L’article 312-10 du Code pénal définit le délit de chantage en ce qu'il dispose que :
« Le chantage est le fait d'obtenir, en menaçant de révéler ou d'imputer des faits de nature à porter atteinte à l'honneur ou à la considération, soit une signature, un engagement ou une renonciation, soit la révélation d'un secret, soit la remise de fonds, de valeurs ou d'un bien quelconque ».
Ainsi, selon le code pénal, pour que le délit de chantage soit constitué il nécessite l’emploi d’un moyen tel que la menace de révéler ou d’imputer des faits portant atteinte à l’honneur ou à la considération.
La menace peut être écrite ou verbale, adressée à la victime ou bien à un tiers.
La révélation doit porter sur des faits précis et qui ne permettent pas d'avoir de doute sur la réalité des faits que le "maître chanteur" menace de révéler.
Peu importe que le fait soit exact ou faux.
Le délit peut être constitué même lorsque les faits ont déjà été révélés à faible échelle, sont tombés dans l’oubli, ou enfin s'il ne leur a été initialement porté aucun crédit.
Il importe peu que le fait soit exact ou non du moment qu'il est de nature à porter atteinte à la réputation, la probité, à la position sociale ou l'e-réputation de la victime.
S'agissant des menaces de violences en cas de non paiement de somme d’argent, elles ne sont pas constitutives de chantage au sens du code pénal mais de tentatives d’extorsion de fonds ou de menaces de violences contre une personne ou ses biens en fonction des situations.
Par ailleurs, le délit de chantage nécessite une intention coupable, c'est à dire la volonté ou la conscience d’utiliser des menaces illégitimes pour obtenir une contrepartie.
Enfin, selon la loi, le délit de chantage doit s’inscrire dans un but tendant en l’obtention d’une signature, d’un engagement, d’une renonciation, la révélation d’un secret, la remise de fonds, de valeurs ou d’un bien quelconque.
S'agissant de la remise de fonds, il importe peu que le montant soit déterminé ou non.
Concernant la condition selon laquelle la révélation des faits doit être de nature à porter atteinte à l’honneur ou à la considération, la Cour de cassation est venue consacrer de manière explicite une approche concrète du chantage (Cass. Crim., 13 janvier 2016, N° de pourvoi: 14-85905)
En effet, le 13 janvier 2016, la chambre criminelle de la Cour de cassation a dû statuer sur une affaire dans laquelle, au moyen de courriers anonymes, un homme avait menacé son partenaire de révéler sa « relation adultère de nature homosexuelle » à son épouse s’il n’acceptait pas de poursuivre sa relation avec lui.
Une fois l’identité de l’auteur du chantage identifiée, la victime a porté plainte avec constitution de partie civile auprès des doyens des juges d’instruction.
Les juges ont confirmé la culpabilité du prévenu du chef de chantage et l’ont condamné à un an d’emprisonnement avec sursis et, au titre des intérêts civils, à réparer l’entier préjudice subi par la victime.
La cour de cassation a ainsi jugé que :
« pour confirmer le jugement, l'arrêt énonce notamment que la menace de révéler l'orientation sexuelle d'un individu doit s'apprécier au regard du contexte des faits et de la personnalité de la personne menacée ; que les juges relèvent que M. D..., très jeune majeur, entretenait des relations homosexuelles et hétérosexuelles ; qu'ils en déduisent qu'il a pu légitimement penser que la révélation de sa vie intime allait porter préjudice à la relation qu'il entretenait avec une jeune fille ainsi qu'à son image au sein de son établissement de formation professionnelle ;
Attendu qu'en l'état de ces seules énonciations, desquelles il résulte que les révélations et imputations objet des menaces formulées par le prévenu étaient de nature à porter atteinte à l'honneur et à la considération de la victime appréciés au regard de sa situation concrète, la cour d'appel a justifié sa décision ».
Ainsi, les juges du fond apprécient de manière extensive la notion d’atteinte à l’honneur et à la considération, en considérant le délit caractérisé en raison d’une menace de révéler :
- publiquement les relations sexuelles ;
- une liaison adultère à l’épouse de l’intéressé.
Dans le cadre de leur contrôle, les juges peuvent ainsi parfaitement admettre que la menace de révéler au concubin de la victime et à son établissement de formation professionnelle, son orientation sexuelle est de nature à porter atteinte à son honneur et à sa considération.
Il résulte de cette décision que le délit de chantage a été étendu :
- aux révélations intimes ;
- aux faveurs sentimentales et sexuelles.
Pour mémoire, selon l’article 312-10 du Code pénal, la peine encourue pour le délit de chantage ou sa tentative est de cinq ans d’emprisonnement et de 75.000 € d’amende maximum.
Lorsque l’auteur de l’infraction aura mis sa menace à exécution, l’article 312-11 du même pénal prévoit qu'il s'agit d'une circonstance aggravante dont les peines encourues sont de sept ans d’emprisonnement et de 100.000 € d’amende maximum.
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Anthony Bem
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