Conditions de validité des clauses de mobilité insérées dans les contrats de travail des salariés

Publié le 10/07/2012 Vu 9 888 fois 0
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Le principe est que le changement du lieu de travail constitue une modification du contrat de travail. Les clauses de mobilité doivent respecter des conditions très strictes pour pouvoir être valablement utilisées et opposées aux salariés par leurs employeurs.

Le principe est que le changement du lieu de travail constitue une modification du contrat de travail. Les cla

Conditions de validité des clauses de mobilité insérées dans les contrats de travail des salariés

Le changement du lieu de travail constitue une modification du contrat de travail.

La jurisprudence a eu l’occasion de juger que l’employeur ne peut pas imposer à son salarié de changer son lieu de travail par l’insertion d’une clause de mobilité géographique dans le contrat de travail trop large.

Le principe est donc que, pour être valable et opposable au salarié, la clause de mobilité doit définir de façon précise sa zone géographique d’application.

Ainsi, lorsqu’il signe son contrat de travail, le salarié doit pouvoir identifier la zone géographique où il risque ultérieurement d’être muté.

Enfin, l’employeur ne peut pas étendre unilatéralement la portée de la clause de mobilité et ce, même si le contrat de travail prévoyait cette possibilité.

La modification de l’étendue de la clause de mobilité, suppose que l’employeur obtienne l’accord préalable et exprès du salarié sur la mutation proposée.

A défaut, le refus du salarié d’accepter la mutation n’est pas fautif et il ne peut donc pas être sanctionné de ce chef.

De plus, les salariés licenciés sur la base de telles clauses pour un refus de mutation pourront obtenir des dommages et intérêts pour licenciement abusif devant le conseil de prud’hommes.

Le 3 mai 2012, la Cour de cassation a jugé, par trois décisions, que la validité de la clause de mobilité des salariés est conditionnée, nécessite le respect d’un délai de prévenance et le respect d’une obligation de bonne foi.

I - Les conditions de validité de la clause de mobilité (n° 11-10.143) :

Selon la Cour de Cassation, la validité des clauses de mobilité est conditionnée à la définition précise d’une zone géographique d’application.

La Cour de Cassation juge ainsi qu’une clause de mobilité insuffisamment précise ne peut être valablement opposé à un salarié réfractaire à sa mobilité.

En l’espèce, le contrat de travail stipulait que l’intéressé s’engageait « à travailler sur les différents chantiers, présents et futurs, de la société ATI, au fur et à mesure des affectations qui lui seront données. M. X… effectuera tous les déplacements professionnels inhérents à son emploi, selon les instructions de la société ATI ».

L’employeur lui avait, à plusieurs reprises, demandé de se rendre à Saint-Victor pour la reprise du travail sous peine d’être considéré en abandon de poste.

Les premiers juges ont considéré qu’aucun lieu d’exécution spécifique n’était prévu par le contrat de travail, l’objet de la société et l’emploi de M X impliquant une certaine disponibilité géographique ou mobilité.

Le salarié démontrait que sa nouvelle affectation n’était pas justifiée par l’intérêt de l’entreprise et portait une atteinte disproportionnée et illégitime à son droit à une vie personnelle et familiale.

Ainsi, le changement d’affectation était constitutif d’une modification de son contrat de travail.

Dans ce contexte, la Haute cour a jugé que :

« la clause de mobilité ne comportait aucune précision sur sa zone géographique d’application, d’autre part, que l’employeur, à qui cela incombe, n’avait pas justifié de ce que la nouvelle affectation était occasionnelle, motivée par l’intérêt de l’entreprise et justifiée par des circonstances exceptionnelles, et que le salarié avait été informé préalablement dans un délai raisonnable de son caractère temporaire et de sa durée prévisible ».

Ainsi, l’employeur ne peut imposer au salarié une obligation de changement de domicile, sauf circonstance exceptionnelle et indispensable à la protection des intérêts légitimes de l’entreprise.

Il incombera au salarié de démontrer que la décision de mobilité est gouvernée par des raisons étrangères à cet intérêt, ou bien qu’elle a été mise en œuvre dans des conditions exclusives de la bonne foi contractuelle et qu’elle vise, en réalité, à conduire vers la rupture du contrat si le salarié, notamment pour des raisons personnelles, ne peut accepter cette mutation.

A cet égard, l’employeur doit prendre en compte la situation personnelle du salarié et l’usage abusif peut être caractérisé lorsque la demande de mobilité intervient à un moment de la vie personnelle du salarié n’est pas propice à un déménagement.

Dans pareille circonstances, le licenciement qui s’ensuit pourra éventuellement être considéré comme illégitime.

II - Le respect d’un délai de prévenance (n° 10-25.937) :

En l’espèce, une salariée a refusé une affectation prétendument conforme aux clauses de son contrat de travail.

Les juges d’appel ont été censuré par la cour de cassation pour avoir considéré que :

- le contrat de travail prévoit expressément outre une clause de mobilité, la zone géographique à l’intérieur de laquelle elle s’exercera à savoir la région parisienne et que Guyancourt (78) se trouve manifestement dans cette région,

- suivant courrier remis en main propre et signé par l’intéressée, il lui était indiqué que l’exercice de ses fonctions s’effectuerait sur le site de Guyancourt

- cette modification constitue un simple changement des conditions de travail et non une modification d’un élément essentiel de son contrat,

- son licenciement prononcé régulièrement pour cause réelle et sérieuse est fondé.

En effet, la Haute cour a jugé que l’employeur est tenu de respecter « un délai de prévenance » et être de « bonne foi dans la mise en œuvre de la clause de mobilité » conformément à l’article 1134 du code civil selon lequel « les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ».

Par conséquent, l’employeur doit respecter un délai suffisant entre le moment où le salarié est informé de sa mutation et la date effective à laquelle celle-ci intervient.

Il n’existe pas de délai minimun pour mettre à exécution la clause de mobilité.

Tout dépend des circonstances individuelles, de l’importance pour le salarié du changement que provoque sa mutation et d’éléments tels que son ancienneté dans l’entreprise, l’éloignement de sa nouvelle affectation, sa situation familiale, etc…

A défaut de respect d’un délai de prévenance suffisant, la mise en œuvre de la clause peut être considérée comme abusive et le salarié est en droit de refuser sa nouvelle affectation.

III - Les conditions de la mobilité d'un salarié en l’absence de clause de mobilité (n° 10-27152) :

En l’espèce, la Cour de cassation a jugé qu’un salarié qui refuse sa mobilité dans le même secteur géographique (distance de 15km) ne commet pas une faute grave justifiant son licenciement pour cause réelle et sérieuse :

La Haute cour censure l’arrêt d’appel qui avait considéré que le nouveau lieu de travail, qui n’était éloigné de l’ancien que de quinze kilomètres, se trouvait, compte tenu de cette faible distance, dans le même secteur géographique que le précédent.

Par conséquent, l’absence du salarié en raison du refus injustifié de se rendre sur son nouveau lieu de travail ne caractérise pas un abandon de poste constitutif d’une faute grave :

« Le refus par un salarié d’un changement de ses conditions de travail, s’il rend son licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse, ne constitue pas à lui seul une faute grave » justifiant son licenciement.

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