Il existe plusieurs délais de prescription pour la défense des cautions (2 ans ou 5 ans).
Ces délais s'appliquent différemment selon les situations de chaque caution et les actions judiciaires faites par leur créancier afin d'obtenir le recouvrement de leur créance à leur encontre.
Ainsi, pour mémoire, l'article L. 218-2 du code de la consommation dispose que l'action des professionnels, pour les biens ou les services qu'ils fournissent aux consommateurs, se prescrit par deux ans.
La prescription biennale constitue une exception inhérente à la dette dont la caution, qui y a intérêt, peut se prévaloir.
En effet, selon l'article 2253 du code civil, les créanciers, ou toute autre personne ayant intérêt à ce que la prescription soit acquise, peuvent l'opposer ou l'invoquer lors même que le débiteur y renonce.
En outre, il résulte de l'article 2313 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2021-1192 du 15 septembre 2021, que la caution peut opposer au créancier toutes les exceptions qui appartiennent au débiteur principal, et qui sont inhérentes à la dette, mais ne peut lui opposer les exceptions qui sont purement personnelles au débiteur.
Avant cette réforme du 15 septembre 2021, applicable aux cautionnements conclus à partir du 1er janvier 2022, un débat juridique existait sur les exceptions purement personnelles au débiteur que la caution ne pouvait malheureusement pas opposer au créancier poursuivant.
Ainsi, avant cette réforme légale, les cautions poursuivies en paiement par les banques ne pouvaient pas, en principe, leur opposer les exceptions purement personnelles de l’emprunteur telle la prescription de l’action en justice.
Or, le nouvel article 2298 du code civil issu de l’ordonnance du 15 septembre 2021 et entré en vigueur le 1er janvier 2022 prévoit la possibilité pour les cautions d’opposer toutes les exceptions au créancier qui la poursuit en paiement, peu importe que ces exceptions soient personnelles au débiteur ou inhérentes à la dette.
Ce nouvel article de loi renforce donc le caractère accessoire du cautionnement.
La caution ne peut ainsi plus être tenue que dans les strictes limites dans lesquelles peut l’être le débiteur principal.
En l’espèce, la banque Crédit Immobilier de France a consenti à des époux un prêt immobilier dont le remboursement est garanti par le cautionnement de la société CNP caution.
À la suite des échéances de remboursement du prêt impayées, la banque a assigné en paiement les emprunteurs et la caution.
Cependant, les emprunteurs se sont utilement prévalus du délai de prescription de deux ans pour tenter de faire juger leur dette éteinte.
Les juges de la Cour de cassation ont donné raison à la caution et rejeté la demande en paiement formée à son encontre par la banque.
Les juges ont considéré que la prescription biennale prévue à l'article L. 218-2 du code de la consommation peut valablement être opposée au créancier par la caution pour se libérer de sa dette.
Il s’agit d’un premier revirement de jurisprudence en matière de cautionnement à la suite de la réforme du droit des sûretés.
A cet égard, le 20 avril 2022, la Cour de cassation a posé le principe selon lequel :
« Si la prescription biennale de l'article L. 218-2 du code de la consommation procède de la qualité de consommateur, son acquisition affecte le droit du créancier, de sorte qu'il s'agit d'une exception inhérente à la dette dont la caution, qui y a intérêt, peut se prévaloir, conformément aux articles 2253 et 2313 du code civil, ce dernier texte pris dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2021-1192 du 15 septembre 2021 ». (Cour de cassation, Première chambre civile, 20 avril 2022, Pourvoi n° 20-22.866)
La prescription biennale de l'article L. 218-2 du code de la consommation procède de la qualité de consommateur, son acquisition affecte le droit du créancier, de sorte qu'il s'agit d'une exception inhérente à la dette dont la caution, qui y a intérêt, peut se prévaloir, conformément aux dispositions précitées du code civil.
Autrement dit, la prescription libératoire extinctive à l'égard du débiteur éteint le droit du créancier et lui interdit d'exercer son action en justice tant à l’encontre du débiteur que de la caution.
La Cour de cassation justifie sa décision par le fait que la position jurisprudentielle antérieure exposait l’emprunteur débiteur principal au recours personnel de la caution tout en le privant du bénéfice de la prescription biennale attachée à sa qualité de consommateur contractant avec un professionnel fournisseur de biens ou de services.
Elle ajoute que sa décision est motivée par la nécessité de traiter de manière égalitaire les cautions ayant souscrit leur engagement avant l’entrée en vigueur de l’ordonnance précitée qui permet en principe à la caution d’opposer au créancier toutes les exceptions qui appartiennent à l’emprunteur débiteur principal.
Cette décision consacre un tournant important en matière de défense des cautions qui pourront désormais sereinement opposer aux banques les exceptions purement personnelles du débiteur principal et, ce, même si elles procèdent de sa qualité de consommateur telle la prescription abrégée de deux ans.
Une telle solution permet aux cautions de jouir pleinement du bénéfice de la prescription biennale attachée à la qualité de consommateur de l’emprunteur principal qui contracte avec un professionnel.
Le but de cette décision est de traiter égalitairement les cautions entre celles ayant souscrit leurs engagements avant l'entrée en vigueur de l'ordonnance n°2021-1192 du 15 septembre 2021 et celles qui les ont conclus postérieurement.
Les cautions pourront dorénavant, sur le fondement de cette solution, opposer efficacement au créancier toutes les exceptions juridiques qui appartiennent au débiteur principal et ainsi échapper à leur obligation de paiement.
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Anthony Bem
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