurs et les cautions peuvent utilement invoquer l'existence de fautes de la banque pour échapper à leur dette vis à vis de cette dernière.
En effet, elles peuvent faire valoir l'absence de précaution prise par la banque lors de la souscription d'un engagement ou d'un cautionnement pour se libérer de leur dette.
Ces précautions doivent en effet permettre à la banque de justifier l'éventuelle proportion de l'engagement de prêt ou de caution et de se défendre sur ce point le cas échéant en cas de contentieux.
En effet, conformément à l'article L.341-4 du code de la consommation, un créancier professionnel, telle qu'elle banque, ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée ne lui permette de faire face à son obligation.
Surtout, il est important de retenir que le caractère "averti" de la caution, du fait de sa qualité de gérant de la société garantie, est totalement hors sujet et hors débat pour apprécier la faute de la banque pour les cautionnements professionnels.
Ainsi, le 31 mars 2016, la Cour d'appel de Dijon a jugé que la faute de la banque permet à l'emprunteur et à la caution d'obtenir la condamnation de celle-ci au paiement de « la part de l'engagement souscrit manifestement hors de proportion avec la surface financière de l'intéressé » (Cour d'appel de Dijon, 2eme Chambre civile, 31 mars 2016, N° 13/01978).
En l'espèce, une banque avait consenti à une société un prêt garanti par deux cautionnements donnés par le gérant d'une société pour plus de 150.000 € et 25.000 €.
Or, le gérant s'était déjà porté caution de toutes sommes pouvant être dues par la société à la banque pour un montant de 70.000€.
La société a fait l'objet d'un redressement judiciaire et la banque a déclaré dans la procédure collective ses créances qui ont été admises.
La liquidation judiciaire de la société a été prononcée suite à la résolution du plan de redressement.
Après mise en demeure infructueuse, la banque a assigné le dirigeant à raison de sa qualité de caution personnelle et solidaire, aux fins de paiement du solde de la dette de la société débitrice.
La caution a invoqué pour sa défense la disproportion des cautionnements litigieux de l'article L341-4 du code de la consommation.
En effet, la banque ne justifiait nullement s'être enquis de la situation de la caution lors de la conclusion des cautionnements.
Or, au terme d'un audit financier, les cautionnements donnés étaient nettement disproportionnés au jour de leur conclusion, malgré l'existence d'immeubles indivis.
Les juges ont ainsi déchu la banque du droit de se prévaloir de ses deux cautionnements.
La caution a ainsi échappé à sa condamnation au paiement personnel de la dette de la société débitrice.
Le litige sur la question de la disproportion du cautionnement porte en pratique sur l'analyse de la situation de revenus et de patrimoine à prendre en considération à l'époque de la souscription des cautionnements et à l'époque où ces engagements sont appelés.
L'analyse de la disproportion d'un cautionnement suppose l'étude de la situation financière et patrimoniale de la caution au jour de la conclusion de son engagement, qui résulte d'un savoir-faire plus que de règles théoriques.
C'est au cas par cas, selon les documents des banques car les agences elles-mêmes varient dans leur processus d'octroi de crédits.
Les dispositions de l'article L.341-4 du code de la consommation s'appliquent même aux dirigeants de société et donc aux cautionnements professionnels.
La faute commise par l'établissement financier est toujours la même : il ne se renseigne pas correctement sur la situation patrimoniale de la caution.
Même si la vérification des informations n'est pas imposée, les banques se doivent a minima de faire remplir des formulaires de renseignement précis et détaillé sur les revenus, le patrimoine et l'état d'endettement de la caution.
Ce devoir se répercute sur le respect du devoir de mise en garde du banquier prêteur envers la caution.
Le manquement au devoir de mise en garde envers la caution n'est pas conditionné au caractère profane et non averti la caution.
La caution peut ainsi invoquer en tout état de cause la disproportion du cautionnement pour obtenir des dommages-et-intérêts devant venir en compensation pour les cautionnements antérieurs à 2002 et en complément pour les cautionnements postérieurs à 2002.
La disproportion des cautionnements ne doit pas être invoquée obligatoirement en première instance et peut l'être en appel, par application de l'article 564 du code de procédure civile qui dispose que les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation ou faire écarter les prétentions adverses.
La disproportion des cautionnements se prescrit par cinq ans à compter du jour où le cautionnement est mis en oeuvre par le créancier, soit en pratique du jour de la mise en demeure adressée à la caution.
Ainsi, aucune prescription n'est susceptible de pouvoir être acquise dans les continue dans la mesure où la banque dispose d'un délai plus court pour agir.
La banque ne peut donc jamais s'exonérer de sa responsabilité recherchée au titre de la conclusion d'un cautionnement disproportionné du fait de l'écoulement du temps, au contraire.
La faute commise par la banque cause nécessairement préjudice à la caution qui est poursuivie et tenu à paiement au titre de ce cautionnement.
Ce préjudice doit correspondre à la part de l'engagement souscrit manifestement hors de proportion avec la surface financière de la caution.
Enfin, il convient de garder en mémoire qu'en cas de cautionnement manifestement disproportionné aux revenus et biens des cautions, la banque doit rapporter la preuve que le patrimoine de la caution permet à celle-ci de faire face à son obligation au jour où elle est appelée.
Or, en pratique, les banques ne rapportent que très rarement la preuve que le patrimoine de la caution lui permet de faire face à son obligation au jour où elle est appelée, se contentant de produire éventuellement des documents insuffisants pour établir la valeur des biens de la caution.
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Anthony Bem
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