Selon une opinion majoritairement partagée, il n’existerait pas de délit de vol entre époux, enfants ou parents.
Or, cette croyance est partiellement vraie mais aussi partiellement fausse.
En réalité, l’article 311-12 du Code pénal pose le principe selon lequel il ne peut pas y avoir de poursuites pénales pour vol à l’égard de son ascendant, de son descendant et de son conjoint.
Ainsi, en principe, il ne pourrait pas y avoir de vol de la part d’un époux vis à vis de son conjoint, ni par des parents qui feraient usage des deniers de leurs enfants et réciproquement à l’égard de l’argent des parents utilisé par leurs enfants.
On parle alors de « l’immunité familiale ».
Toutefois, le même article prévoit de nombreuses exceptions à « l’immunité familiale ».
En effet, la protection légale et l’exonération de responsabilité pénale des conjoints en cas de vol cesse de s’appliquer notamment lorsque les époux sont séparés de corps ou autorisés par décision du juge aux affaires familiales à résider séparément.
En outre, certains documents ne peuvent, en tout état de cause, jamais être volés entre membres d’une même famille.
Le Code pénal prévoit que « l’immunité familiale » n'est pas applicable lorsque le vol porte sur :
- des objets ou des documents indispensables à la vie quotidienne de la victime, tels que : des documents d'identité, relatifs au titre de séjour ou de résidence d'un étranger ;
- des moyens de paiement ;
- des moyens de télécommunication, c’est à dire : des ordinateurs, tablettes et téléphones.
Selon la jurisprudence, le vol commis par un descendant au préjudice d’un ascendant ou réciproquement est susceptible de poursuites pénales même lorsque le vol porte sur un moyen de paiement ou sur l’utilisation de ces moyens de paiement. (Cour d’Appel de Rennes, Chambre des Appels Correctionnels, 7 juillet 2022, n° 19011000009)
Dans l´affaire jugée par la cour d'appel de Rennes, un fils ayant fait un usage abusif des moyens de paiement de ses parents s'est vu condamné pénalement des chefs d´escroquerie et de vol.
En effet, l’article 313-3 alinéa 2 du même Code précise que « les dispositions de l’article 311-12 sont applicables au délit d’escroquerie ».
Il en résulte que le dernier alinéa de l’article 311-12 précité est applicable à l’escroquerie portant sur des moyens de paiement.
L’immunité familiale prévue par les deux articles précités cesse donc de s’appliquer en cas d’usage d’une carte bancaire, soit un moyen de paiement.
Tous les retraits d’argent et les achats personnels au moyen de la carte bancaires sont concernés et ne permettent pas de bénéficier de l’immunité familiale.
Les juges considèrent que « l’immunité familiale » est exclue lorsque l’escroquerie porte sur des moyens de paiement, ce qui vise non seulement l’appréhension de ceux-ci mais également l’usage de ces moyens de paiement.
Ceci limite donc le champs d’application de l’immunité familiale dès qu’il y aura eu une utilisation de moyens de paiement.
Enfin, eu égard à la qualité juridique de certains membres de la famille, le Code pénal exclut le principe d’exonération de responsabilité pénale lorsque l'auteur des faits est le tuteur, le curateur, le mandataire spécial désigné dans le cadre d'une sauvegarde de justice, la personne habilitée dans le cadre d'une habilitation familiale ou le mandataire exécutant un mandat de protection future de la victime.
Ainsi, il apparaît que de nombreuses exceptions sont portées à la règle de l’exonération de responsabilité pénale de sorte que des membres d’une même famille puisse agir entre eux pour délit de vol, malgré le lien familial qui les unit et « l’immunité familiale » de principe.
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