Il n’est pas rare, dans le cadre d’un procès, de voir une nouvelle personne se substituer au demandeur initial pour demander la condamnation du défendeur à son profit suite, notamment, à une cession d’un portefeuille de créances douteuses rachetées ou apportés dans le cadre d’apports partiels d’actifs à des prix inférieurs au montant des créances cédées, compte tenu du fait que ces créances font l’objet de contentieux.
L’article 1699 du code civil a mis en place un mécanisme dit du « retrait litigieux » en ce qu’il dispose que :
« Celui contre lequel on a cédé un droit litigieux peut s'en faire tenir quitte par le cessionnaire, en lui remboursant le prix réel de la cession avec les frais et loyaux coûts, et avec les intérêts à compter du jour où le cessionnaire a payé le prix de la cession à lui faite ».
Ce texte permet ainsi à la partie défenderesse à un procès d’offrir à celui ayant acheté la créance du demandeur de mettre un terme au procès en lui remboursant le prix payé au cédant.
Le « retrait litigieux » peut être intéressant lorsque la créance a été cédée à bas prix, car en remboursant le prix de la cession de sa créance, le débiteur se trouve entièrement libéré de sa dette initiale.
En l’espèce, la Banque française commerciale de l'Océan indien-BFCOI (ci-après dénommée la banque) a consenti deux prêts à une société, pour lesquels son gérant s'est rendu caution personnelle et solidaire pour un montant limité.
Suite à la liquidation judiciaire de la société, la Banque a assigné Monsieur X en exécution de son engagement de caution.
Alors qu'un pourvoi en cassation avait été formé par Monsieur X contre sa condamnation au paiement, il a reçu de la société Négociations achat créances contentieuses (la société NACC) une lettre l'informant qu'elle avait acquis la créance de la banque par acte de cession de créances, qu'elle se trouvait désormais subrogée dans les droits de la banque et qu'en conséquence, elle le mettait en demeure de régler les sommes dues.
Dans ce contexte, Monsieur X a informé la société NACC qu'il entendait exercer le « retrait litigieux », conformément aux dispositions de l'article 1699 du code civil précité.
Celle-ci l'ayant refusé, la caution l'a assignée aux fins de voir dire qu'il est fondé à exercer le retrait litigieux de la créance résultant de l'arrêt rendu contre lui, d'obtenir la production d'éléments permettant de calculer le prix de cession et de lui donner acte de son offre de rembourser le prix réel de la cession avec les frais, loyaux coûts et intérêts du jour du paiement du prix de cession.
Par jugement confirmé par arrêt en appel, les juges ont déclaré la caution irrecevable en ses demandes et l’ont condamné à payer diverses sommes au titre des engagements de caution.
En effet, les premiers juges avaient estimé que le retrait litigieux ne pouvait être exercé que par un défendeur à l'instance qui conteste le droit litigieux et qu'en l'espèce, l'instance ayant été introduite par la caution, celle-ci n'avait pas la qualité exigée par la loi.
Cependant, la cour de cassation a cassé et annulé l’arrêt d’appel en jugeant que :
« en statuant ainsi, alors que la caution était défenderesse à l'instance qui avait pour objet la contestation du droit litigieux, la cour d'appel a violé le texte susvisé ».
Il résulte de cette décision que celui contre lequel on a cédé un droit litigieux peut s'en faire tenir quitte par le cessionnaire, en lui remboursant le prix réel de la cession avec les frais et loyaux coûts, et avec les intérêts à compter du jour où le concessionnaire a payé le prix de la cession à lui faite.
Autrement dit, le fait que la caution était celle ayant assignée la cessionnaire ne s'oppose pas à ce que sa demande d'exercer son droit de retrait soit recevable,
Par conséquent, le « retrait litigieux » peut être exercé :
- par le défendeur à l'instance qui conteste le droit litigieux, c'est-à-dire à l'instance ayant pour objet de faire reconnaître la validité et l'étendue des droits cédés ;
- par le biais une action engagée par la caution visant la constatation du bien-fondé du retrait litigieux et l'opposant non plus à la banque mais au cessionnaire, dès lors que la caution avait bien qualité de défendeur à l'instance en contestation de la créance.
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Anthony Bem
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