En l’espèce, un céréalier français s’est intoxiqué après avoir inhalé des vapeurs d’un puissant herbicide, commercialisé sous le nom « Lasso » par la tristement célèbre société Mosanto.
Le céréalier est tombé gravement malade et dans le coma à plusieurs reprises.
Pour cause, ce produit contenait une substance hautement toxique appelée le chlorobenzène.
Le chlorobenzène a été postérieurement interdit en France (en 2007).
Les juges de première instance et d’appel ont déclaré la société Mosanto responsable de l’intoxication dont a été victime le céréalier.
Cependant, la société Mosanto a formé un pourvoi devant la Cour de cassation contre sa condamnation en invoquant le fait que le céréalier ne pouvait pas ignorer la dangerosité et la toxicité du produit dont il s’agit.
La Haute Cour a annulé l’arrêt d’appel et renvoyé l’affaire devant la Cour d’appel de Lyon sur une question de divergence de fondements juridiques applicables.
Le 11 avril 2019, la Cour d'appel de Lyon a jugé que la société Mosanto devait mettre en jeu sa responsabilité envers le céréalier pour ne pas avoir apposé une mention sur la dangerosité spécifique des travaux dans les cuves et réservoirs sur l’étiquetage et/ou l’emballage du produit. (Cour d’Appel de Lyon, 11 avril 2019, n° 17/06027)
Il est intéressant de souligner que les juges lyonnais n’ont pas été dans le même sens que la Cour de cassation puisqu’ils ont refusé de considérer que la responsabilité de la société Monsanto était fondée sur la défectuosité du produit.
A cet égard, la cour d’appel de Lyon a considéré « qu’un produit est défectueux lorsqu’il n’offre pas la sécurité à laquelle on peut légitiment s’attendre ; Que dans l’appréciation de la sécurité à laquelle on peut légitiment s’attendre, il doit être tenu compte de toutes les circonstances et notamment de la présentation du produit, de l’usage qui peut en être raisonnablement attend et du moment de sa mise en circulation ; (...) un produit dangereux n’est pas nécessairement défectueux, ;’il n’y a donc pas lieu de s’attarder à déterminer si le Lasso est défectueux du seul fait de sa toxicité intrinsèque composé de l’alachlore » (Cour d’Appel de Lyon, 11 avril 2019, n° 17/06027)
En outre, les conseillers de la Cour d’appel de Lyon ont mis en avant la particularité de la publicité relative à l’information des produits antiparasitaires à usage agricole, dénommés phytopharmaceutiques.
Pour mémoire, afin d’assurer la sécurité des utilisateurs les fabricants de ce type de produits doivent notamment :
- apposer des mentions appropriées sur les substances actives,
- rappeler la dangerosité du produit,
- indiquer les précautions à prendre pour leur usage y compris pour l’environnement et les animaux
Or, s’agissant concrètement du Lasso de la société Monsanto, celle-ci n’indiquait pas les risques liés à l’inhalation du monochlorobenzène ; pas davantage que la préconisation d’appareils de protection respiratoire lors de travaux dans les cuves et réservoirs.
Dans ce contexte, les juges ont estimé que l’étiquetage du produit Lasso ne répondait pas à la règlementation en vigueur.
En l’absence d’un étiquetage suffisant, les juges ont conclu que le produit n’offrait pas aux utilisateurs la sécurité à laquelle ils pouvaient légitiment s’attendre, étant observé qu’il importe peu que l’utilisateur soit ou non un professionnel averti.
Cet arrêt est important puisqu’il est le premier à retenir la responsabilité de la société Monsanto suite à l’utilisation de ses produits en France.
Il s’inscrit dans le prolongement des décisions récemment rendues aux Etats-Unis où la société Montanso a pu être condamnée à verser la somme de 80,8 millions$ à un utilisateur victime d’un produit herbicide similaire au Lasso.
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Anthony Bem
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