Jusqu’au milieu des années 1970, le juge administratif se refusait à contrôler les sanctions disciplinaires prononcées à l’encontre des fonctionnaires ou agents publics fautifs.
Mais depuis 1978, le juge administratif admet un contrôle restreint sur le degré de la gravité de la sanction disciplinaire infligée au fonctionnaire ou à l’agent public. (CE, sect., 9 juin 1978, « Lebon »)
En d’autres termes, le contrôle était limité à l’absence de « disproportion manifeste », c’est-à-dire à la vérification que la sanction infligée n’est pas exagérément excessive ou, à l’inverse, particulièrement laxiste.
Jusqu’alors, c’est ce contrôle restreint qui devait être exercé par le juge administratif invité à statuer sur les sanctions disciplinaires infligées aux fonctionnaires ou agents publics.
Cependant, le Conseil d’Etat vient de renverser cette jurisprudence en consacrant un contrôle complet sur le caractère proportionné ou non des sanctions disciplinaires infligées aux fonctionnaires et agents publics. (Conseil d’Etat, 13 novembre 2013, n°347704)
En l’espèce, un ambassadeur a été démis de ses fonctions puis mis à la retraite d’office en raison de son comportement déplacé avec le personnel féminin.
En effet, il ressort des nombreux témoignages recueillis dans le cadre de la procédure disciplinaire, que l’ambassadeur « avait, dans ses relations professionnelles avec le personnel féminin de la représentation permanente, l'habitude d'émettre de manière fréquente, y compris en public, des remarques et allusions à connotation sexuelle ; qu'il adressait régulièrement à ce personnel des consignes pour l'exercice des fonctions, empreintes de la même connotation, qui, par leur caractère déplacé ou blessant, relevaient de l'abus d'autorité. »
De même, l’ambassadeur avait « fait preuve d'acharnement à l'encontre d'une subordonnée recrutée par contrat en tenant, de façon répétée, des propos humiliants à son sujet, en sa présence et devant des tiers, ainsi qu'en dégradant ses conditions de travail, agissements qui ont porté atteinte à la dignité de l'intéressée et altéré sa santé. »
Le fonctionnaire a alors saisi le Conseil d’Etat pour obtenir l’annulation pour excès de pouvoir des décisions lui ayant infligé les sanctions disciplinaires.
Exerçant ce contrôle, le Conseil d’Etat a considéré, d’une part, qu’ « en estimant que les faits reprochés au requérant constituaient des fautes de nature à justifier une sanction, l'autorité investie du pouvoir disciplinaire ne les a pas inexactement qualifiés. »
D’autre part, le Conseil d’Etat a estimé qu’eu égard à la nature et à la gravité des faits, à la méconnaissance par l’ambassadeur de ses responsabilités éminentes, et de l’atteinte portée à la dignité de la fonction exercée, l'autorité disciplinaire n'a pas pris une sanction disproportionnée en décidant de mettre l'intéressé à la retraite d'office.
Désormais, le juge administratif disposera d’une plus large marge d’appréciation dans la vérification de l’adéquation entre la sanction infligée à un fonctionnaire ou agent public et la faute qu’il a commise.
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Anthony Bem
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