Pour mémoire, l’article L312-16, alinéa 1er, du code de la consommation dispose que :
« Lorsque l'acte mentionné à l'article L. 312-15 indique que le prix est payé, directement ou indirectement, même partiellement, à l'aide d'un ou plusieurs prêts régis par les sections 1 à 3 et la section 5 du présent chapitre, cet acte est conclu sous la condition suspensive de l'obtention du ou des prêts qui en assument le financement. La durée de validité de cette condition suspensive ne pourra être inférieure à un mois à compter de la date de la signature de l'acte ou, s'il s'agit d'un acte sous seing privé soumis à peine de nullité à la formalité de l'enregistrement, à compter de la date de l'enregistrement. »
En d’autres termes, dans le cadre de la vente d’un bien immobilier, lorsque le compromis indique que le prix est payé à l’aide d’un prêt bancaire, il est conclu sous la condition suspensive de l’obtention de ce prêt.
En outre, la durée de validité de cette condition suspensive ne pourra être inférieure à un mois à compter de la date de signature de l'acte ou à compter de sa date d'enregistrement s'agissant d'une promesse unilatérale de vente.
Ainsi, le bénéficiaire d’une promesse de vente d’un bien immobilier devra disposer d’au moins 30 jours pour déposer sa demande de prêt bancaire.
Or, la plupart des promesses de vente d’immeubles comportent une clause imposant à l’acquéreur de faire sa demande de prêt dans un délai souvent inférieur à un mois.
Dès lors, se pose la question de la validité d’une telle clause abrégeant le délai légal prévu pour déposer une demande de prêt destiné à financer l’acquisition d’un bien immobilier.
L’arrêt rendu par la Cour de cassation le 12 février 2014 apporte une réponse à cette question. (Cass. Civ. 3, 12 février 2014, n° 12-27182)
En l’espèce, des époux ont promis de vendre un appartement à une personne, sous la condition suspensive de l'obtention d'un prêt bancaire pour lequel l’acheteur s'engageait à déposer une demande de crédit dans un délai de 10 jours.
Par la suite, reprochant à l’acquéreur de ne pas justifier du dépôt d'une demande de prêt dans ce délai, les vendeurs l'ont assigné en paiement de la clause pénale.
La cour d’appel a rejeté l’action des vendeurs en relevant qu'en s'adressant à un courtier en prêts immobiliers l’acquéreur avait satisfait à l'obligation de déposer une demande de prêt auprès d'un organisme financier contenue dans la promesse de vente.
La Cour de cassation a confirmé l’arrêt d’appel en posant le principe selon lequel :
« les dispositions d'ordre public de l'article L. 312-16 du code de la consommation interdisent d'imposer à l'acquéreur de déposer une demande de crédit dans un certain délai, cette obligation contractuelle étant de nature à accroître les exigences de ce texte »
Or, dès lors qu’une règle est d’ordre public, les parties ne sauraient y déroger par une clause de leur contrat.
Ainsi, les vendeurs ne pouvaient pas valablement imposer à l’acquéreur de faire sa demande de prêt dans un délai de 10 jours, alors qu’une règle d’ordre public prévoit que ce délai ne doit pas être inférieur à un mois.
Par conséquent, la Haute juridiction a approuvé les juges du fond d’avoir retenu que la non-réalisation de la condition suspensive n’était pas imputable à l’acquéreur et que la demande des époux de versement de la clause pénale ne pouvait être accueillie.
Il en résulte que, dans le cadre de la vente d’un bien immobilier, le vendeur ne pourra pas se prévaloir de la clause imposant à l’acquéreur de déposer une demande de prêt dans un certain délai :
- ni pour obtenir la caducité de la vente (Cass. Civ. III, 7 novembre 2007, n° 06-17867) ;
- ni pour refuser de restituer l’acompte (Cass. Civ. I, 7 juillet 1993, n° 91-20395) ;
- ni pour solliciter la sanction prévue par l’article 1178 du Code civil qui répute accomplie la condition dont l’accomplissement a été empêché par le débiteur (Cass. Civ. III, 6 mai 2005, n° 04-13381) ;
- ni encore pour demander le paiement d’une clause pénale, tel qu’en l‘espèce.
Pour conclure, il convient de garder en mémoire que dans le cadre d’une vente de bien immobilier, l'article L.312-16 du Code de la consommation interdit d'imposer à l'acquéreur de déposer une demande de crédit dans un certain délai.
L’acquéreur d’un bien immobilier doit donc disposer d’un délai d’au moins un mois pour déposer une demande de prêt destiné à financer l’acquisition de l’immeuble.
Le délai d’un mois fixé par ce texte s'entend d'un délai minimum que les parties peuvent évidemment augmenter.
La décision commentée traduit ainsi l’importance de bien rédiger les actes de vente de bien immobilier afin de permettre l’exercice de recours efficaces le cas échéant.
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Anthony Bem
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