La confusion des patrimoines de sociétés peut survenir :
- entre deux ou plusieurs sociétés d’un même groupe en cas d’imbrication du passif et de l’actif de ces sociétés et d'enrichissement illégitime de l'une tandis qu’une autre s’est appauvrie sans cause ;
- lorsqu'une société civile immobilière (SCI) donne en location un immeuble à une société commerciale d’exploitation qui y exerce son activité.
Par ailleurs, les procédures collectives de sauvegarde, redressement ou liquidation judiciaires ne concernent que les sociétés qui en font l’objet et n’atteignent que leur patrimoine personnel.
Mais les créanciers de l'une d'entre elles peuvent souhaiter l’extension de la procédure collective d’une de ces sociétés pour augmenter leur chance d’être réglés de leur créance.
Ainsi, en cas de confusion de patrimoines entre deux sociétés ou avec une société fictive, le patrimoine de l’autre société viendra s’ajouter à celui de la première, souvent insuffisant pour répondre des dettes.
Pour ce faire, les créanciers doivent démontrer l’existence d’éléments caractérisant une relation financière anormale ou des flux financiers anormaux entre les sociétés concernées.
Concrètement, il suffit de prouver que l’une des sociétés s’est enrichie illégitimement tandis qu’une autre s’est appauvrie sans cause
La Cour de cassation vient de juger, le 13 septembre 2011, que lorsque les patrimoines de deux sociétés se confondent, la procédure collective ouverte à l’encontre de l’une peut être étendue à l’autre « peu important l’absence de mouvements de fonds entre elles » et ainsi qu’une relation financière anormale peut être établie même en l’absence de mouvements de fonds entre les sociétés concernées. (Cass. Com., 13 septembre 2011, N° de pourvoi: 10-24536).
En l'espèce, la société System’D, locataire commercial de la société civile immobilière Just’In (la SCI), ayant été mise en liquidation judiciaire, le liquidateur a assigné la SCI, afin que lui soit étendue cette procédure, pour confusion de leurs patrimoines.
Les juges d'appel avaient retenu la confusion des patrimoines entre les deux sociétés compte tenu de l’existence de flux financiers anormaux entre les deux sociétés car la société System’D avait pris en charge les travaux d’aménagement des locaux qui lui étaient loués pour un montant de 91 438 euros.
Devant la Cour de cassation, la SCI prétendait que :
- l’existence de flux financiers anormaux constitue un critère de la confusion des patrimoines dans la mesure seulement où des mouvements de fonds sans contrepartie réelle peuvent être établis entre la société en redressement ou liquidation judiciaires et la société à l’encontre de laquelle une demande en extension de procédure collective a été formé et si ces flux procèdent d’une volonté systématique de créer une confusion des patrimoines, de telle sorte qu’une dissociation entre les sociétés s’avère impossible.
- un flux financier entre deux sociétés ne peut présenter un caractère anormal, révélateur d’une confusion de patrimoines, que s’il est dépourvu de contrepartie ; qu’en l’espèce, la société System D bénéficiait aux termes du bail de la jouissance exclusive pendant toute la durée du bail des aménagements et travaux d’amélioration qu’elle avait effectués à ses frais dans les lieux litigieux, ce qui constituait une contrepartie sérieuse à cette dépense, laquelle ne pouvait profiter au bailleur, la SCI, qu’en fin de bail.
Mais les juges de la Cour de cassation n'ont pas retenu ces arguments en considérant que :
« dépassant la seule obligation, qui lui était imposée par le bail, d’effectuer les grosses réparations au sens de l’article 606 du code civil, la société System’D a supporté, en plus du loyer, la charge d’importants travaux d’aménagement, intérieur et extérieur, de l’immeuble loué pour un coût équivalent à six années de loyers, qu’elle a dû partiellement financer par le recours à l’emprunt, tandis que la SCI, au terme du bail, devenait, sans aucune indemnité, propriétaire de tous les aménagements ; qu’en l’état de ces constatations et appréciations caractérisant des relations financières anormales entre les deux sociétés, peu important l’absence de mouvements de fonds entre elles relatifs aux travaux d’aménagement , la cour d’appel a légalement justifié sa décision ».
La Haute juridiction a donc validé l'extension de la procédure de liquidation judiciaire de la société SYSTEM’D à la société JUST’IN du fait de la confusion de patrimoine entre ces deux sociétés.
Je suis à votre disposition pour toute information ou action.
PS : Pour une recherche facile et rapide des articles rédigés sur ces thèmes, vous pouvez taper vos "mots clés" dans la barre de recherche du blog en haut à droite, au dessus de la photographie.
Anthony Bem
Avocat à la Cour
27 bd Malesherbes - 75008 Paris
Tel : 01 40 26 25 01
Email : abem@cabinetbem.com