En l’espèce, une société a acquis un fonds de commerce financé en partie par un prêt de la Banque Populaire dont le gérant s’est rendu caution.
La société ayant été mise en redressement puis liquidation judiciaires, la banque, après avoir déclaré sa créance, a assigné la caution en exécution de son engagement.
La caution s’est prévalue du vice de disproportion devant les juges afin d’obtenir l’annulation de son engagement de caution.
En effet, pour mémoire, l’article L. 341-4 du code de la consommation dispose que :
« Un créancier professionnel ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation ».
Les juges d’appel ont relevé que lors de la signature de son engagement, la caution ne possédait aucun patrimoine immobilier et ne percevait que des allocations chômage de 775 euros mais que le but du rachat du fonds de commerce était précisément de dégager des bénéfices pour sa société et un salaire pour lui.
De plus, il ne s’agissait pas d’une création d’entreprise mais que celle-ci existait depuis 1960.
Selon la cour d’appel, la caution pouvait donc espérer des bénéfices au moins égaux à ceux réalisés précédemment, soit environ 40 000 euros par an.
Ainsi, la cour d’appel a jugé que le cautionnement n’était pas manifestement disproportionné par rapport aux biens et revenus de la caution, et l'a condamnée à payer à la banque une certaine somme.
Cependant, la cour de cassation a cassé et annulé l’arrêt d’appel en posant le principe selon lequel :
« la proportionnalité de l’engagement de la caution ne peut être appréciée au regard des revenus escomptés de l’opération garantie, la cour d’appel a violé le texte susvisé [l’article L. 341-4 du code de la consommation] ».
Ainsi, l’appréciation de la proportionnalité de l’engagement de la caution par rapport à ses biens et revenus ne peut pas tenir compte du succès éventuel de l’opération garantie.
Il découle de cette décision que le cautionnement sera considéré comme « manifestement disproportionné », et donc nul, lorsque les biens et revenus de la caution seront insuffisants pour couvrir le montant garanti mais surtout indépendamment des « revenus escomptés de l’opération garantie ».
Dans le cadre des procédures judiciaires contre les cautions, les banques ont toujours invoqué pour se défendre que la disproportion du cautionnement ne pouvait pas être invoquée par la caution compte tenu du fait que le remboursement de l’emprunt, du crédit ou du solde débiteur du compte courant de la société était assuré par les revenus générés par l’activité de celle-ci en cas de rachat ou selon le business plan présenté par le dirigeant en cas de création d’activité.
Aux termes de cette jurisprudence, la Haute Cour a fixé un principe important en faveur des cautions dirigeantes leur permettant d’obtenir l’annulation de la garantie de remboursement donnée aux banques.
En effet, les bénéfices et les revenus escomptés n’entrent pas dans les revenus servant à la détermination des capacités financières de la caution.
Par voie de conséquence, la probabilité de réalisation de bénéfices de la part du dirigeant n’entre pas dans le calcul des revenus susceptibles d’être pris en compte pour la détermination de la disproportion du cautionnement.
NB : Afin d'approfondir le sujet des moyens de défense dont disposent les cautions poursuivies en paiement par la banque, je vous invite à lire mon article publié ICI.
Je suis à votre disposition pour toute action ou information (en cliquant ici).
PS : Pour une recherche facile et rapide des articles rédigés sur ces thèmes, vous pouvez taper vos "mots clés" dans la barre de recherche du blog en haut à droite, au dessus de la photographie.
Anthony Bem
Avocat à la Cour
27 bd Malesherbes - 75008 Paris
Tel : 01 40 26 25 01
Email : abem@cabinetbem.com