Conditions et effets du recel successoral sur le partage de la succession entre les héritiers

Publié le Modifié le 09/07/2012 Vu 6 148 fois 0
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Le 20 juin 2012, la Cour de cassation a posé le principe selon lequel un héritier ne peut être privé de sa part dans les biens ou droits successoraux qui ont été recelés ou divertis par un autre cohéritier. L'appréciation du recel successoral se fait au cas par cas et selon les faits de l'espèce (Cass. Civ. I, 20 juin 2012, N° de pourvoi: 11-17383)

Le 20 juin 2012, la Cour de cassation a posé le principe selon lequel un héritier ne peut être privé de sa

Conditions et effets du recel successoral sur le partage de la succession entre les héritiers

Pour mémoire, les effets du recel successoral sont prévus par le code civil.

Ainsi, selon l’article 778 du code civil :

« Sans préjudice de dommages et intérêts, l'héritier qui a recelé des biens ou des droits d'une succession ou dissimulé l'existence d'un cohéritier est réputé accepter purement et simplement la succession, nonobstant toute renonciation ou acceptation à concurrence de l'actif net, sans pouvoir prétendre à aucune part dans les biens ou les droits détournés ou recelés. Les droits revenant à l'héritier dissimulé et qui ont ou auraient pu augmenter ceux de l'auteur de la dissimulation sont réputés avoir été recelés par ce dernier.

Lorsque le recel a porté sur une donation rapportable ou réductible, l'héritier doit le rapport ou la réduction de cette donation sans pouvoir y prétendre à aucune part.

L'héritier receleur est tenu de rendre tous les fruits et revenus produits par les biens recelés dont il a eu la jouissance depuis l'ouverture de la succession ».

En l’espèce, Madame A soutenait que ses deux sœurs, Madame Y et Madame Z avaient diverti une somme importante de la succession de leur père, au moyen de chèques tirés sur le compte postal et le compte bancaire de leur père, sur lesquels Madame Y disposait d’une procuration.

Madame A les a donc assignées en liquidation et partage de cette succession et a demandé qu’elles soient condamnées à rapporter ladite somme et privées de toute part sur celle-ci.

Les juges d’appel ont accueilli favorablement cette demande en décidant que Madame Z devra rapporter à la succession la somme correspondant à la totalité des sommes recelées dans la succession de son père et qu’elle sera privée de tout droit et de toute part sur la dite somme, tout en constatant que sa sœur, Madame Y, a bénéficié d’une donation et s’est octroyée des sommes, ce dont il résultait que pour ces sommes le recel n’était pas imputable à Madame Z.

Mesdames Y et Z ont vainement soutenu que les sommes débitées correspondaient au remboursement de frais engagés pour le compte de leur père, ainsi qu’à la rémunération de leurs services et notamment, malgré son activité professionnelle, de la disponibilité totale de Madame Y, “ 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7 pendant 8 ans et demi “ pour son père qui a ainsi permis d’éviter la solution la plus onéreuse de son placement dans un établissement de séjour, puisqu’au décès de leur mère il était incapable de vivre seul.

La cour de cassation a confirmé l’arrêt d’appel en jugeant que

« pour contester le recel qui leur était imputé, Mme Y... et Mme Z... faisaient, l’une et l’autre, valoir que leur père avait fait don à chacune d’elles de la somme de 50 000 euros en rémunération de services qu’elles prétendaient lui avoir rendus, la cour d’appel, constatant que les intéressées, qui avaient refusé de fournir au notaire chargé de la liquidation de la succession des explications sur l’emploi de chèques bancaires émis à leur bénéfice, ne produisaient aucun élément de preuve propre à justifier des dépenses qu’elles prétendaient avoir engagées pour le compte de leur père, a estimé qu’elles avaient, par des manœuvres frauduleuses, diverti la somme litigieuse des effets de la succession de celui-ci ; qu’elle [la cour d'appel] a ainsi caractérisé la connaissance qu’avait chacune d’elles du recel commis par l’autre et en a exactement déduit que l’une et l’autre ne pouvaient prétendre à aucune part sur ladite somme »

Ce qui a péché dans l’argumentation des héritières est que :

- elles ont été incapables de produire la moindre pièce justifiant des dépenses qu’elles auraient engagées pour le compte de leur père ;

- la procuration dont Madame Y disposait sur les comptes de son père lui permettait de régler les frais de celui-ci sans avoir à en faire l’avance sur ses deniers mais aussi lui imposait de rendre compte de l’emploi des sommes dépensées, ce qu’elle ne fait pas ;

- le défunt avait séjourné dans un établissement de long séjour jusque son décès, alors que pourtant et notamment Madame Y s’octroyait des versements importants au moyen de chèques tirés sur le compte postal de son père, rédigés et signés par elle ;

- les facultés mentales du défunt étaient gravement altérées au point d’empêcher absolument toute expression de sa volonté de sorte que la “ rémunération “ et les “ dons “ dont elles ont profité ne pouvaient être l’expression de la volonté de leur père.

Par conséquent, il est recommandé aux héritiers utilisant les comptes de leurs parents de se préconstituer la preuve des dépenses engagées pour le compte de ces derniers afin de rendre compte de l’emploi des sommes dépensées surtout lorsque leurs facultés mentales sont altérées sauf à devoir les rapporter à la succession être privés de tout droit et de toute part sur ces sommes.

Enfin pour mémoire, il conviendra de retenir qu'en cas de connaissance du recel successoral commis par un héritier des héritiers, les autres héritiers ne pouvent prétendre à aucune part sur les sommes objet du recel comme s'ils les avaient eux-mêmes commis.

Je suis à votre disposition pour toute information ou action.

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Anthony Bem
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