Dans la première affaire (N° de pourvoi: 11-19259) :
Madame X a assigné, sur le fondement du trouble anormal de voisinage, les sociétés SFR et Orange France devant le tribunal de grande instance de Paris afin d’obtenir leur condamnation à lui payer diverses sommes d’argent en réparation de son trouble de jouissance et de son préjudice physique et moral et à procéder au blindage de son appartement, en alléguant des troubles d’électro-hypersensibilité qu’elle attribuait à l’installation d’antennes-relais de téléphonie mobile dans son quartier.
Indépendamment du fond de l’affaire, la Cour d’appel de Paris a considéré que les juges judiciaires étaient compétents pour statuer sur les demandes de Madame X.
La cour de cassation a validé l’arrêt d’appel en jugeant que « l’action portée devant le juge judiciaire, quel qu’en soit le fondement, aux fins d’obtenir l’interruption de l’émission, l’interdiction de l’implantation, l’enlèvement ou le déplacement d’une station radioélectrique régulièrement autorisée et implantée sur une propriété privée ou sur le domaine public … le juge judiciaire reste cependant compétent, sous réserve d’une éventuelle question préjudicielle, pour connaître des litiges opposant un opérateur de communications électroniques à des usagers ou à des tiers aux fins d’indemnisation des dommages causés par l’implantation ou le fonctionnement d’une station radioélectrique qui n’a pas le caractère d’un ouvrage public »
Or, les antennes-relais, qui sont la propriété de personnes morales de droit privé, participent à une activité d’intérêt public ne peut suffire à les qualifier d’ouvrage public.
Surtout, pour prétendre à la qualification d’ouvrage public, ces antennes devraient, pour le moins, présenter un caractère immobilier par nature ou par destination, ce qui n ‘est pas le cas en ce qui les concerne puisqu ‘elles peuvent être démontées ou remplacées.
Dans la seconde affaire (N° de pourvoi: 10-26854) :
Madame Y a assigné la société Orange France afin qu’il soit interdit à celle-ci de procéder à la mise en oeuvre d’un projet d’implantation d’antennes-relais Orange sur une parcelle de terrain située à Loctudy (Bretagne), en arguant de sa crainte que ce projet soit de nature à exposer un implant dont elle est porteuse à des champs électromagnétiques de nature à en perturber le fonctionnement.
La Cour d’appel de Rennes a considéré que la juridiction judiciaire était compétente pour connaître de la demande en considérant que le démantèlement de l’installation ne saurait constituer une atteinte à une autorisation administrative.
Cependant, la cour de cassation a considéré que la juridiction judiciaire était incompétente pour connaître du litige.
En effet, la Haute Cour a jugé que « le principe de la séparation des autorités administrative et judiciaire s’oppose à ce que le juge judiciaire, auquel il est ainsi demandé de contrôler les conditions d’utilisation des fréquences radioélectriques au regard des nécessités d’éviter les brouillages préjudiciables et de protéger la santé publique et, partant, de substituer, à cet égard, sa propre appréciation à celle que l’autorité administrative a portée sur les mêmes risques ainsi que, le cas échéant, de priver d’effet les autorisations que celle-ci a délivrées, soit compétent pour connaître d’une telle action »
La cour ajoute qu’« une antenne-relais n’est ni un ouvrage immobilier ni le résultat d’un aménagement particulier ou d’une opération de travaux publics mais la propriété de l’opérateur, personne morale de droit privé, de sorte qu’elle ne saurait être considérée comme un ouvrage public »
Ainsi, lorsque la demande tend à interdire à un opérateur de téléphonie mobile de mettre en place son projet d’implantation d’une antenne-relais, il s’agit d’un « litige relatif » à l’autorisation « comportant occupation du domaine public » hertzien de l’Etat, au sens de l’article L 2331-1 du code général des personnes publiques de la compétence de la juridiction administrative.
Pour conclure :
- l'action tendant à d'obtenir l'interruption de l'émission, l'interdiction de l'implantation, l'enlèvement ou le déplacement d'une station radioélectrique régulièrement autorisée et implantée sur une propriété privée ou sur le domaine public, au motif que son fonctionnement serait susceptible de compromettre la santé des personnes vivant dans le voisinage ou de provoquer des brouillages implique, en raison de son objet même, constitue une immixtion dans l'exercice de la police spéciale dévolue aux autorités publiques compétentes en la matière et relève de la compétence du juge administratif.
- l’action qui n'est pas relative à l'occupation du domaine public hertzien de l'Etat par les opérateurs de téléphonie mobile ou un manquement de la part de la société de téléphonie mobile aux normes administratives mais qui a pour finalité d'assurer la protection personnelle du demandeur et la réparation de son préjudice relève de la compétence du juge judiciaire.
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Anthony Bem
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