L’exequatur est la mesure aux termes de laquelle les décisions de justice étrangères sont reconnues comme applicables dans un autre Etat. En l'absence de convention internationale contraire, l’exequatur suppose, en France, de vérifier la compétence du juge étranger, la conformité à l’ordre public international ainsi que l’absence de fraude.
En l’espèce, la société de droit russe Gazprombank a consenti à la société de droit russe Jean Lion deux contrats de prêts, pour lesquels Monsieur X s’est porté caution solidaire du remboursement.
Suite à la procédure de faillite de la société Jean Lion, les juges moscovites ont déclaré Monsieur X redevable à l'égard de la société Gazprombank, au titre de ses deux engagements de caution.
La cour d'appel de Moscou a rejeté les recours formés par Monsieur X contre les deux jugements rendus à son encontre.
Une procédure d’exequatur a été mise en œuvre en France par la société Gazprombank afin de faire exécuter les deux jugements contre Monsieur X en France où il se trouve domicilié.
Les juges français ont octroyé l'exequatur aux jugements russes et ont ainsi déclaré exécutoires les jugements litigieux en France.
La cour de cassation a validé l’exequatur ainsi obtenu en jugeant que :
« pour accorder l'exequatur en l'absence de convention internationale comme c'est le cas dans les relations entre la France et la Fédération de Russie, le juge français doit s'assurer que trois conditions sont remplies, à savoir la compétence indirecte du juge étranger fondée sur le rattachement du litige au juge saisi, la conformité à l'ordre public international de fond et de procédure ainsi que l'absence de fraude ;
Attendu, d'une part, sur la compétence indirecte, que la cour d'appel a relevé, d'abord, que les parties avaient librement accepté une clause attributive de compétence au profit de la juridiction russe, expressément invoquée par la société Gazprombank, puis, que les contrats de prêt et cautionnement devaient s'exécuter en Russie, enfin, que l'avocat de M. X... n'avait pas contesté la compétence de la juridiction russe ; qu'elle a pu en déduire, sans avoir à suivre les parties dans le détail de leur argumentation, que la saisine des juridictions russes s'inscrivait, sans fraude, dans le champ des engagements de caution solidaire pris par M. X... et d'une clause attributive de compétence y figurant ;
Attendu, d'autre part, sur la conformité à l'ordre public international de procédure, que la cour d'appel a relevé, d'abord, que M. X... avait été représenté au cours des procédures litigieuses, qu'il avait bénéficié des délais nécessaires pour exercer sa défense au regard des renvois qui lui avaient été accordés et qu'il avait formé recours contre les décisions motivées litigieuses, ensuite, qu'il alléguait le défaut de prise en compte de l'incidence, sur le montant de la dette litigieuse, de la procédure de faillite qui s'était déroulée en Russie suite à la défaillance de la société Jean Lion, enfin, qu'il ne démontrait pas en quoi la circonstance que la société Gazprombank soit la troisième banque de Russie, sous le contrôle étroit de l'Etat russe, aurait affecté l'impartialité et l'indépendance des juridictions russes en cause en l'espèce ; que la cour d'appel a pu déduire de ces constatations qu'aucune contrariété à l'ordre public international français n'était mise en évidence ;
Attendu, enfin, que c'est à bon droit que la cour d'appel, qui n'avait pas à procéder à une recherche qui ne lui était pas demandée, a retenu que M. X... invoquait en vain la violation de l'article L. 341-4 du code de la consommation [interdisant au prêteur professionnel de se prévaloir contre la caution d'un engagement disproportionné à ses revenus et patrimoine] dès lors que celui-ci édicte une norme dont la méconnaissance par le juge étranger n'est pas contraire à la conception française de l'ordre public international ».
Il découle de cette décision que la procédure d’exequatur en France ne permet pas aux juges français de rejuger l’affaire au fond.
Surtout, l’effet en France des jugements étrangers est conditionné à une procédure de contrôle de :
- la compétence internationale du tribunal étranger saisi, à savoir l’existence d’un lien suffisant entre le juge étranger auteur de la décision et le litige qui lui est soumis ;
- la conformité à l’ordre public international de procédure, à savoir le respect des droits de la défense, l’indépendance et l’impartialité de la juridiction ;
- la conformité à l’ordre public international de fond telle la méconnaissance d’une règle de droit en violation de la conception française de l’ordre public international, exclusive de la révision des jugements étrangers ;
- l’absence de toute fraude.
.Je suis à votre disposition pour toute action ou information (en cliquant ici).
PS : Pour une recherche facile et rapide des articles rédigés sur ces thèmes, vous pouvez taper vos "mots clés" dans la barre de recherche du blog en haut à droite, au dessus de la photographie.
Anthony Bem
Avocat à la Cour
27 bd Malesherbes - 75008 Paris
Tel : 01 40 26 25 01
Email : abem@cabinetbem.com