La jurisprudence a déjà eu l'occasion de fixer les conditions dans lesquelles les salariés peuvent se connecter à des sites Internet pendant leurs heures de travail et avec les outils mis à leur disposition par leur employeur.
En l'espèce, un employeur a licencié un salarié pour faute grave.
La lettre de licenciement énonçait pour seul motif des « téléchargements illégaux et répétitifs au sein de l’entreprise ».
Or, pour mémoire, il convient de souligner que la lettre de licenciement fixe les limites du litige de sorte que l'employeur ne puisse pas valablement fonder un licenciement pour des motifs qui ne figureraient pas dans cette lettre.
Le salarié a contesté cette décision et saisi la juridiction prud’homale.
L'employeur a donc tenté de démontrer que le salarié avait bien effectué des téléchargements illégaux et ce à plusieurs reprises.
A cet égard, l’employeur a produit un relevé de connexions sur lequel ne figure qu’une seule visite sur le site allotracker.com ne faisant état que de la consultation d’images ou de pages de cinéma.
Ce seul élément de preuve produit aux débats ne permettait donc que d'établir une connexion à un site permettant des téléchargements mais ne caractérisait pas l’action même de téléchargement.
En outre, l’employeur a tenté de prouver la recherche sur google de sites de jeux et la connexion à jeux-vidéo.com qui n’est pas un site de téléchargement ainsi que de nombreuses connexions à des sites internet tels ceux de l’Équipe, Footmercato, Facebook, Meetic ...
Or, la lettre de licenciement ne visait pas expressément l’usage d’internet pendant le temps de travail et pour un motif non professionnel ou la connexion à des sites internet permettant le téléchargement illégal, mais seulement l’existence de téléchargements illicites et réitérés.
Dans ce contexte, les juges ont estimé qu'il n'existait pas de preuve des téléchargements illicites et réitérés contrairement à ce que l'employeur invoquait pour motiver le licenciement de son salarié.
De plus, les juges ont considéré que le fait pour le salarié d’avoir été contraint de quitter brutalement son emploi constituait un licenciement vexatoire :
« l’employeur avait, en raison des circonstances vexatoires qui avaient accompagné le licenciement, commis une faute ayant causé au salarié un préjudice distinct de celui résultant de la perte de son emploi».
Dans ce contexte, l’employeur a été condamné à payer au salarié des dommages-intérêts en indemnisation du licenciement sans cause réelle et sérieuse et à titre de réparation du préjudice moral subi suite au licenciement vexatoire.
En effet, le licenciement est considéré comme vexatoire lorsque le salarié est contraint de quitter brutalement son emploi.
Il ressort de ce qui précède que le salarié licencié peut prétendre à l'indemnisation de deux préjudices distincts :
- celui relatif au licenciement sans cause réelle et sérieuse permet au salarié de prétendre à des dommages-intérêts dont le montant varie selon le salaire perçu et l'ancienneté ;
- celui relatif au licenciement vexatoire permet au salarié de prétendre à des dommages-intérêts en indemnisation du préjudice moral subi à ce titre et dont le montant dépend de la générosité du juge et des conditions dans la rupture.
La jurisprudence est donc ainsi en train d'évoluer s'agissant de la liberté dont dispose les salariés de se connecter pendant leurs heures de travail à des sites internet extra professionnels.
De plus, cette affaire rappelle que l'employeur qui entend licencier un de ses salariés pour usage abusif d'internet au travail doit :
- pouvoir produire un relevé des connexions sur lequel figure la liste des visites litigieuses et de nature à prouver des téléchargements illicites et réitérés.
- formuler avec précisions la lettre de licenciement en faisant référence aux sites internet litigieux dont ceux permettant un téléchargement illégal.
A défaut, les juges considéreront que le licenciement ne repose sur aucune cause réelle et sérieuse avec toutes les conséquences financières liées.
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Anthony Bem
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