Le 8 juin 2016, la cour de cassation a jugé que le délai de prescription de la demande de paiement d'une indemnité d'occupation d'un bien commun après divorce est de cinq ans (Cour de cassation, chambre civile 1, 8 juin 2016, N° de pourvoi: 15-19614).
Bien après la séparation et le divorce des époux, il survient souvent une difficulté, lors des opérations de liquidation et partage.
Les opérations de compte, liquidation et partage sont celles réalisées par le notaire ou à défaut le juge pour calculer les droits financiers de chacun au moment du partage de la communauté.
Au cours de ces opérations, il est fréquent qu'une demande de paiement d'une indemnité d'occupation mensuelle soit formulée par l'une ou l'autre des parties.
L'indemnité d'occupation est due lorsque l'un des époux occupe privativement, après le divorce, un bien immobilier indivis ou le logement commun.
Tel un loyer, l'indemnité d'occupation est due et payable à l'indivision tous les mois.
Chacun des époux dispose donc d'un droit spécifique à l'égard de son ex pour l'occupation ou la jouissance d'un bien immobilier commun, jusqu'à la libération effective des lieux.
L'indemnité d'occupation dispose d'un régime juridique particulier et technique.
Surtout, l'indemnité d'occupation peut donner lieu au paiement d'une somme importante eu égard, soit au temps de la procédure judiciaire, qui peut durer jusqu'une quinzaine d'années, soit du délai de prescription de la demande en paiement.
Ainsi, le bon traitement de la question du délai de prescription de l'action ou de la demande en paiement de l'indemnité d'occupation est fondamental pour garantir le succès de l'opération.
Quand l'action en paiement de l'indemnité d'occupation se prescrit ? et à partir de quand commence le décompte de l'indemnité d'occupation ?
En l'espèce, un bien immobilier a été attribué à un époux et une indemnité d'occupation a été fixée dans la décision de divorce depuis une date déjà très ancienne.
Plus de 14 ans après le jugement de divorce, le notaire, chargé des opérations de liquidation de la communauté, a établi un procès-verbal de difficultés, compte tenu du litige relatif au délai de recouvrement de l'indemnité d'occupation.
Ce faisant le notaire a pris acte qu'il ne pouvait pas trancher le différent entre les parties et renvoyées celles-ci devant le juge à cet effet.
Une prescription pouvait-elle être utilement invoquée puisqu'une précédente décision avait condamné l'occupant du bien au paiement d'une indemnité d'occupation ?
Les parties ont donc été renvoyées devant le juge afin d'arbitrer leur différend sur ce point.
Les juges ont donc eu à statuer sur le délai de prescription de la demande en paiement d'une indemnité d'occupation entre époux dans ce type de situation.
Selon les juges, la prescription quinquennale (5 ans) devait s'appliquer.
La réponse n'était pas aisée car le délai de prescription de l'action en paiement de l'indemnité d'occupation dépend de la loi.
Or, la loi n'est pas claire sur les délais applicables dans ce type de cas et les juges nous ont fait part de leurs lumières à ce sujet.
A cet égard, pour mémoire, l'article 815-10 du code civil en son alinéa 3 dispose qu'aucune recherche relative aux fruits et revenus ne sera recevable plus de cinq ans après la date à laquelle ils ont été perçus ou auraient pu l'être.
Par ailleurs, la loi prévoit que la poursuite de l'exécution d'une décision de justice portant condamnation à payer d'une indemnité d'occupation à l'indivision post-communautaire est soumise à un délai de prescription de dix.
Enfin, en vertu de l'article 2224 du code civil, un créancier ne peut pas obtenir le recouvrement des arriérés échus plus de cinq ans avant la date de sa demande.
Quel délai devait-on appliquer en cas d'attribution d'un bien commun à un époux, par décision de justice dans le cadre d'un divorce, pour le calcul des indemnités d'occupation ?
L'indemnité d'occupation mensuelle est soumise à la prescription quinquennale pour la période postérieure à l'attribution.
Par conséquent, quand l'indemnité d'occupation est déjà fixée dans une décision de divorce ou d'attribution du bien commun, l'exécution de cette décision sur ce point est enfermée dans un délai de cinq ans.
Ce délai couvre la période s'écoulant avant la date de la demande en paiement de l'indemnité d'occupation.
On ne peut donc pas obtenir le paiement d'une indemnité d'occupation pour la période antérieure à la limite de cinq ans avant l'action en justice.
Ce principe concerne même les sommes obtenues dans le cadre d'une décision de justice et non encore exigibles à la date de la décision.
Il en est ainsi car il s'agit d'une demande en paiement de "loyers", c'est à dire de sommes payables à termes périodiques donc soumises à un délai plus bref, même si le principe a été fixé par décision de justice des années auparavant.
La demande de l'un des ex-époux en désignation d'un expert aux fins d'estimer un bien en indivision post-communautaire, occupé par l'autre ex-époux, n'est pas prévue par les textes.
Cette demande appartient à la partie qui y a un intérêt.
Le cas échéant, celle-ci doit solliciter du notaire chargé des opérations de comptes, liquidation et partage de la communauté ayant existé entre les époux et l'indivision post-communautaire de nommer un expert pour estimer la maison et l'indemnité d'occupation.
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Anthony Bem
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