Droit à indemnisation des personnes caution du remboursement de prêt bancaire manifestement inadapté aux capacités financière de la societe emprunteuse

Publié le 03/01/2022 Vu 1 461 fois 0
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Les personnes qui se sont portées cautions du remboursement d’un prêt peuvent-elles prétendre avoir droit à une indemnisation en cas de prêt manifestement inadapté aux capacités financières de la societe emprunteuse ?

Les personnes qui se sont portées cautions du remboursement d’un prêt peuvent-elles prétendre avoir droit

Droit à indemnisation des personnes caution du remboursement de prêt bancaire manifestement inadapté aux capacités financière de la societe emprunteuse

Les banques et sociétés de prêt sollicitent systématiquement des garanties de remboursement auprès des dirigeants qui demandent l’octroi de prêt d’argent pour le compte de leur entreprise. 

 

Les garanties personnelles demandées sont surtout des cautionnements solidaires. 

Or, de nombreux cautionnements garantissent le remboursement de prêts qui sont manifestement inadaptés aux capacités financière de la société emprunteuse. 

A cet égard, le 2 juillet 2019, la Cour d'appel de Grenoble a condamné la banque à indemniser des cautions pour manquement à son obligation de mise en garde du fait que le prêt était manifestement inadapté aux capacités financière de la société emprunteuse (Cour d'appel de Grenoble, 1ere chambre, 2 juillet 2019, n° 17/03806).

En l’espèce, une société a contracté un prêt envers le Crédit Agricole pour lequel les parents du gérant se sont portés caution solidaire du remboursement de la dette. 

 

Après mise en liquidation judiciaire de la société, le Crédit Agricole a assigné les cautions devant le tribunal en exécution de leurs engagements de caution.

 

Les cautions ont invoqué en défense le caractère disproportionné de leurs engagements de caution manifestement disproportionnés à leurs biens et revenus.

 

En effet, aux termes de l’article L 341-4 devenu L 332-1 du code de la consommation, un créancier professionnel ne peut se prévaloir d’un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l’engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation.

 

C’est à la caution qu’il incombe de rapporter la preuve de la disproportion qu’elle allègue et au créancier qui entend se prévaloir d’un contrat de cautionnement manifestement disproportionné, d’établir qu’au moment où il appelle la caution en garantie, le patrimoine de celle-ci lui permet de faire face à son obligation.

 

Le caractère manifestement disproportionné du cautionnement s’apprécie au regard de l’ensemble des engagements souscrits par la caution d’une part, de ses biens et revenus d’autre part, sans tenir compte des revenus escomptés de l’opération garantie.

 

Or, au moment de la conclusion de leurs cautionnements, les cautions avaient des revenus modestes et étaient propriétaires d’un seul bien immobilier qu’ils avaient acquis après une vie de labeur.

 

Ainsi, lorsqu’elles se sont engagées en qualité de caution, ces dernières ont rempli une fiche de renseignements sur laquelle elles ont indiqué être propriétaires d’un bien immobilier d’une valeur nette de 300.000 euros, et percevoir des revenus annuels de l’ordre de 24.000 euros.

 

Toutefois, les juges ont considéré que « la disproportion d’un engagement est une notion purement économique qui doit être évaluée indépendamment de l’éventuel traumatisme causé par la vente d’un actif ».

 

En l’état de ces éléments, les juges ont estimé que les cautions n’ont pas souscrit un cautionnement manifestement disproportionné à leurs biens et revenus. 

 

Cependant, la cour d’appel a jugé que la banque avait violé son obligation de mise en garde et a octroyé aux cautions une somme équivalente aux condamnations prononcées à titre de dommages-intérêts. 

 

Selon les juges, « il est acquis en jurisprudence que la banque est tenue à un devoir de mise en garde à l’égard d’une caution non avertie lorsque, au jour de son engagement, celui-ci n’est pas adapté aux capacités financières de la caution ou s’il existe un risque d’endettement né de l’octroi du prêt garanti, lequel résulte de l’inadaptation du prêt aux capacités financières de l’emprunteur ».

 

Au cas présent, les cautions avaient exercé des fonctions d’employé et d’agent technique de sorte qu’elles étaient des cautions non averties. 

 

La société avait un capital social de 3.000 euros mais avait acquis pour 260.000 euros un fonds de commerce de bar restaurant hôtel dont l’acquisition avait été intégralement financée par le Crédit Agricole et sans aucun apport.

 

Le montant des échéances mensuelles du prêt était de 4.039 euros et le montant des loyers était de 3.400 euros TTC par mois. 

 

De plus, le montant du loyer a connu une forte augmentation par rapport au loyer supporté par le précédent exploitant.

 

Dès l’ouverture de la procédure de redressement judiciaire, l’administrateur judiciaire a noté que le fonds avait été acquis à un prix trop important, le financement initial était insuffisant et l’entreprise souffrait d’un manque d’activité depuis l’ouverture.

 

En conséquence, les juges ont considéré que le prêt était manifestement inadapté aux capacités de la société emprunteuse, de sorte que celle-ci s’est trouvée en état de cessation des paiements 18 mois après l’exigibilité de la première échéance du prêt.

 

La cour a donc jugé que « L’opération étant dès l’origine vouée à l’échec, les époux X Y, cautions non averties, sont bien fondés à soutenir que le Crédit Agricole a manqué à leur égard à son obligation de mise en garde ». 

 

Les juges ont ainsi posé le principe selon lequel la banque qui n’alerte pas les cautions sur le caractère aléatoire du remboursement d’un prêt par le débiteur principal et sur les conséquences financières qui en résulteraient cause à celles-ci un préjudice caractérisé par la perte de chance de ne pas s’engager.

 

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