Fin de l’exigence de respect du formalisme et du libellé imposé des demandes des parties à un procès dans le dispositif des conclusions de leur avocat

Publié le Modifié le 22/04/2024 Vu 2 461 fois 0
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Les conclusions des avocats à un procès doivent-elles obligatoirement respecter un formalisme et un libellé particulier dans le dispositif (aussi appelé le « par ces motifs » ou P.C.M) de leurs écritures ?

Les conclusions des avocats à un procès doivent-elles obligatoirement respecter un formalisme et un libellé

Fin de l’exigence de respect du formalisme et du libellé imposé des demandes des parties à un procès dans le dispositif des conclusions de leur avocat

 

La Cour de cassation est la plus haute juridiction de l’ordre judiciaire français ; qui remplit notamment la mission essentielle d’unifier et de contrôler l'interprétation des lois par l’ensemble des juridictions nationales telles que les tribunaux et les cours d’appel. 

Or, ces dernières années est apparu un courant jurisprudentiel au terme duquel certains juges, souhaitant limiter le nombre de dossiers à traiter, imposaient aux avocats la présentation d’un formalisme excessif de leurs écritures et refusaient de traiter les demandes si elles ne répondaient pas à leur exigence sémantique. 

En pratique, de nombreux juges d’appel ont ainsi imposé le respect de termes particuliers dans les conclusions écrites des avocats qui leur étaient soumises, pour se considérer comme valablement saisis ou non des demandes des parties au procès. 

Concrètement, lorsque des conclusions ne comportaient pas les termes exigés par les juges, ils ne s’estimaient pas valablement saisis et déboutaient automatiquement les parties de leurs demandes, sans autre forme de procès. 

Par exemple, lorsqu’un avocat utilisait à la fin de ses conclusions la formule « dire et juger » pour formuler une demande auprès du juge, certains d’entre eux estimaient ne pas être valablement saisis par de telles demandes. 

De la même manière, les demandes tendant à solliciter du juge de « constater … » ont pu être déclarées irrecevables.

Pour mémoire, en principe, les juges ne peuvent statuer que sur les prétentions des parties au procès qui sont énoncées au dispositif de leurs conclusions. 

Le dispositif aussi appelé le « par ces motif » est le résumé des demandes formulées au juge par une partie à un procès et qui se trouve à la fin des écritures données au juge et commence par la formule « Par ces motifs : … »

Ainsi, les juges doivent statuer sur les prétentions énoncées au dispositif et examiner les moyens au soutien de ces prétentions s'ils sont invoqués dans la discussion.

Or, le 13 avril 2023, la Cour de cassation a rappelé le principe selon lequel les juges sont tenus de respecter, en toutes circonstances, le principe de loyauté des débats judiciaires et jugé qu’il importe peu la formulation des termes des demandes faites par des parties à un procès, celles-ci devant simplement soutenir une « prétention » ( Cour de cassation, Deuxième chambre civile, 13 avril 2023, n° 21-21.463)

En conséquence, les juges ne peuvent pas imposer une présentation, ni un formalisme excessif pour s'affranchir de leur obligation de statuer sur toutes les prétentions des parties récapitulées dans le dispositif des conclusions de leurs avocats. 

Cet arrêt sonne donc enfin le glas de la jurisprudence récente qui imposait le respect d’un formalisme excessif des demandes qui leur étaient formulées par les parties au procès.

En l'espèce, une partie à un procès avait conclu dans le dispositif de ses dernières écritures à l'infirmation de la décision de première instance. 

Pour ce faire, elle demandait à la cour d'appel de constater les diverses irrégularités qui émaillaient l'assignation introductive d'instance et, en conséquence, de « dire et juger » que ces irrégularités « constituaient un élément substantiel et de fond susceptible d'entrainer la nullité de l'assignation », et encore, de « dire et juger en toute hypothèse que les modes de convocation et de représentation en justice en vue d'une sanction patrimoniale ou professionnelle constituent des fins de non-recevoir ». 

Pour la Cour de cassation : 

« cette formulation, eût-elle été perfectible sur le plan purement rédactionnel, ne faisait naître aucun doute raisonnable sur la saisine de la cour d'appel de véritables prétentions tendant à voir prononcer la nullité de l'assignation introductive d'instance et l'irrecevabilité des demandes formées par l'appelant ». 

Il découle de cette décision que les juges ne peuvent plus se déclarer irrégulièrement saisis de demandes par les parties au procès au motif que ces demandes auraient été introduites par la formule « dire et juger ». 

Ainsi, les juges sont dorénavant tenus d'examiner toutes les prétentions formulées par les parties au procès, sauf à encourir l’annulation de leur décision par la cour de cassation.  

L’utilisation des termes « dire et juger » et « constater » permet donc de formuler valablement des prétentions ou demandes auprès du juge et confère un droit à la partie qui les requiert d’obtenir leur examen de la part du juge saisi. 

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Anthony Bem
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