À défaut de conclusion d'un contrat de bail, l'occupant sans droit, ni titre d'un bien immobilier, doit à son propriétaire une indemnité d'occupation.
Ainsi, le paiement d'une indemnité d'occupation pèse sur toute personne qui jouit privativement d'un bien possédé en communauté ou en indivision (époux, héritiers, concubins, etc ...).
Concrètement, l'indemnité d'occupation vise à réparer le préjudice subi par le propriétaire ou l'indivision du fait de la perte des fruits et revenus suite à cette jouissance exclusive du bien.
À cet égard, l'article 815-9 alinéa 2 du Code civil dispose que :
« L'indivisaire qui use ou jouit privativement de la chose indivise est, sauf convention contraire, redevable d'une indemnité ».
Or, se pose souvent la question de savoir quel est le délai durant lequel le propriétaire ou l'indivision est en droit de réclamer à l'occupant le paiement d'une indemnité d'occupation.
À cet égard, l'article 815-10 alinéa 3 du code civil dispose que :
« Aucune recherche relative aux fruits et revenus ne sera, toutefois, recevable plus de cinq ans après la date à laquelle ils ont été perçus ou auraient pu l'être.»
Le 10 juin 2005, l'assemblée plénière de la Cour de cassation a jugé que
« si le créancier peut poursuivre pendant trente ans l'exécution d'un jugement condamnant au paiement d'une somme payable à termes périodiques, il ne peut, en vertu de l'article 2277 du Code civil, applicable en raison de la nature de la créance, obtenir le recouvrement des arriérés échus plus de cinq ans avant la date de sa demande » (Ass. Plén., 10 juin 2005, N°03-18922)
Ainsi, compte tenu de « la nature de la créance », la prescription de cinq ans est applicable à :
- tout créancier qui réclame le paiement d'une indemnité d'occupation à un occupant sans droit ni titre ;
- indépendamment du fait que cette indemnité d'occupation soit exigible en application d'une clause du bail ou suite à une décision de justice ;
- peu importe que l'indemnité d'occupation sollicitée soit à échéance mensuelle, périodique ou que le montant demandé soit global.
En matière de divorce, la demande de paiement de l'indemnité d'occupation par l'un des époux comporte une particularité eu égard à son point de départ.
En effet, au cas par cas, le délai de cinq ans commence à courrir à compter de la date de l'ordonnance de non conciliation ou du jugement de divorce passé en force de chose jugée.
En matière de succession, lorsqu’une décision de justice irrévocable fixe le principe et le montant d'une indemnité d'occupation pour toute la période comprise entre la naissance de l'indivision et la date du partage effectif, la prescription de cinq ans n’a pas vocation à s’appliquer pour les sommes déjà échues à la date de ladite décision.
En revanche, pour les échéances postérieures au prononcé de la décision de justice, c’est-à-dire les termes à venir, la prescription quinquennale pourra s’appliquer.
De manière obscure, la Cour de cassation a jugé, le 10 juillet 2013, que :
« seuls les arriérés échus postérieurement à une décision judiciaire, ayant force exécutoire, qui a reconnu une créance d'indemnité d'occupation, échappent, en raison de la nature de la créance, à l'interversion de prescription résultant de cette décision ; qu'après avoir relevé que l'arrêt du 26 février 1997 était passé en force de chose jugée sur le principe et le montant de l'indemnité d'occupation due par Mme X..., la cour d'appel a retenu à bon droit que ce n'était que pour la période postérieure à cet arrêt que s'appliquait la prescription quinquennale, de sorte que l'indivision ne pouvait prétendre au paiement de l'arriéré de l'indemnité d'occupation pour la période qui avait couru du 27 février 1997 au 17 décembre 2003 ; que le moyen n'est donc pas fondé » (Cass. Civ., I, 10 juillet 2013, N°12-13850).
Ainsi, concrètement, en cas d’indivision successorale, lorsqu’une décision judiciaire a fixée le principe d’une indemnité d’occupation pour l’avenir, il est nécessaire, avec l’assistance d’un avocat spécialisé, d’assigner en justice le co-indivisaire occupant l’immeuble, dans le délai de cinq ans, afin d'interrompre la prescription et ne pas perdre les échéances à venir.
Pour conclure, il convient de souligner que, quelque soit la situation (indivision successorale ou divorce), le délai de prescription de 5 ans applicable à l'action en paiement d'une indemnité d'occupation constitue une exception au délai de 10 ans durant lequel peut être exécuté une décision de justice.
Même si une décision de Justice définitive fixe le principe d’une indemnité d’occupation pour le passé et pose le principe d’une indemnité d’occupation pour l’avenir jusqu’au partage effectif, les mois d'occupation non encore échus car postérieurs au prononcé de la décision sont frappés d'une prescription de 5 ans ; obligeant le bénéficiaire de cette indemnité d'assigner l'occupant du bien dans ce délai pour ne pas perdre ses droits sur les échéances mensuelles à venir.
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Anthony Bem
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