Depuis l’entrée en vigueur de la loi du 14 avril 2011, les conditions de placement en garde à vue ont été modifiées afin de maîtriser le nombre de gardes à vue et de protéger les droits des personnes gardées à vue.
A cet effet, l'article 62-2 du code de procédure pénale donne une définition précise de la garde à vue :
« La garde à vue est une mesure de contrainte décidée par un officier de police judiciaire, sous le contrôle de l'autorité judiciaire, par laquelle une personne à l'encontre de laquelle il existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu'elle a commis ou tenté de commettre un crime ou un délit puni d'une peine d'emprisonnement est maintenue à la disposition des enquêteurs ».
Mais l'évolution la plus notable concerne la protection des droits de la personne gardée à vue, avec la notification de son droit au silence et la possibilité de s'entretenir avec un avocat et d'être assistée par lui lors de chaque interrogatoire.
L'article 63-3-1 du code de procédure pénale dispose en effet que dès le début de la garde à vue, la personne peut demander à être assistée par un avocat.
En outre, l'article 63-4 du même code dispose que, lorsque la garde à vue fait l'objet d'une prolongation, la personne peut, à sa demande, s'entretenir avec un avocat dès le début de la prolongation.
Dès lors, il semblerait que la personne placée en garde à vue ne puisse solliciter l'assistance d'un avocat qu'au début de la mesure, puis lors de la prolongation éventuelle de cette mesure.
Cependant, la Cour de cassation vient de juger que le droit à l’assistance d’un avocat peut s’exercer à tout moment de la garde à vue. (Cass. Crim, 5 novembre 2013, n°13-82682)
En l’espèce, une personne placée en garde à vue a déclaré qu’elle ne souhaitait pas s'entretenir avec un avocat dès le début de la garde.
Lors de son audition le lendemain, le gardé à vue a souhaité voir un avocat.
Sans qu'une suite soit donnée à cette demande, l'officier de police judiciaire a poursuivi l’audition.
Lors de la prolongation de sa garde à vue, le gardé à vue a réitéré sa demande et les services du barreau de Paris ont été informés de ce souhait moins d’une heure plus tard.
Par la suite, mis en examen des chefs de meurtre aggravé et vol en réunion, l'intéressé a alors déposé une requête en vue de l'annulation, notamment, des auditions qui avaient été effectuées en garde à vue.
La cour d’appel a rejeté cette requête en énonçant que, lors de la notification de la garde à vue, l’intéressé n'a pas demandé à être assisté d'un avocat et que ce choix ne lui était à nouveau ouvert qu'au moment de la prolongation de la mesure.
Cependant, la Cour de cassation a cassé et annulé l’arrêt d’appel en considérant qu'il se déduit de l’article 63-3-1 du code de procédure pénale que « toute personne placée en garde à vue doit pouvoir bénéficier de l'assistance d'un avocat dès qu'elle en fait la demande. »
En conséquence, il appartenait aux juges d’appel, « après avoir constaté que les auditions recueillies postérieurement au moment où le mis en examen avait sollicité l'assistance d'un avocat étaient irrégulières, de les annuler et, le cas échéant, d'étendre les effets de cette annulation aux actes dont elles étaient le support nécessaire. »
Cette décision n’est pas sans rappeler un arrêt du 14 décembre 2011 qui avait posé le même principe selon lequel « toute personne placée en garde à vue, doit pouvoir bénéficier de l'assistance d'un avocat dès qu'elle en fait la demande. » (Cass. Crim., 14 décembre 2011, n° 11-81329)
Une différence existe toutefois entre les deux arrêts, car si l’arrêt du 14 décembre 2011 s’est fondé sur l’'article 6 § 3 de la Convention européenne des droits de l'homme (CEDH), l’arrêt commenté du 5 novembre 2013 vise l'article 63-3-1 du code de procédure pénale.
En tout état de cause, il résulte de l’affaire commentée que le droit à la présence de l'avocat lors des auditions et confrontations est permanent et peut s'exercer à tout moment de la garde à vue comme lors de la prolongation de la garde à vue.
Ainsi, une personne gardée à vue n'ayant pas fait le choix d'être assisté d'un avocat lors de la notification de sa garde à vue, pourra tout de même solliciter cette assistance ultérieurement et l'audition devra être interrompue.
A défaut, les déclarations recueillies postérieurement au moment où la personne gardée à vue a sollicité la présence d'un avocat pourront être annulées ainsi que les actes dont elles étaient le support nécessaire.
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Anthony Bem
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