Le droit de la responsabilité sur Internet est en gestation depuis une dizaine d'années.
Les juridictions nationales ont tenté les unes après les autres d'instaurer des règles de responsabilité des sites internet dont le champ d'application est par définition limité.
Or, le droit de l'Internet ne serait être un droit national compte tenu de sa nature trans-étatique.
A défaut de réglementation en matière de responsabilité des acteurs du Web, de droit à l'oubli et du droit au déréférencement de contenus licites dans les moteurs de recherche, à l'échelle communautaire voir internationale, il ne serait exister des droit de l'Internet efficace.
En France, l'application de la loi dite pour la confiance dans l'économie numérique de 2004 a été et reste toujours un ersatz de réglementation applicable utilement s'agissant de la responsabilité des différents sites Internet.
La question du droit à l'oubli et du droit au déréférencement des contenus illicites sur Internet au niveau international reste toujours en suspens.
Conscient de cette nécessité de réglementer à l'échelle globale le droit de l'Internet, la plus haute juridiction canadienne a pris une décision qui risque d'influencer les jurisprudences des différents états.
Le 28 juin 2017, la Cour suprême du Canada a condamné Google à déréférencer des liens de son moteur de recherche, à l'échelle mondiale, donnant lieu à une application globale du « droit à l'oubli ». (Google Inc. v. Equustek Solutions Inc., 28 juin 2017, 2017 SCC 34)
En l'espèce, une société accusait une entreprise concurrente d’avoir copié l’un de ses propres produits et a demandé à Google le déréférencement de 345 liens apparaissant en résultats de requête sur son moteur de recherche internet.
Google s’était exécuté mais uniquement sur la version canadienne de son moteur de recherche, en invoquant la protection de la liberté d’expression.
Aux termes de son jugement, la Cour suprême canadienne a jugé que :
« Internet n’a pas de frontières — sa [portée] naturelle est mondiale. Le seul moyen de s’assurer que la décision soit respectée c’est de l’appliquer à l’échelle à laquelle Google opère : mondialement. »
Google a d’ores et déjà fait savoir qu’il se conformerait à cette décision.
Il ressort de cette décision que la juridiction de n'importe quel pays a le droit d’empêcher les internautes du monde entier d’accéder à une information.
En Europe, le « droit à l’oubli » a été instauré récemment grâce à une décision de sa Cour de justice.
La problématique est la même sur le vieux continent : Google accepte bien de déréférencer certaines demandes qui lui sont faites concernant la suppression de données personnelles « inappropriées, hors de propos ou qui n’apparaissent plus pertinentes », mais uniquement sur les versions européennes de son moteur de recherche.
La Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) a condamné Google en mars 2016 au titre de son application restrictive de son obligation de de référencement.
Ces décisions récentes illustrent la nécessité de poser des règles efficaces afin qu'un véritable droit à l'oubli et au déréférencement de contenus puisse être utilement appliqué au niveau global et non plus seulement au niveau national, des états.
Certaines critiquent déjà cette décision et la considère comme une limitation de la liberté d'expression.
En réalité il n'en est rien, la liberté d'expression a toujours connu des limites dont celle de diffuser des contenus à caractère illicite.
Internet permet une diffusion globale et généraliser de contenus dans le caractère illicite et virale entraîne parfois une impossibilité pratique de des référencer tous les contenus.
Contraindre les moteurs de recherche à cette suppression au niveau globale et non plus simplement au niveau local permet d'accorder une garantie efficace aux victimes (sociétés ou particuliers).
À l'instar de la haute juridiction canadienne, les états devraient mettre en place un système de réglementation uniformisée permettant d'assurer de manière réciproque une application harmonisée des différentes règles juridiques applicables.
En tout état de cause, celle-ci influencera certainement d'autres juridictions nationales pour qu'en attendant une convention internationale, les contenus à caractère illicite sur le web n'aient lieu d'être.
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Anthony Bem
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