Une société de gestion (ou société de gestion de portefeuille) est une société dont l’activité est de procéder à des investissements dans des instruments financiers pour le compte de clients, qu’il s’agisse de clients particuliers ou d’investisseurs institutionnels.
Dans le cadre de leur relation un contrat de mandat de gestion est conclu entre la société de gestion et son client.
Cependant, ces sociétés peuvent commettre des fautes, en dépassant leur mandat de gestion et devoir indemniser leurs clients de leurs préjudices en cas de pertes financières subies par ces derniers.
Le 6 décembre 2017, la Cour de cassation s’est prononcée sur les modalités d’appréciation du préjudice résultant du dépassement par une société de gestion de son mandat de gestion de portefeuille d’investissement.
La Haute juridiction a jugé que :
« Le préjudice causé par le non-respect d’un mandat de gestion est constitué par les pertes financières nées des investissements faits en dépassement du mandat indépendamment de la valorisation éventuelle des autres fonds investis par le gestionnaire et de l’évaluation globale du reste du portefeuille géré conformément au mandat » (Cour de cassation, chambre commerciale, 6 décembre 2017, N° de pourvoi : 16-23.991).
En l’espèce, un contrat de mandat de gestion de portefeuille est intervenu entre un investisseur (le mandant) et une société de gestion (le mandataire).
Dans les clauses du mandat, les parties ont pris le soin de préciser que « l’objectif assigné à la gestion était d’obtenir la valorisation du capital confié sans prendre de risque ».
Le client avait ainsi sélectionné un « profil prudent investi à 100 % en obligations convertibles de bonne qualité ».
Or, le gérant a investi en 2010 dans des obligations émis par l’Etat grec.
Après avoir résilié le contrat de mandat et cédé ses titres, le mandant a constaté une moins-value.
Selon lui, cette moins-value était due à une faute de gestion commise par le mandataire, laquelle consistait en un dépassement de ses pouvoirs de gestion.
Il a donc assigné le mandataire afin d’obtenir en justice la réparation de ses préjudices subis.
Dans un premier temps, les juges d’appel ont considéré que le contrat de mandat de gestion n'a pas été respecté et condamné la société de gestion à payer des dommages et intérêts à son client.
En effet, les juges d’appel ont notamment estimé que certains des titres choisis par le mandataire ne répondaient pas aux orientations souhaitées par le client à la volonté d'absence de risque.
La société de gestion a vainement tenté de se défendre en contestant l’existence de préjudice dès lors qu’un avantage financier résultant de la gestion d’un autre portefeuille est venu compenser la perte financière.
C’est dans ce contexte que la cour de cassation a posé les deux principes selon lesquels :
«le préjudice causé par le non-respect d'un mandat de gestion est constitué par les pertes financières nées des investissements faits en dépassement du mandat, indépendamment de la valorisation éventuelle des autres fonds investis et de l'évolution globale du reste du portefeuille géré conformément au mandat »
«le préjudice causé par la faute ainsi caractérisée était constitué par la perte financière constatée lors de la cession des titres litigieux et par celle de tout rendement de ces investissements ».
Il résulte de cette décision que le préjudice causé par la violation du mandat de gestion est constitué dès qu’il existe des pertes financières en cas investissements faits en dépassement du mandat.
La valorisation éventuelle des autres fonds investis et l’évolution globale du reste du portefeuille géré conformément au mandat ne saurait compenser les pertes subies du fait du dépassement du mandat de gestion.
En effet, si l’on admet l’hypothèse contraire, c’est-à-dire l’admission d’une appréciation globale qui consisterait à compenser les pertes financières par la plus-value issue de la gestion globale du reste du portefeuille géré conformément au contrat, la faute commise ne serait pas sanctionnée.
C’est comme si on compensait les conséquences d’une faute de gestion par les profits réalisés par une gestion normale.
Cela consisterait en pratique à mettre sur un même plan les actes de gestion conformes au mandat de gestion et les fautes commises dans la gestion, ce qui n’est bien évidement pas envisageable tant en fait qu’en droit.
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Anthony Bem
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