Selon le code de commerce, la rupture de la relation commerciale ne doit pas être brutale.
La brutalité de la rupture des relations commerciales concerne les relations d'affaires stables, suivies et anciennes, qu'elle qu'en soit la forme.
La rupture d'une relation contractuelle sans préavis écrit constitue une rupture brutale des relations commerciales.
La diminution de la rémunération peut aussi constituer le caractère brutal de la rupture des relations commerciales.
La durée du préavis varie selon la durée de la relation ayant lié les parties.
Ce n'est qu'en cas d'insuffisance du délai préavis que la rupture pourra être considérée comme brutale ou abusive
Le préjudice en résultant est évalué en fonction de la durée du préavis jugé nécessaire.
La responsabilité encourue par l'auteur de la rupture, sur le fondement de l'article L. 442-6 I, 5°, du Code de commerce indemnise les préjudices découlant de l'absence ou de l'insuffisance de préavis subi par la victime à l'occasion de la rupture de la relation commerciale établie.
La victime peut aussi obtenir la réparation des préjudices moral et d'image sur le fondement de l'article 1382 du Code civil.
La durée de préavis suffisant s'apprécie en tenant compte de la durée de la relation commerciale et des autres circonstances, notamment de l'état de dépendance économique de l'entreprise évincée, au moment de la notification de la rupture.
En l'espèce, Brahim Asloum, champion du monde de boxe a constitué une société afin de gérer sa carrière.
Cette société a conclu avec la société Starvision une convention par laquelle elle lui concédait en exclusivité la gestion de la carrière du boxeur et de rétrocéder le nom et l'image de ce dernier à un diffuseur.
Ainsi, la société Starvision a, par plusieurs contrats successifs cédé à la société Canal + les droits de retransmission de tous les combats du boxeur.
Le boxeur a gagné le titre de champion du monde WBA.
Des pourparlers ont débuté entre les sociétés Starvision et Canal + en vue de la signature d'un nouveau contrat mais ces sociétés ne sont pas parvenues à s'accorder sur le montant de la cession des droits de diffusion.
Le combat de défense du titre de champion du monde qui devait avoir lieu en a été annulé et, quelque temps plus tard, le boxeur a mis fin à sa carrière.
Dans ce contexte, la société a assigné la société Canal + en paiement de dommages-intérêts pour rupture brutale d'une relation commerciale établie.
Les juges d'appel ont estimé que la dernière proposition de la société Canal+ marquait un recul substantiel par rapport aux contrats conclus antérieurement et que, dès lors, la rupture de la relation devait lui être imputée et que la société Canal + aurait dû respecter un préavis de six mois.
La société Canal plus a ainsi été condamnée à payer au boxeur une indemnité.
Selon les juges, la société Canal +, en proposant une modification substantielle des conditions de la retransmission, défavorable à la société Starvision, à quelques semaines seulement de la remise en jeu du titre de champion du monde, avait brutalement rompu la relation commerciale établie avec cette dernière.
Le caractère brutal de la rupture de la relation commerciale établie peut donc découler de la tardiveté de l'offre de nouveau contrat, selon les circonstances de l'espèce.
La cour de cassation a donné raison aux juges d'appel en considérant que les circonstances de la rupture avaient causé un préjudice moral au boxeur qui, en dépit des récompenses sportives rares et prestigieuses qu'il avait pu gagner, s'était trouvé " déconsidéré " par une société particulièrement reconnue dans le monde sportif, en particulier dans la discipline de la boxe qu'elle était la seule à diffuser.
Par conséquent, l'existence d'une stipulation contractuelle de préavis ne dispense pas le juge de vérifier si le délai de préavis contractuel tient compte de la durée des relations commerciales ayant existé entre les parties et des autres circonstances.
Au cas présent, la société Canal + a attendu une date très proche du combat de remise en jeu de son titre de champion du monde par le boxeur, pour émettre sa première offre.
De plus, les juges ont constaté que la société Canal + disposait depuis longtemps des données par lesquelles elle a, par la suite seulement, légitimé la diminution des rémunérations qu'elle proposait.
La mauvaise foi a donc normalement été prise en compte et sanctionnée par les juges.
Par ailleurs, il est intéressant de relever que les parties avaient stipulé dans leur contrat une période de négociation exclusive de trois mois pour poursuivre leur collaboration au titre des combats disputés le boxeur que la société Starvision n'avait pas respecté.
Or, il résulte aussi de cette décision que même en cas de manquement de l'une des parties au contrat à son obligation contractuelle de négocier avant le terme fixé par le contrat n'est pas exclusif pour l'autre partie de toute brutalité dans la rupture de la relation commerciale établie.
Le préjudice consécutif à la rupture brutale des relations commerciales inclut l'ensemble des conséquences dommageables de la rupture.
La détermination du montant de ce préjudice doit tenir compte de la situation de dépendance économique objective dans laquelle se trouvait la victime à l'égard de l'auteur de la rupture.
Cependant, la situation de dépendance économique constitue une donnée objective, indépendante de la volonté de l'une ou l'autre des parties et qui ne peut être le résultat d'un choix.
L'existence d'un état de dépendance économique d'une entreprise par rapport à une autre s'apprécie en tenant compte de la notoriété de cette dernière, de l'importance de sa part dans le marché considéré et dans le chiffre d'affaires de son cocontractant, ainsi que de l'impossibilité pour ce dernier d'obtenir d'autres partenaires.
Concrètement, le préjudice né d'une rupture brutale de relations commerciales établies est équivalent à la marge brute qu'aurait pu réaliser le partenaire victime de la rupture pendant la durée de préavis qui aurait dû être respecté par l'auteur de la rupture.
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Anthony Bem
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