Extension de la procédure collective en cas de confusion du patrimoine de deux sociétés

Publié le Modifié le 09/04/2012 Vu 11 189 fois 0
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Le 13 septembre 2011, la chambre commerciale de la Cour de cassation a jugé que, lorsque les patrimoines de deux sociétés se confondent, la procédure collective ouverte à l’encontre de l’une peut être étendue à l’autre « peu important l’absence de mouvements de fonds entre elles » (Cass. Com., 13 septembre 2011, N° de pourvoi: 10-24536).

Le 13 septembre 2011, la chambre commerciale de la Cour de cassation a jugé que, lorsque les patrimoines de d

Extension de la procédure collective en cas de confusion du patrimoine de deux sociétés

Les procédures collectives de sauvegarde, redressement ou liquidation judiciaires ne concernent que les sociétés qui en font l’objet et n’atteignent que leur patrimoine personnel .

Cependant, en cas de confusion de patrimoines entre deux sociétés ou avec une société fictive, le patrimoine de l’autre société viendra s’ajouter à celui de la première, souvent insuffisant pour répondre des dettes.

La confusion des patrimoines de sociétés survient :

- Soit entre deux ou plusieurs sociétés d’un même groupe en cas d’imbrication du passif et de l’actif de ces sociétés ;

- Soit une société civile immobilière (SCI) et une société commerciale d’exploitation, la première donnant en location un immeuble à la seconde qui y exerce son activité.

Ainsi, les créanciers de l'une d'entre elles peuvent souhaiter l’extension de la procédure collective d’une de ces sociétés pour augmenter leur chance d’être réglés de leur créance.

Pour ce faire, les créanciers doivent démontrer l’existence d’éléments caractérisant une relation financière anormale ou des flux financiers anormaux entre les sociétés concernées.

Mais la Cour de cassation vient de juger qu’une relation financière anormale peut être établie même en l’absence de mouvements de fonds entre les sociétés concernées.

En l'espèce, la société System’D, locataire commercial de la société civile immobilière Just’In (la SCI), ayant été mise en liquidation judiciaire, le liquidateur a assigné la SCI, afin que lui soit étendue cette procédure, pour confusion de leurs patrimoines.

Les juges d'appel ont dit qu'il avait confusion des patrimoines entre les deux sociétés compte tenu :

- du caractère volontaire et organisé de flux financiers anormaux entre les deux sociétés car la société System’D avait pris en charge les travaux d’aménagement des locaux qui lui étaient loués pour un montant de 91.438 euros soit l’équivalent de quasiment 6 ans de loyers ;

- de l’identité de personnes entre les associés et la dirigeante des deux sociétés ;

- des atermoiements de la gérante devant les interrogations de plus en plus pressantes et précises de l’associé.

Devant la Cour de cassation, la SCI prétendait que :

- l’existence de flux financiers anormaux constitue un critère de la confusion des patrimoines dans la mesure seulement où des mouvements de fonds sans contrepartie réelle peuvent être établis entre la société en redressement ou liquidation judiciaires et la société à l’encontre de laquelle une demande en extension de procédure collective a été formé et si ces flux procèdent d’une volonté systématique de créer une confusion des patrimoines, de telle sorte qu’une dissociation entre les sociétés s’avère impossible. 

- un flux financier entre deux sociétés ne peut présenter un caractère anormal, révélateur d’une confusion de patrimoines, que s’il est dépourvu de contrepartie ; qu’en l’espèce, la société System D bénéficiait aux termes du bail de la jouissance exclusive pendant toute la durée du bail des aménagements et travaux d’amélioration qu’elle avait effectués à ses frais dans les lieux litigieux, ce qui constituait une contrepartie sérieuse à cette dépense, laquelle ne pouvait profiter au bailleur, la SCI, qu’en fin de bail.

Mais les juges de la Cour de cassation n'ont pas retenu ces arguments en considérant que : « dépassant la seule obligation, qui lui était imposée par le bail, d’effectuer les grosses réparations au sens de l’article 606 du code civil, la société System’D a supporté, en plus du loyer, la charge d’importants travaux d’aménagement, intérieur et extérieur, de l’immeuble loué pour un coût équivalent à six années de loyers, qu’elle a dû partiellement financer par le recours à l’emprunt, tandis que la SCI, au terme du bail, devenait, sans aucune indemnité, propriétaire de tous les aménagements ; qu’en l’état de ces constatations et appréciations caractérisant des relations financières anormales entre les deux sociétés, peu important l’absence de mouvements de fonds entre elles relatifs aux travaux d’aménagement, la cour d’appel a légalement justifié sa décision ».

La Haute juridiction a donc validé l'extension de la procédure de liquidation judiciaire de la société SYSTEM’D à la société JUST’IN.

Enfin, il est intéressant de relever que le bail prévoyait que la bailleresse n’était tenue que des grosses réparations au sens de l’article 606 du Code Civil, tandis que la locataire devait “prendre à sa charge,...toutes réparations quelconques d’entretien et notamment faire entretenir, réparer et remplacer, si nécessaire, tout ce qui concerne les installations, éléments et équipements à son usage personnel, ainsi que les fermetures, clôture, portes, fenêtres, volets, glaces, vitres, carrelage, parquets, revêtement de sol et des murs, peintures, tapisseries, boiseries ; que cependant imposer au locataire l’entretien des locaux, et par conséquent le remplacement ou la réfection des éléments d’équipement et de fermeture et les revêtements de sol et murs au cours du bail ”.

Ainsi, en l'espèce, la société locataire a assumé la pose de cloisons (placo), du carrelage (chape), de la peinture, du parquet et de baies vitrées, la réalisation de travaux électriques, ainsi que l’aménagement des espaces extérieurs (dalle, luminaires, gravillons, portail, espaces verts ).

Selon les juges ceci n’a rien à voir avec le fait de faire supporter au locataire le coût de ces éléments et revêtements lors de la construction de l’immeuble - sans permettre au locataire d’être remboursé de cette dépense puisqu’en même temps le bail stipulait que tous embellissements, améliorations ou autres resteraient la propriété du bailleur gratuitement.

Pour mémoire, une société ne peut s’enrichir sans cause et illégitimement au détriment d'une autre société qui s’appauvrie.

Dans ce type d'organisation de sociétés, les clauses des baux commerciaux donnant la part belle au bailleur au détriment du locataire peut être source de contentieux et surtout d'extension de la procédure collective en cas de confusion de patrimoine.

Enfin et pour résumer, les juges peuvent considérer que des avantages en nature accordés entre deux entreprises aux liens capitalistiques identiques constituent une confusion de patrimoine donnant lieu à une extension de la procédure collective envers la société concernée.

Je suis à votre disposition pour toute information ou action.

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Anthony Bem
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