Il existe deux grands types de délais différents pour agir en justice : les délais de prescription et les délais de forclusion.
Les délais de prescription peuvent être interrompus et non les délais de forclusion.
Ces délais ont donc des régimes juridiques de traitement différents.
Tout d’abord, le délai de prescription pour agir en justice correspond à la durée au-delà de laquelle celle-ci n’est plus recevable.
Aux termes de l’article 2219 du code civil, la prescription extinctive repose sur l’idée que l’inaction prolongée du titulaire d’un droit d’agir en justice légitime la perte de son droit d’agir.
Ce délai de prescription peut alors être suspendu notamment lorsque l’inaction n’est pas imputable au créancier.
Ce délai de prescription peut aussi être interrompu lorsque le créancier intente une procédure avant que le délai pour agir ne soit écoulé.
En revanche, le délai de forclusion est un délai incompressible qui prive le créancier du droit d’agir en justice sans considération des diligences qui ont pu être accomplies par ce dernier ou du fait que son inaction soit la conséquence d’un fait extérieur à sa volonté.
Le délai de prescription de droit commun pour agir en justice est de cinq ans selon l’article 2224 du code civil.
Ce délai court à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d’exercer son action en justice.
Il existe également des délais spéciaux pour agir en justice posés par le législateur.
Ainsi, le maître ou l’acquéreur d’ouvrage peut agir en responsabilité contre le constructeur ou ses sous-traitant pendant dix ans à compter de la réception des travaux.
Or, aucune indication du texte de loi ne permet de savoir si ce délai pour agir en justice est soumis au régime du délai de prescription ou de forclusion.
À cet égard, la Cour de cassation a jugé, le 10 juin 2021, que ce délai de 10 ans pour agir est de forclusion et non de prescription de sorte qu’il n’est pas en principe susceptible d’être interrompu. (Civ. 3e, 10 juin 2021, n° 20-16.837)
En l’espèce, des maîtres d’ouvrages avaient commandé des travaux de réfection d’une terrasse à un constructeur.
Suite à ces travaux, des désordres sont apparus et un protocole d’accord valant reconnaissance de responsabilité a été conclu entre les maîtres d’ouvrage et le constructeur afin d’obtenir réparation des travaux litigieux.
Or, l’article 2240 du code civil prévoit que « la reconnaissance par le débiteur du droit de celui contre lequel il prescrivait interrompt le délai de prescription ».
En dépit de la conclusion de ce protocole d’accord, la persistance des désordres avait conduit les maîtres d’ouvrages à assigner en justice le constructeur afin d’obtenir l’indemnisation de leurs préjudices subis.
Dans ce contexte, la Cour de cassation a jugé que :
« (…) le délai de dix ans pour agir contre les constructeurs sur le fondement de l'article 1792-4-3 du code civil est un délai de forclusion, qui n'est pas, sauf dispositions contraires, régi par les dispositions concernant la prescription, et que la reconnaissance par le débiteur du droit de celui contre lequel il prescrivait n'interrompt pas le délai de forclusion. »
Ainsi, le maître ou l’acquéreur d’un ouvrage qui souhaite intenter une action en responsabilité à l’encontre d’un constructeur de maison est soumis à un délai de forclusion de dix ans.
Enfin, il convient de préciser que la demande en justice, même en référé, interrompt le délai de forclusion.
Je suis à votre disposition pour toute action ou information. (en cliquant ici)
Anthony Bem
Avocat à la Cour
27 bd Malesherbes - 75008 Paris
01 40 26 25 01
abem@cabinetbem.com