En l’espèce, la société Beemoov exerce une activité d'édition de jeux virtuels en ligne, dont le jeu Ma Bimbo, simulation de mode sur internet et est notamment titulaire des marques Ma Bimbo,
La société Beemoov a découvert que la société Jurovi, spécialisée dans l'édition de jeux électroniques, avait mis en ligne le site internet accessible à l'adresse www.fashiondeez.com présenté comme étant « le premier jeu de simulation de vie regroupant la mode et le look », sur la page d'accueil duquel apparaissait à plusieurs reprises le signe Bimbo, en particulier dans l'expression Bimbo's Store.
La société Beemoov a donc assigné la société Jurovi en contrefaçon de marques et concurrence déloyale et parasitaire.
La société Jurovi se défendait en faisant valoir que le mot Bimbo, qui figurait sur la page d'accueil de son site internet, consistait dans une référence aux « dernières tendances look », parmi d'autres termes tels que Rock ou Lolita et que le Bimbo's Store n'est que l'un des magasins virtuels présent sur son site.
Sur la contrefaçon des marques Ma Bimbo le tribunal a rappelé les dispositions de l'article L.713-3 du code de la propriété intellectuelle selon lequel « sont interdits, sauf autorisation du propriétaire, s'il peut en résulter un risque de confusion dans l'esprit du public (...) b) l'imitation d'une marque et l'usage d'une marque imitée, pour des produits ou services identiques on similaires à ceux désignés dans l'enregistrement ».
Mais le tribunal a estimé que :
« il s'agit non de l'usage d'un signe à titre de marque, qui aurait pour but de distinguer l'origine et la nature des produits proposés à la clientèle de ceux provenant de la concurrence, mais de la simple utilisation d'un mot, qui en langage commun signifie, d'après le Dictionnaire du look cité par la société Jurovi, une « jeune femme sympathique habillée de manière sexuellement ostentatoire », peu important en l'espèce, contrairement à ce que soutient la société demanderesse, que ce terme désigne habituellement des jeunes femmes et non des poupons, ainsi que le site en cause les représente ».
Dès Lors, sans qu'il soit nécessaire de se livrer à une comparaison des signes et des produits et services ni d'examiner le risque éventuel de confusion, les demandes présentées au titre de la contrefaçon de marques seront rejetées », tout comme celles relatives à la concurrence déloyale pour reprise du nom de domaine.
Par ailleurs, s’agissant des actes de concurrence déloyale, la reprise de plusieurs éléments du contenu du site www.ma-bimbo.com était invoquée.
Les différents éléments du site internet en litige étaient que :
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les onglets du menu de la page d'accueil, à savoir accueil forum inscription et démo sont non seulement les mêmes, mais encore ordonnés de la même manière,
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il y a un accès direct à Facebook en bas de la page d'accueil sur les deux sites,
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de nombreux vocables de son site en particulier alimentation, classement, chambre, défi, mode, jeu virtuel, faim, soif sont repris sur le site litigieux,
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on retrouve des intitulés similaires pour les forums tels que l'actualité du jeu, le bal des filles ou le coin des mecs,
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plusieurs boutiques sont reprises,
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le site litigieux est fondé sur le même schéma économique que le sien, utilise le même schéma de fonctionnement et reprend son architecture, notamment une monnaie virtuelle,
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il reprend à son compte certaines phrases et certains slogans.
En outre, ces reprises ne devaient rien au hasard puisque tous les protagonistes se connaissaient personnellement.
La société Jurovi, sans contester une certaine similarité, estimait qu'elle serait commune à tous les jeux de simulation de vie, et dictée par des nécessités fonctionnelles.
« Néanmoins, s'il est indéniable que bon nombre de fonctionnalités sont inhérentes à ce genre de jeux virtuels, force est de constater que certains vocables que l'on retrouve sur le site de la société défenderesse comme sur celui de la société Beemoov, tels que alimentation, défi, chambre, mode n'étaient pas sur le site antérieur ni sur les autres sites montrés à titre d'exemple, étant précisé à ce propos qu'on ignore si le site Stardoll avait la même présentation à son origine que lors du constat en 2012.
Il en est de même d'intitulés tels que le bar des filles ou le coin des mecs ou encore pour certaines boutiques, telle que celle du tatoueur qui n'apparaît pourtant pas courante ou évidente.
Par ailleurs la société Jurovi ne précise pas en quoi ces vocables, intitulés ou boutiques seraient, comme elle l'allègue, dictés par les nécessités fonctionnelles de ce type de jeux.
Dès lors, sans qu'il y ait lieu d'examiner l'empreinte de la personnalité de ces éléments, puisqu'il ne s'agit pas là de protéger une œuvre de l'esprit, il apparaît que cette reprise, liée au fait que les personne physiques se connaissent les unes et les autres, ce qui n'est pas sérieusement contesté en défense, présente par son aspect généralisé un caractère fautif constitutif de la concurrence déloyale ».
Par ailleurs, la société Beemoov faisait valoir que la société Jurovi a également repris une partie importante de ses conditions générales d’utilisation du jeu Ma Bimbo.
A cet égard, le tribunal a estimé que :
« Certes, les rubriques de ces conditions générales, à savoir définitions, inscription, fonctionnement, forum, obligations des parties, responsabilité, propriété intellectuelle, résiliation, protection des données, modifications et dispositions générales sont communément présentes dans différents sites internet.
Il n'en demeure pas moins que leur contenu varie cependant, et fort heureusement selon les sites internet, et qu'en l'espèce la société défenderesse ne peut contester avoir repris certains passages en entier au site internet de la demanderesse.
Alors que la société Beemoov a engagé des frais pour personnaliser ces rubriques et donc individualiser ses conditions générales, la société Jurovi a donc pu, sans bourse délié introduire des conditions générales d'utilisation sur son site, comportement fautif caractérisant là encore la déloyauté de la concurrence ».
Enfin, le tribunal a jugé que la société Jurovi a trompé le consommateur et s’est rendue coupable de publicité trompeuse pour avoir publié sur son site internet le slogan « Découvre Fashion Deez le premier jeu de simulation de vie regroupant la mode et le look », sans préciser en quoi son site internet serait en quoi que ce soit le premier :
« le qualificatif de premier qui se rapporte non à une notion subjective, contrairement à ce que voudrait laisser penser la société défenderesse mais bien à un critère ayant trait soit à l'ancienneté, soit à l'audience ou à la fréquentation, doit donc être manié avec précaution, faute de quoi il serait de nature à laisser croire à l'internaute en l'existence de qualités imaginaires ».
Il résulte de cette décision qu’en cas de copie de sites internet ou de conditions générales de jeux et de publicité mensongère, les juges procèdent respectivement à une véritable comparaison et analyse pour condamner leur auteur sur le fondement de la concurrence déloyale.
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Anthony Bem
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