I - Les causes ou circonstances des donations déguisées
Les donations déguisées ont essentiellement leur place dans le cadre des réglements et partages des successions.
Cependant, elles ont un intérêt financier évident compte tenu du taux d’imposition d'imposition et des tranches applicables aux donations au-delà des abattements :
- En dessous de 8 072 € : 5 %
- Comprise entre 8 072 € et 12 109 € : 10 %
- Comprise entre 12 109 € et 15 932 € : 15 %
- Comprise entre 15 932 € et 552 324 € : 20 %
- Comprise entre 552 324 € et 902 838 € : 30 %
- Comprise entre 902 838 € et 1 805 677 € : 40 %
- Supérieure à 1 805 677 € : 45 %
Sont considérées comme des donations déguisées :
- la vente fictive portant un prix dans l'acte qui ne sera pas payé ;
- un apport fictif d'une somme en société
- une reconnaissance de dette fictive lorsque le prêteur a toujours eu l'intention de ne pas se faire rembourser,
- une vente en viager à un âge très avancé pour une rente jamais versée.
Les effets juridiques de tels actes sont leur requalification en donation si sont réunies à la fois :
- les conditions de forme exigées pour l'acte dont elle emprunte l'apparence ;
- les conditions de fonds des donations c'est-à-dire l’intention libérale, absence de contrepartie et caractère gratuit.
Le déguisement peut porter sur :
- la personne du gratifié : l'interposition de personne vise à contourner l'incapacité du donataire, désigné par la contre-lettre,
- la nature de l'acte : l'acte ostensible est onéreux et la contre-lettre dissimule une donation qui peut être démontrée, au moyen d'une action en déclaration de simulation.
II – Les effets juridiques des donations déguisées
La charge de la preuve de la donation déguisée incombe à celui qui invoque le déguisement.
La preuve de l'intention libérale peut être rapportée par tous moyens.
Les héritiers du donateur sont assimilés à des tiers à l'acte lorsqu'ils agissent – non pas en qualité d'ayant cause de leur auteur – mais en vertu d'un droit qui leur est propre.
Il en est ainsi, notamment, lorsqu'ils réclament le rapport.
Cependant, il convient de préciser que la vente consentie par le défunt à l'un de ses successibles, moyennant le paiement d'un prix symbolique ne constitue pas une donation déguisée sous l'apparence d'une vente à défaut d'intention libérale démontrée (Cass. Civ., I, 27 octobre 1993).
Ainsi, la jurisprudence a souvent l’occasion de sanctionner le recours au déguisement animé par la volonté du disposant de gratifier l'héritier hors part successorale.
Les donations déguisées sont éligibles au rapport successoral, de sorte que l'héritier non réservataire qui en présence d'héritiers réservataires a reçu une valeur qui excède la quotité disponible attachée à sa qualité en doit la restitution.
Une fois que l'actif net de la succession a été calculé, les donations consenties aux héritiers avant de procéder au partage doivent être ajoutées de sorte que chacun recueille sa part, déduction faite de ce qu'il a déjà reçu par donation.
Le principe est donc le "rapport" des donations à la succession afin de maintenir l'égalité entre les héritiers.
Ainsi, la donation déguisée est rapportable à la succession et le montant de la donation sera ajouté à celui de l'actif de la succession
En outre, en application de l’article 1321 « les contre-lettres n’ont pas d’effet contre les tiers ».
Autrement dit, les actes secrets ne sont pas opposables aux personnes étrangères à l’acte, à moins que ces dernières y aient un intérêt.
Si un tiers intente une action en déclaration de simulation, il va devoir prouver l’existence d’un acte secret par tout moyen.
La requalification de l'opération pourra provenir de l’administration fiscale ou d’un héritier qui souhaite voir réinntégrer à l'actif de la succession la somme dont il s’agit, qu’il s’agisse d’un recel successoral ou non.
Fiscalement, l'administration applique les droits de mutation à titre gratuit, assortis d'un intérêt de retard de 0,40% par mois, majoré d’une pénalité de 40% en cas de mauvaise foi et de 80% en cas de manœuvres frauduleuses.
En outre, ces droits à payer sont calculés sur la base de la valeur du bien au moment de sa révélation et non au jour de la transmission.
Enfin, les donations déguisées relèvent de la procédure de répression des abus de droit prévue par l’article L 64 du Livre des Procédures Fiscales selon lequel :
« Afin d'en restituer le véritable caractère, l'administration est en droit d'écarter, comme ne lui étant pas opposables, les actes constitutifs d'un abus de droit, soit que ces actes ont un caractère fictif, soit que, recherchant le bénéfice d'une application littérale des textes ou de décisions à l'encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs, ils n'ont pu être inspirés par aucun autre motif que celui d'éluder ou d'atténuer les charges fiscales que l'intéressé, si ces actes n'avaient pas été passés ou réalisés, aurait normalement supportées eu égard à sa situation ou à ses activités réelles.
En cas de désaccord sur les rectifications notifiées sur le fondement du présent article, le litige est soumis, à la demande du contribuable, à l'avis du comité de l'abus de droit fiscal. L'administration peut également soumettre le litige à l'avis du comité.
Si l'administration ne s'est pas conformée à l'avis du comité, elle doit apporter la preuve du bien-fondé de la rectification.
Les avis rendus font l'objet d'un rapport annuel qui est rendu public ».
Je suis à votre disposition pour toute information ou action.
PS : Pour une recherche facile et rapide des articles rédigés sur ces thèmes, vous pouvez taper vos "mots clés" dans la barre de recherche du blog en haut à droite, au dessus de la photographie.
Anthony Bem
Avocat à la Cour
27 bd Malesherbes - 75008 Paris
Tel : 01 40 26 25 01
Email : abem@cabinetbem.com
www.cabinetbem.com